Alphonse Bertillon

Alphonse Bertillon

C’est là aujourd’hui une figure bien connue et chacun, s’il ne sait point la vie sait au moins les œuvres de l’homme. Au nom de Bertillon s’associe dans la pensée le nom d’anthropométrie ; toute sa gloire tient dans ce mot, et c’est une gloire certaine, non faite de réclames. Ce qu’est l’anthropométrie, nos lecteurs le savent, car le service de M . Bertillon a été exposé dans ce journal à différentes reprises (Voir la Science illustrée, tome III, p. 293.).

M. Alphonse Bertillon appartient à une famille de savants ; son père se signala par des études scientifiques remarquables et son frère, le Dr Jacques Bertillon, est chef du service de la statistique du département de la Seine. Il est né à Paris en 1853 , c’est donc aujourd’hui un homme de quarante et un ans, encore tout jeune et plein d’activité. Les études de M. Bertillon portèrent principalement sur l’anthropologie, suivant en cela les idées de son père qui fut un des premiers et des plus zélés fondateurs de la Société d’anthropologie.

C’est en 1880 que M. Bertillon établit son système au palais de Justice. Résumons ce système en quelques lignes, sans entrer dans aucun détail, pour faire sentir par une vue d’ensemble toute la netteté et la précision de ce procédé d’identification par le signalement seul. Il s’agit de classer des photographies et de les retrouver au moyen des mesures prises sur l’individu amené au Dépôt. Les individus sont d’abord séparés en trois catégories, suivant que leur tête, mesurée de la racine du nez à ce point le plus saillant de la bosse occipitale (inion), est grande, moyenne ou petite. Chacun de ces groupes est divisé lui-même en trois autres suivant que la largeur de la tête est grande, moyenne ou petite. Puis c’est la longueur du médius qui va nous fournir trois nouveaux groupes dans chacun des neuf précédents, puis la longueur du pied gauche (trois groupes dans chacun des vingt-sept précédents), la longueur de la coudée (trois groupes dans chacun des quatre-vingt-un précédents), la longueur de l’auriculaire (trois groupes dans chacun des deux cent quarante-trois précédents), la taille (trois groupes dans chacun des sept cent vingt-neuf précédents), l’envergure des bras enfin fournit les derniers groupes, et cette division est suffisante en ce moment à la préfecture de police où le dernier groupe dans lequel on a à chercher ne contient que neuf à dix photographies.

Vous voyez combien ce système est simple : il suffit de mesurer les différentes longueurs dans l’ordre que nous venons d’énumérer pour voir le champ de ses recherches diminuer de plus en plus jusqu’à ce qu’on n’ait plus qu’à feuilleter quelques photographies. M. Bertillon a fait aussi paraître en 1883, un ouvrage sur l ’Ethnographie moderne, les Races sauvages ; en 1890, un travail sur l’Anthropométrie judiciaire à Paris en 1890, dans lequel il a exposé son système, montré son fonctionnement et les avantages qu’on en avait retirés ; la même année La Photographie judiciaire. Enfin en 1892, il a publié un ouvrage très curieux et plein de remarques intéressantes sur la Reconstitution du signalement anthropométrique au moyen des vêtements, dans lequel il a montré les relations qui existent entre les différentes longueurs des os du squelette et les habits portés par le vivant.

Léopold Beauval, La Science Illustrée N°332 du 7 Avril 1894

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