Une source inépuisable d’énergie à bon marché : Le Vent

Constantin, La Nature N°2620 - 21 Juin 1924
Vendredi 5 octobre 2012 — Dernier ajout lundi 4 mars 2024

Les réserves mondiales de combustibles, solides et liquides, s’épuisent rapidement et, quels que soient les espoirs, splendides mais lointains, que fait naître l’étude de la radio-activité de la matière, cette menace suspendue sur notre vie économique mérite l’attention de tout homme qui pense. Cette question doit particulièrement nous préoccuper, nous Français, qui n’avons pas su, comme notre voisine la Grande-Bretagne, nous assurer une part suffisante de terrains pétrolifères pour sauvegarder, à ce point de vue, même notre indépendance actuelle.

On essaie de nous consoler en nous vantant l’incomparable richesse de la France en énergie hydraulique, en énumérant les millions de chevaux qui peuvent être, si nous le voulons, à notre disposition. En attendant, nous avons, au cours des onze premiers mois de l’année 1923, importé 28 millions de tonnes de charbon et dû débourser pour cela 3 milliards 300 millions de francs dont l’exportation a pesé terriblement sur notre change.

C’est qu’une chute d’eau, comme une mine, comme une usine, n’est pas plus de la richesse que l’hydrogène n’est de l’eau. Elle n’en est que l’un des éléments constitutifs et elle ne vaut qu’unie à d’autres éléments Indispensables, en première ligne le capital. Faute de ces éléments, elle n’est qu’une ombre de richesse.

Pourquoi le capital ne vient-il donc pas, actuellement, aux chutes d’eau, dans notre France si riche, alors que, par les prix élevés du combustible, le moment semble être particulièrement favorable ? Ce ne peut être par ignorance : l’exploitation d’une centrale hydroélectrique n’est plus, depuis longtemps, une affaire nouvelle, pleine d’inconnu, une entreprise à faire reculer à coup sûr la masse de nos compatriotes peu amoureux du risque. Bien des industriels savent aujourd’hui calculer exactement ce que l’on peut attendre de la mise en valeur d’une chute d’eau. Et c’est, hélas, justement pourquoi ils se refusent à y employer leurs disponibilités. En un mot la plupart des chutes qui restent à utiliser se trouvent à la limite économique d’exploitation : elles risquent de ne pas rémunérer suffisamment les capitaux engagés.

Sans doute beaucoup d’entre elles, dans un État bien policé. devraient-elles être aménagées tout de même avec l’appui des organismes officiels.

Les répercussions secondaires de ces augmentations de richesse sur la prospérité générale compenseraient, et au delà, les sacrifices consentis. Des tentatives ont été faites dans ce sens, mais l’éducation civique de la nation est encore trop rudimentaire pour que le problème puisse de longtemps être résolu dans son ensemble.

D’autres moyens encore ont été proposés : le carburant national, le gazogène au charbon de bois, l’utilisation des marées …. Efforts intéressants, certes, et dignes d’être encouragés. Toutes ces solutions malheureusement, outre les inconvénients particuliers, quelquefois très graves, qu’elles comportent, sont coûteuses. Et elles ne retarderont que de bien peu d’années l’échéance imminente.

Faut-il donc nous abandonner à la fatalité ? Ou nous contenter de cet ’espoir mystique qu’une invention prochaine nous apportera le salut ?

Nous n’en sommes pas là, heureusement, et nous avons d’autres ressources. Il existe à notre portée un réservoir immense d’énergie à bon marché : il ne tient qu’à nous d’y puiser toute celle qui nous est nécessaire dans notre civilisation d’aujourd’hui et celle bien plus abondante qui nous sera nécessaire dans notre civilisation, meilleure. de demain. Nous y trouverons aisément les kilowatts indispensables pour faire tourner nos usines, avancer nos trains, chauffer nos habitations et les fourneaux de nos cuisines aussi bien que nos fours métallurgiques, alimenter les usines électro-chimiques qui nous fourniront métaux et engrais ….. Nous y trouverons les éléments d’une prospérité plus grande, d’un peu plus de bien-être et, qui sait, d’un peu plus de bonheur.

Lorsque nous élevons nos regards vers le ciel et que nous voyons accourir, puis s’enfuir, les lourdes nuées, sans cesse remplacées par d’autres, puis par d’autres, sans arrêt, des jours et des nuits, inlassablement, nous pouvons, en nous émerveillant, nous faire une idée de l’immense quantité de chevaux-vapeur qui passent là-haut, presque à notre portée, et qui s’en vont. … Or il est en notre pouvoir, moyennant un tout petit effort, d’en retenir, par la bride si l’on peut dire, des millions pour notre usage. Le vent, voilà l’intermédiaire merveilleux par lequel le soleil met à la disposition de l’homme un peu de son infinie puissance.

Le vent,que nous avons utilisé si mal jusqu’à ce jour, dont nous refusons maintenant presque entièrement les services pour nos transports maritimes, alors que, si nous étions sages, les Océans seraient sillonnés partout de vaisseaux de plusieurs milliers de tonnes, poussés, à peu de frais, dans toutes les directions, par des turbines aériennes. Le vent qui ne moud même plus notre grain, à qui nous nous bornons à demander d’élever quelques mètres cubes d’eau ou d’alimenter quelques rares lampes à incandescence, alors qu’il pourrait nous fournir des milliards de kilowatts-heure.

Oh ! je sais bien pourquoi il en est ainsi, je connais les difficultés qui restent à vaincre, les objections que l’on peut opposer. Mais je sais surtout que toutes ces difficultés, toutes ces objections disparaissent comme des ombres devant la lumière de la technique moderne.

Et ici je supplie ceux qui me lisent de mettre un moment de côté leurs préjugés et leurs idées préconçues, d’oublier ce qu’ils ont lu et entendu, de suivre attentivement les explications simples que je vais donner : ils verront que, sans avoir recours à aucune invention nouvelle, en mettant à profit uniquement des résultats confirmés, en ne quittant jamais le terrain solide de la science de l’ingénieur, je vais pouvoir dessiner les grandes lignes d’un avant-projet dans lequel la part de l’imprévisible sera infime et les chances de succès au moins aussi grandes que dans une foule d’entreprises où bien des hommes n’hésitent pas à engager leur avenir.

Les turbines aériennes. - Pour transformer en énergie mécanique utilisable l’énergie cinétique du vent, l’organe aujourd’hui le mieux approprié — on n’en peut plus douter après les travaux de M. Lapresle au laboratoire Eiffel — est la turbine aérienne à deux pales.

A deux pales à cause des avantages suivants :

  • 1° Plus grande puissance ;
  • 2° Plus grand rendement aérodynamique, c’est-à-dire moindre poussée ;
  • 3° Plus grande vitesse de rotation, c’est-à-dire transmissions mécaniques de moindre poids ;
  • 4° Plus faible prix de revient.

Le seul inconvénient, bien léger en l’occurrence, de cette turbine est son faible couple de démarrage. Nous verrons plus loin combien il est peu gênant et facile à annihiler.

Les puissances que l’on peut obtenir de telles turbines atteignent, dans certaines conditions d’emploi aisées à réaliser, les valeurs déterminées par l’expression suivante :

P = 0,000 267 a V³ D² dans laquelle

  • P est la puissance mécanique exprimée en chevaux,
  • a est le rapport de la densité de l’air dont on utilise l’énergie cinétique à celle de l’air des laboratoires (15° C et 760 mm de mercure),
  • V est la vitesse du vent en m/s
  • D est le diamètre de la turbine en mètres.

Sans doute cette expression se rapporte à des essais de laboratoire sur des turbines de 0,80 m de diamètre au plus. Mais l’on sait qu’en aérodynamique les surprises sont souvent heureuses : pour des raisons qui tiennent à la viscosité de l’air, les résultats ont une tendance générale bien nette à s’améliorer lorsque l’on passe d’un petit à un grand modèle. Et c’est cette tendance en effet que nous avons pu constater pratiquement dans les essais du bateau le Bois-Rosé qui était muni d’une turbine à deux pales de 9 m. de diamètre. Le lamentable accident qui nous a privés de ce remarquable instrument de travail nous a malheureusement privés aussi de la possibilité de pousser nos mesures jusqu’au bout et d’en tirer des conclusions sans doute importantes. Il n’en est pas moins tout à fait encourageant d’avoir pu constater qu’une turbine de 9 m. de diamètre donnait, à très peu de chose près, en plus plutôt qu’en moins, la puissance que nous avions calculée par avance. Et il n’est pas du tout aventuré après cela d’appliquer les mêmes calculs à des turbines de 50 et 40 m. de diamètre.

Car ce sont là des dimensions que nous pouvons en toute sécurité — je montrerai plus loin pourquoi — envisager aujourd’hui, sans préjuger de ce que nous apportera demain.

De telles turbines donneraient au sommet du Mont-Ventoux, à 1900 m. d’altitude, où la densité de l’air n’est que les 83% de celle du niveau de la mer :

pour un vent deturbine de 30 m. Dturbine de 40 m. D
6 m/s 43 ch 76.5 ch
10 m/s 200 ch 556 ch
14 m/s 546 ch 972 ch
21 m/s 1.840 ch 5.275 ch

Or si l’on étudie les conditions météorologiques dans lesquelles s’est trouvé le Ventoux durant l’année 1915, année pour laquelle nous possédons des données complètes, on constate qu’il y a eu

  • 106 jours de vent d’environ 10 m/s.
  • 65 jours de vent d’environ 14 rn/s.
  • 50 jours de vent d’environ 21 rn/s.

et, en ne faisant état que de ces 219 jours, on peut calculer aisément que la première turbine aurait pu fournir autant d’énergie que si sa puissance continue, pendant 365 jours de 24 heures, avait été de 400 ch.

Dans les mêmes conditions une turbine de 40 m. de diamètre aurait pu fournir une puissance équivalente à une puissance continue de 710 ch.

Avec 50 m. de diamètre nous passerions à une puissance de 1110 ch. environ.

Or, sur le Ventoux, il y a place pour un nombre considérable de pareilles unités…

Étude des turbines aériennes au point de vue de la résistance des matériaux. - Mais de telles machines pourront-elles résister aux efforts auxquels elles seront soumises ? Telle est.la première objection à laquelle je dois m’attendre et à laquelle je vais m’efforcer de répondre par avance.

a) Efforts centrifuges. - Lorsqu’on étudie les efforts centrifuges qui s’exercent sur des pales d’hélices ou de turbines, on arrive bien vite à la constatation de ce fait remarquable que le facteur le plus important à considérer n’est pas le rayon R ou la vitesse angulaire ω, mais le produit R² ω² qui représente le carré de la vitesse périphérique.

D’autre part il résulte des travaux exécutés au laboratoire Eiffel et cités plus haut que, pour qu’une turbine aérienne à deux pales fournisse le maximum de puissance compatible avec son diamètre, il est nécessaire que sa vitesse périphérique soit un peu inférieure à 6 fois la vitesse du vent. Si donc l’on prévoit des organes d’effacement agissant à partir de 25m/s de vitesse du vent, la vitesse périphérique des pales ne dépassera jamais 6 X 25 = 150 rn/s.

Or, sans parler de celles obtenues par Rateau et Maurice Leblanc dans certaines applications, on peut signaler que la vitesse périphérique des hélices d’avions atteint couramment 300 m/s. Toutes choses égales d’ailleurs, les efforts centrifuges dans les turbines envisagées, et cela quel que soit leur diamètre, ne dépasse l’ont donc pas le quart des efforts correspondants auxquels sont soumises les hélices d’aviation.

Pour lever toute inquiétude à cet égard, on peut calculer directement le taux de travail à l’encastrement — supposé passant par l’axe de rotation — dû à la force centrifuge dans deux cas simples : pale cylindrique et pale conique.

Les résultats de ce calcul sont donnés par les deux expressions suivantes :

$$$ T_1 = \frac{\delta}{g} \frac{R^2 \omega^2}{2}$$$

$$$ T_2 = \frac{\delta}{g} \frac{R^2 \omega^2}{12}$$$

dans lesquelles T1 et T2 sont les taux de travail correspondants aux deux cas considérés,

  • &delta, la densité du matériau employé,
  • g, l’accélération de la pesanteur.

On trouve ainsi pour de l’acier de 7,8 de densité

  • T1 = 10 kg/mm2
  • T2 = 1,6 kg/mm2

Quel que soit le système de construction définitivement adopté, on pourra toujours faire en sorte que le taux du travail réel dû aux efforts centrifuges soit compris entre ces deux valeurs, ce qui permet éventuellement, tout en conservant un coefficient de sécurité très élevé.d’adopter comme matériau l’acier forgeable et d’arriver ainsi à un prix de revient extrêmement bas.

Les pales auront, il est vrai, à résister à d’autres efforts, en premier lieu aux efforts de flexion.

b) Efforts de flexion. - Ces efforts proviennent de la poussée du vent et le moment correspondant atteint, de même que sur les hélices d’avions, une valeur considérable. Mais les conditions ici sont bien plus favorables.

En premier lieu il est possible de prolonger en avant l’axe de rotation et de haubaner les pales.

Il y a encore beaucoup mieux. En aviation on dispose la fibre neutre de la pale de telle sorte que les efforts de flexion soient équilibrés par une composante de la force centrifuge. Malheureusement cette compensation n’est valable que pour une altitude donnée à cause de la variation concomitante de la densité de l’air : l’action de la disposition judicieuse de la fibre neutre n’est donc qu’un palliatif. Or, pour les turbines envisagées, l’altitude est constante : la compensation pourra donc être, pratiquement, parfaite.

c) Rigidité propre des pales. - Il faut, bien entendu, que les pales, au repos, et quelle que soit leur position, puissent supporter, sans s’affaisser et sans flamber, leur propre poids. Mais qui pourra conserver quelque inquiétude à cet égard s’il veut bien considérer qu’une pale, de 20 m. de long par exemple, pourra avoir une largeur moyenne de plus de 3 m. et une épaisseur, au tiers du bord d’attaque, de plus de 0,50 m2. Les moments d’inertie à envisager dans une telle poutre seront, on le voit, largement suffisants.

Pylônes de support. - Si, comme nous l’avons supposé plus haut, la turbine est munie d’organes d’effacement agissant à partir de 25 m/s de vitesse de vent, la puissance maxima recueillie, sur le Ventoux, sera pour une unité de 40m. de diamètre, d’environ 5500 ch.

La poussée correspondante, pour un rendement aérodynamique de 50 %, sera donc d’environ 33 tonnes. A ce chiffre il faut ajouter le fardage dù au pylône lui-même et, éventuellement, aux transmissions. Comme les dimensions des assises et des éléments constitutifs des pylônes ne sont pas limitées, il n’y a aucune difficulté spéciale à prévoir dans l’obtention de la résistance désirable.

Transformation de l’énergie mécanique recueillie en énergie immédiatement utilisable. - Une fois assurée, dans des conditions de sécurité normales, la transformation de l’énergie cinétique du vent en énergie mécanique — mécanique au sens industriel du mot — il faut procéder à une deuxième transformation de façon à rendre cette énergie à la fois facile à distribuer et immédiatement utilisable : il faut la convertir en énergie électrique.

Dans les tentatives faites jusqu’à ce jour dans cette voie, le moulin à vent commande toujours la dynamo par l’intermédiaire de transmissions (trains d’engrenages, arbres à joints de Cardan, câbles, courroies, etc … ) Nous pourrions, certes, faire de même et les trains d’engrenages ainsi nécessaires seraient du même ordre que ceux employés pour les laminoirs, mais il vaudrait sans doute beaucoup mieux accoupler directement turbines et génératrices électriques, en enfermant celles-ci, avec leurs accessoires et leurs tableaux de distribution, dans des solides de faible résistance à l’avancement, mobiles, pour l’orientation de l’ensemble, autour d’un axe vertical.

Les vitesses de rotation pour des vitesses de vent variant de 10 mis à 25 m/s, seraient comprises entre 36,5 et 95 tours par minute pour la première turbine et 28,5 et 71,5 tours par minute pour la turbine de 40 m. de diamètre. Étant donné les puissances en jeu ces vitesses sont très admissibles.

De plus, la présence de ces solides au droit du moyeu de la turbine faciliterait l’écoulement de l’air et augmenterait sans doute le rendement aérodynamique du système.

Les marges de vitesses de fonctionnement signalées ci-dessus attirent l’attention sur l’une des difficultés qui ont le plus arrêté les ingénieurs dans leurs essais de l’utilisation de l’énergie cinétique du vent. La puissance produite par les turbines aériennes, si certaines conditions d’emploi sont maintenues, est en effet proportionnelle au cube de la vitesse du vent, c’est-à-dire qu’elle varie dans de larges limites. Nous allons étudie r rapidement ces variations et voir comment l’on peut parer à leurs inconvénients.

a) Variations instantanées. - Celles, de faible amplitude, qui se produisent continuellement. II est évident que leur action résultante sur une unité de grande inertie et, à plus forte raison, sur plusieurs unités couplées, sera négligeable.

b) Variations lentes. - Celles qui se produisent par exemple, d’un jour à l’autre. L’existence de ces variations exige soit que l’énergie soit utilisée par des industries Il fonctionnement très souple, soit mieux encore, qu’il y ait interconnexion avec d’autres sources d’énergie faisant l’appoint.

Dans tous les cas, ces variations devront être suivies à la station réceptrice au moyen du couplage ou du découplage d’autant d’unités d’utilisation qu’il sera nécessaire. Comme l’énergie provenant du vent sera sans doute toujours la moins coûteuse et qu’il y aura avantage à lui donner la préférence toutes les fois que ce sera possible, une telle organisation s’imposera d’elle-même.

c) Variations rapides. - Celles qui se produisent par exemple, de quart d’heure en quart d’heure.

Dans la plupart des petites installations existantes on utilise, pour absorber ces variations, l’accumulateur électrique.

Mais l’accumulateur électrique, pour une installation de la puissance envisagée, présente toute une série d’inconvénients qui paraissent prohibitifs.

Il n’en est pas de même de la chaudière électrique avec accumulateur de vapeur et l’on peut même concevoir une installation dans laquelle l’énergie mécanique puisée dans l’atmosphère, puis transformée en énergie électrique servirait tout entière à la production de vapeur d’eau sous pression au moyen de chaudières électriques à courant continu ou alternatif. Le maintien de la périodicité constante ne serait pas nécessaire, car dans les chaudières électriques à courant alternatif et à électrodes le facteur de puissance est très voisin de l’unité. Cette vapeur d ’eau sous pression serait utilisée à son tour soit directement pour certaines industries (teintureries, sucreries, papeteries, etc.), soit retransformée en énergie électrique cette fois parfaitement domestiquée.

L’affaire paierait sans aucun doute. On sait en effet que 4 kwh utilisés dans une chaudière électrique donnent environ autant de vapeur à la même pression que 1 kg de charbon à 7000 calories.

L’unité de 40 m. de diamètre envisagée ci-dessus pourrait ainsi économiser par an huit à neuf cents tonnes de charbon, ce qui représente la rémunération d’un capital considérable.

La chaudière électrique a fait de grands progrès ces dernières années et les revues techniques ont récemment donné la description d’une. unité de 18 000 kW de puissance installée aux États-Unis, au Niagara, et qui donne toute satisfaction. Des constructeurs français ont d’ailleurs déjà obtenu dans cette voie des résultats remarquables.

Il n’est donc pas téméraire de compter ici sur une utilisation généralisée de ce transformateur d’énergie.

Toutefois il sera presque certainement possible de n’employer la chaudière électrique que comme tampon et de verser directement à des réseaux en interconnexion une très grande partie de l’énergie produite et convenablement transformée.

Voici comment on peut concevoir l’ensemble des installations, ensemble que des nécessités pratiques — l’insuffisance de nos moyens d’action — obligeront sans doute à modifier singulièrement dans la plupart des cas.

Avant-projet général. - La région du Ventoux est une région privilégiée au point de vue qui nous occupe, mais il en existe certainement des milliers d’autres dans le monde tout aussi favorisées, en particulier au bord de la mer.

Chacune de ces régions peut comprendre un certain nombre d’unités fournissant, par exemple, du courant continu et couplées en série. Chacune de ces unités est commandée d’un poste central qui peut à distance la coupler et la découpler. L’envoi d’un peu de courant dans l’induit de la génératrice suffira toujours pour provoquer le démarrage si la poussée du vent n’est pas suffisante. L’orientation peut être soit automatique, soit commandée.

Le transport de force se fera à la fois à tension et à intensité variables de façon à pouvoir suivre aisément les variations de puissance. La tension sera réglée par des régulateurs automatiques commandés par le vent.

En un point bien choisi se trouvera la station transformatrice comprenant des groupes convertisseurs, des chaudières électriques avec accumulateurs de vapeur et, s’il y a lieu, des groupes turbo-générateurs. Les groupes convertisseurs et les chaudières devront être combinés de telle façon que la vitesse des moteurs à courant continu reste constante malgré d’assez grandes variations de tension. Des dispositifs de couplage et de découplage rapides seront prévus. Des régulateurs automatiques, commandés éventuellement par des fils pilotes, faciliteront les manœuvres. L’énergie mise ainsi sous la forme de courant industriel à périodicité constante pourra être placée à la disposition des réseaux en interconnexion qui amont intérêt à l’absorber toute et à consacrer leurs autres centrales génératrices, hydrauliques et thermiques, à production plus coûteuse, uniquement à faire l’appoint.

Conclusion. - Il est, bien entendu, impossible de donner ici tout le détail de l’appareillage à prévoir et de l’étude des machines électriques à adopter. J’en ai assez dit cependant, j’espère, pour montrer que l’effort technique de mise au point que demandera la résolution de ce problème paraît bien peu de chose en regard du résultat qui consiste à établir - en grande série, car les conditions seront partout comparables - avec un pylône de moins de 25 m. de hauteur et une turbine à deux pales, une machine motrice capable de fournir dans l’année, à peu près gratuitement, 710 X 24 X 365 ch.h,

Il serait prématuré de vouloir fixer dès maintenant le prix de revient de l’énergie ainsi obtenue, mais il n’est pas aventuré de penser que ce prix de revient sera si bas qu’il n’a été atteint que bien rarement jusqu’à ce jour dans les centrales hydroélectriques les plus favorisées.

Comme les quantités qu’il sera possible de capter ainsi sont pratiquement illimitées, on peut dire que l’utilisation industrielle de l’énergie cinétique des vents sera, suivant toutes probabilités, un événement économique considérable, tel qu’il est aujourd’hui impossible d’en mesurer la portée.

Constantin

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