Né à Boston, dans le Massachusetts, en 1865, Percival Lowell conquit ses grades universitaires à Harvard en 1876, et commença à utiliser ses connaissances variées et les ressources de sa grande fortune à des explorations scientifiques, principalement dans l’Extrême-Orient. En 1883, étant au Japon, il fut, en raison de ses connaissances spéciales, attaché comme secrétaire étranger à la première ambassade coréenne envoyée en Europe ; et, à son retour, il reprit ses travaux de prédilection momentanément interrompus.Nous avons de lui : L’Ame de l’Extrême-trient, le Japon occulte, Choson ou la Terre du calme matînal, et Noto ou Un coin inexploré du Japon. En 1894, nous le retrouvons dans l’Arizona, où il avait établi à ses frais un observatoire destiné à étudier la planète Mars, se livrant sans relâche à de patientes observations et à de minutieux calculs.
De ces longs et persévérants travaux le résultat se trouve condensé dans un ouvrage remarquable, récemment paru sous ce simple titre : Mars, et qui fait le plus grand honneur à son savant et modeste auteur.Le style en est si clair, la manière de présenter les choses si attrayante, les raisons exposées si plausibles, les conclusions y sont tirées avec tant de réserve, que le lecteur se sent captivé dès les premières pages et entre aisément dans les idées qui semblent être chères à l’écrivain. On a presque du regret de le voir si consciencieux, si sobre dans ses déductions, s’abstenir d’affirmer avec plus d’assurance des propositions que semble suffisamment établir la sagesse de ses raisonnements. Pour lui, la solution obtenue à si grands frais reste encore dans le domaine de la probabilité ; mais s’il n’a pu démontrer rigoureusement l’existence de la vie inintelligente sur la planète Mars, il en a tout au moins montré la possibilité.
Si la vie extra-terrestre existe, comme nous sommes conduits à le croire en raison du peu de place que nous occupons dans l’univers, c’est dans les astres les plus accessibles à nos regards que nous pouvons en trouver la manifestation. Leur nombre étant, hélas ! très restreint, nous n’avons guère à choisir. Celui qui est le plus rapproché de nous, le globe lunaire, a été vainement fouillé à l’aide des télescopes les plus puissants : rien n’y a révélé, dans son état actuel, la possibilité de la vie telle que l’entendent les naturalistes : il semble donc aujourd’hui irrémédiablement dépeuplé. Après la lune, la planète Mars, étant la plus proche voisine de la terre, devait naturellement attirer l’attention des savants, et c’est ce qui a fait converger vers elle tant de regards scrutateurs.
A la différence des étoiles qui occupent toujours la même place au firmament, les planètes, à cause de l’irrégularité apparente de leur marche, sont quelquefois difficiles à apercevoir. Mars en particulier, se trouve dans des conditions si défavorables qu’elle ne s’élève au-dessus de l’horizon qu’une fois tous les quinze ans. Elle brille alors d’un vif éclat qui rivalise en intensité avec celui de Sirius et de Jupiter, et nous paraît plus grande parce que ; à ce moment, elle s’approche de nous plus qu’aucune autre sphère céleste.
Il faut donc profiter de ce moment pour l’observer et changer ensuite de place si on veut en faire une étude suivie. Tant qu’elle reste dans le champ du télescope, elle a cet avantage sur les autres planètes qu’elle n’est jamais voilée par ses propres nuages. Son aspect d’ailleurs est des plus étranges ; ce n’est pas seulement sa teinte rougeâtre si redoutée des gens superstitieux qui la rend remarquable, ce sont les taches singulières et les lignes symétriques dont elle est couverte comme d’un immense réseau.
Du 24 mai 1894 au 3 avril 1895, neuf cent dix sept cartes de son disque vu dans des positions diverses ont pu être dressées par P. Lowell, et de toutes ses observations il a déduit des conséquences qui lui ont servi à établir sa théorie de la vie extra-terrestre. Mais il a soin de nous faire remarquer que par cette expression il n’entend pas désigner uniquement la vie humaine. Le milieu étant différent, les êtres doivent nécessairement y revêtir d’autres formes ; cependant il est très possible qu’une égale intelligence, même plus développée que celle dont nous sommes si fiers, anime, en dehors de la terre, des corps et des organes différents des nôtres. Tels les poissons qui vivent dans l’eau, sont autrement doués que les reptiles qui rampent sur la terre et que les oiseaux qui vivent dans l’air.
Mais quelque forme diverse que revête la matière, rien n’empêche que l’âme du monde soit unique et que le même souffle qui s’en est échappé pour animer les homuncules que nous sommes n’ait également communiqué l’intelligence avec la vie aux êtres issus d’un limon différent. Aucun fait d’expérience ne s’y oppose, et la probabilité en faveur de cette opinion parait assez grande pour n’être pas à dédaigner.
Pour s’assurer de la possibilité de la vie sur la planète Mars, P. Lowell étudie d’abord ses conditions physiques et, après avoir reconnu qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’existence d’êtres animés, il recherche les signes positifs de leur activité corporelle et intellectuelle.
L’astre errant et pacifique auquel nous donnons,’ non sans quelque ironie, le nom du dieu de la guerre, dut, dès l’antiquité, par suite de sa couleur et de sa mobilité, être remarqué des bergers qui passaient les nuits, dans les plaines de la Chaldée, à garder leurs dociles troupeaux ; mais ce sont les Égyptiens qui, les premiers, en étudièrent les mouvements et transmirent aux Grecs la connaissance qu’ils en avaient acquise, connaissance bien imparfaite sans doute. Kepler, se fondant sur les observations de Ticho Brahé, reconnut et montra la route elliptique qu’elle suit autour du soleil. Cette route une fois connue, on a pu en déduire plusieurs autres notions. C’est ainsi, par exemple, que l’on est parvenu à savoir que la lumière et la chaleur déversées sur la planète Mars varient dans la proportion de 16 : 20 : 24, selon qu’elle s’éloigne davantage du soleil. On sait encore qu’elle met près de 687 de nos jours à décrire son ellipse autour du soleil, tandis que la terre n’en met que $$$ 365 \frac{26}{100}$$$ ce qui fait que nous la rencontrons et la dépassons une fois tous les deux ans et deux mois, Ces rencontres s’appellent oppositions, parce qu’elles ont lieu alors que Mars est, dans le ciel, à l’opposé du soleil. Mais cette planète peut alors occuper soit le point de son orbite le plus rapproché de l’astre radieux, c’est-à-dire être à son périhélie, soit le plus éloigné, que l’on appelle aphélie ; ce qui fait varier la distance qui la sépare de nous dans la proportion de 35 à 61 et explique les grandes variations que l’on remarque dans son éclat qui devient 4 fois 1/2 plus considérable.
Mars est accompagnée d’un satellite dont la découverte a rendu facile le calcul de sa masse, qui est 10/94 de celle de la terre et $$$ \frac{1}{3,093,500 }$$$ de celle du soleil. Mesuré à l’Observatoire de Flagstaff, son diamètre, calculé d’après la dimension de son disque apparent, a été évalué à 3460 kilomètres. Sa surface est un peu plus du quart de celle de la terre ; son volume 1/7, sa densité 72/100 ; sa force d’attraction 38/100, ce qui revient à dire qu’un poids de 100 kilogramme. n’y pèserait que 38 kilogrammes. Vu de Mars, notre globe terrestre occuperait exactement la même position que Vénus par rapport à nous.
Tous ces chiffres, quoique un peu arides ; sont nécessaires à l’intelligence des détails dans lesquels nous avons à entrer.
La première observation télescopique de Mars date de l’année 1650 (28 novembre) et fut faite par Huygens, qui put en conclure que cette planète opère un mouvement. de rotation sur elle-même en 24 heures environ. En 1866, Cassini trouva le chiffre , de 24 heures 40 minutes. Des calculs encore plus précis et poussés par Lowell jusqu’à 1/10 de seconde montrent qu’il y a en effet une différence de 40 minutes entre les jours de Mars et les nôtres qui sont plus courts [1].
Le mouvement de rotation connu, il a été facile de déterminer la position des pôles. Autour de ceux-ci, on peut, avec l’aide même d’un des plus petits télescopes modernes, apercevoir deux endroits blancs et brillants, à chacun desquels on a donné le nom de calotte polaire. La position des pôles de Mars ainsi reconnue permet de calculer l’inclinaison de son axe par rapport à son écliptique : cette inclinaison est d’environ 25°. Elle est donc un peu plus accentuée : que celle de l’axe terrestre qui n’est que de 23° 24’ ; et comme c’est elle qui cause le changement des saisons, il nous est facile de comprendre que Mars doit avoir, comme nous, quatre saisons. Celles-ci seraient presque semblables aux nôtres si l’excentricité de ,l’ellipse décrite autour du soleil était la même, mais comme elle est plus grande, la durée des saisons qui diffère seulement de huit jours sur la terre présente une différence de soixante-quatorze jours sur Mars. Pour être plus précis, car ce point est de la plus grande importance pour savoir si la planète est habitable, relevons les chiffres suivants : dans l’hémisphère boréal de Mars, l’hiver dure 147 de nos jours, le printemps 191, l’été 181, l’automne 149 ; tandis que dans l’hémisphère austral l’hiver dure 181 jours, le printemps 149, l’été 147, et l’automne 191.
A ces indications il est nécessaire d’ajouter quelques mots de la forme de Mars qui, comme les petites planètes, est aplatie aux pôles, mais moins qu’on ne l’avait cru, par suite d’une erreur élucidée à Flagstaff. Cette erreur avait pour cause la présence d’un crépuscule bordant le disque de Mars et qui avait pour conséquence d’augmenter la dimension du diamètre équatorial, tandis qu’il affectait à peine le diamètre polaire. Les nouvelles mesures obtenues par Lowell acquièrent d’autant plus de valeur que, pour la première fois, en 1894, la calotte polaire a entièrement disparu et, avec elle, l’irradiation qu’elle causait à l’extrémité du diamètre polaire. En tenant compte de toutes les causes d’erreur, il a reconnu que l’aplatissement polaire de Mars est exactement 1/190 de son diamètre équatorial ; il est donc un peu plus considérable que celui de la Terre, qui n’est que de 1/303. Dans tous les Cas, un tel aplatissement des deux planètes montre que, à l’époque chaotique, elles ont dû être dans un même état de fusion, mais que le refroidissement a commencé un peu plus tôt pour Mars, dont l’évolution se trouve par conséquent plus avancée. Mais cette évolution est-elle arrivée à un tel degré que l’air et l’eau aient disparu ? Cette question est d’une importance facile à saisir, car aucun animal, aucune plante ne sauraient subsister sans ces deux éléments. Voici comment Lowell s’y prend pour la résoudre.
Lorsque la période chaotique d’une planète est passée, c’est-à-dire lorsqu’elle a perdu sa chaleur propre, l’air devient aussi nécessaire à son développement inorganique qu’à son évolution organique, ce qui revient à dire que, sans air, aucun changement ne peut avoir lieu à sa surface. L’astre privé d’air passe, pour ainsi dire, à l’état de momie ; telle la Lune à la surface de laquelle une morne immobilité a succédé aux plus grands cataclysmes. La lune ne change plus de forme ; elle peut avoir eu une atmosphère autrefois, il n’en reste plus trace perceptible aujourd’hui.
A la surface de Mars, au contraire, des changements considérables sont visibles. Pour ne parler que de ceux observés, en 1894-95, à Flagstaff, la calotte polaire centrale couvrait, au 1er juin 1894, une étendue considérable. Au-dessous d’elle s’étendait une région d’un vert bleuâtre, parsemée de plaques d’un rouge sombre, et plus bas se voyait une vaste région uniformément couleur d’ocre. Le premier changement perceptible se manifesta dans cette calotte qui diminua d’étendue, comme d’autres astronomes l’avaient périodiquement remarqué après Huygens. Or nous savons déjà qu’il y a sur Mars des saisons analogues aux nôtres, et c’est précisément au renouvellement des saisons de l’année martiale que ces changements ont lieu. Ainsi au printemps, on peut voir la région brillante du pôle s’étendre jusqu’au 65" degré de latitude. Lorsque l’été commence, elle se met à diminuer, et dès les premiers jours de l’automne, il n’en reste plus que quelques fragments. En 1894, ceux-ci ont, pour la première fois depuis qu’on les connaît, disparu complètement On est en droit de penser que cette disparition correspond à une fusion complète des glaces du pôle. La calotte polaire serait ainsi formée par des champs de glace qui fondent graduellement au fur et à mesure que la chaleur augmente, celle-ci étant rarement assez intense pour les faire disparaître en entier.
Autres changements observés très nettement à Flagstaff et que Schiaparelli avait du reste signalés auparavant : la teinte des zones sombres et claires varie avec la succession des saisons. Chose plus curieuse encore : l’observation directe a révélé la présence d’une atmosphère dont l’épaisseur a pu être mesurée, quoique bien involontairement. Dans le but d’établir exactement la différence entre le diamètre de l’équateur et celui du pôle, on avait, du commencement de juillet à la fin de novembre, poursuivi une série d’observations micrométriques dont les dernières, du 20 septembre au 22 novembre, étaient particulièrement significatives. Lorsque les chiffres ainsi obtenus furent repris chronologiquement par Lowell, pour être débarrassé de toute source d’erreur, et ramenés à l’unité de distance, il devint pour.lui évident que quelque chose avait dû augmenter le diamètre équatorial sans affecter celui du pôle, Les chiffres indiquant hi dimension du diamètre. équatorial allaient en augmentant, dans la colonne où ils étaient successivement inscrits, .tandis que ceux qui se rapportaient au diamètre polaire restaient. à peu. près les mêmes. Quelque chose devait par conséquent avoir agi à l’équateur, pour en augmenter le diamètre, qui n’avait pas influé dans le même temps sur les mesures du diamètre polaire. Ce quelque chose mesuré comme s’il faisait partie intégrante de la planète n’était rien autre qu’un crépuscule. On avait donc mesuré comme appartenant au corps de Mars plusieurs kilomètres dans l’air qui l’environne. Ainsi se trouve démontrée la présence d’une atmosphère à sa surface. Si elle nous est révélée difficilement, c’est parce que les nuages y font presque toujours défaut.
De plus, cette atmosphère doit , être moins dense que la nôtre, car la force d’attraction exercée par la masse de Mars étant moindre que celle qui agit à. .la surface de la Terre,.moindre aussi doit être la compression de l’air ; celui-ci, se comportant comme tous les gaz, s’y dilate plus à l’aise et y acquiert, par suite de .son expansibilité, un degré de raréfaction plus élevé. On.a calculé qu’il doit être moitié moins dense que celui qu’on respirerait sur le sommet de l’Himalaya. Quant à sa constitution,Lowell, se fondant sur la.théorie moléculaire des gaz, a reconnu qu’elle ne doit guère différer de celle de l’air que nous respirons, car cette planète est incapable de vaincre la vélocité de ceux que ne peut captiver la terre.
Une conséquence de la : raréfaction de l’air à la surface de Mars doit être que le temps y est toujours beau ; la pluie et même la neige y sont inconnues, et l’humidité atmosphérique ne peut s’y condenser que sous forme de rosée. Du reste, l’air déplacé y est si léger que les vents sont à peine sensibles. Une autre conséquence de cette raréfaction de l’air est que le point d’ébullition de l’eau y est inférieur à 100 degrés centigrades. Étant donné que la densité de cette atmosphère n’est que 14/100 de la nôtre, l’eau doit y bouillir à 53°. La quantité de vapeur d’eau tenue en suspens dans l’atmosphère martiale doit donc être plus considérable, puisqu’à la température de 53° elle en serait saturée.
La présence de la vapeur d’eau dans l’air de Mars nous conduit à admettre implicitement l’existence des nuages, quelque rares qu’ils soient ; et l’expérience confirme cette induction. En effet, vers la fin d’août 1894, Lowell a pu observer, de concert avec le professeur Pickering, de petits amas floconneux à environ 15° du pôle ; et cela précisément à l’endroit qui était auparavant recouvert par la calotte polaire ; cela semble indiquer qu’ils peuvent bien avoir été produits par la vapeur d’eau résultant de la fusion des glaces.
Il a aussi constaté des irrégularités dans la ligne terminale du disque ; or ces irrégularités ne peuvent s’expliquer par la présence des montagnes, car celles-ci étant fixées au sol, devraient refléter la lumière d’un côté et l’intercepter de l’autre d’une manière permanente et produire ainsi un nombre égal de l’expression et de projections. Au contraire, le nombre des dépressions a été trouvé plus grand d’environ 1/3 et varie continuellement, comme il convient à des nuages, selon le moment du jour, se montrant tantôt ici ; tantôt là, et se formant à différentes hauteurs. De plus, il leur arrive de disparaître tout d’un coup sans diminution préalable, comme il a été observé à Flagstaff les 25 et 26 novembre. Or si.ces phénomènes étaient dus à la présence des montagnes, ils devraient décroître progressivement.
De l’existence des nuages on pourrait naturellement conclure à celle de l’eau, mais Lowell a voulu fournir une nouvelle preuve expérimentale ; il a poussé plus loin ses observations, et c’est sur les changements éprouvés par la calotte polaire qu’il a fondé son raisonnement le plus concluant.
Lorsque la calotte polaire australe fut mesurée, à Flagstaff, le 3 juin 1894, époque qui répond au 1er mai de l’année martiale, elle s’étendait sur environ 55° de latitude et était en train de fondre ; des centaines le kilomètres carrés disparaissaient tous les jours. Or partout où s’opérait la perte de surface blanche et brillante apparaissait une bande sombre dont la largeur variait avec la longitude. Cette bande était très distincte, à tel point que Lowell s’étonne de voir qu’elle n’ait été signalée [2] ni expliquée plutôt, quoique une bordure analogue eût été remarquée en 1830 au pôle nord de Mars. De plus, aux endroits où cette bande sombre (vraisemblablement produite par la fusion du bord des glaciers polaires) était large, la surface verdâtre placée au-dessous d’elle dans la même longitude était plus considérable. Au 33e et au 270e degré de longitude où la bande était le plus large, on put même voir une longue ligne noire la rattachant à la surface verdâtre placée au-dessous d’elle. Cette bande ou bordure une fois visible, ne restait pas à la même place ; elle suivait le retrait de la calotte polaire et diminuait de largeur avec la dimension de la calotte. Au mois d’août suivant, ce n’était plus qu’une ligne fine à peine perceptible autour des portions de la calotte de glace qui subsistaient encore. Enfin, le 13 octobre, lorsque la neige eut disparu entièrement, l’endroit qu’elle avait finalement occupé avec sa bordure devint méconnaissable et prit la couleur jaune.
Ceci une fois établi par l’observation télescopique, que peut bien être cette bordure foncée, si ce n’est le l’eau ? Elle en a la couleur, elle suit pas à pas le retrait, c’est-à-dire la fusion, de la calotte, et elle disparaît avec elle. Il y a plus encore : le polariscope d’Arago mis à contribution a révélé la polarisation de la lumière venant de la bande plus large le la longitude 330° Or on sait que l’eau jouit de la propriété de polariser la lumière qu’elle reflète. Il y a donc tout lieu de croire que l’eau existe à la surface de Mars et il est facile d’en expliquer la production par la fusion progressive des glaces polaires.
Cette existence de la glace au pôle de Mars se trouve confirmée par l’observation faite le 8 juin d’un bien curieux phénomène. Il s’agit de ces jets de lumière soudains et éphémères partant de l’endroit où la calotte polaire a perdu son éclatante blancheur, et que l’on avait cru, bien à tort, pouvoir attribuer à des signaux faits par les habitants présumés de Mars. Ils s’expliquent aisément par la réverbération vers l’est de fragments de glaciers restés attachés au versant des montagnes, se produisant au moment où la rotation de la planète donne à ces versants l’angle convenable. Tels ces faisceaux lumineux qui nous éblouissent quelquefois lorsque, passant en bateau près du rivage, les carreaux de vitre de quelque maison renvoient dans nos yeux les rayons du soleil couchant.
Quant au rayonnement qui pourrait produire un froid assez intense pour empêcher la fusion des glaces, il peut être atténué suffisamment par les nuages, et la température peut alors s’élever au degré voulu.
Par les raisonnements qui précèdent, nous nous trouvons amenés à admettre que les deux éléments indispensables à la vie, l’air et l’eau, ne font pas défaut sur la planète Mars.
Une des parties les plus intéressantes de l’ouvrage ,de Lowell, car elle s’adresse principalement aux yeux, est celle qui traite de l’aréographie. Elle contient douze planches représentant le disque de Mars photographié de 30° en 30°, de l’est à l’ouest, et donnant, au total, une idée de la planète sous ses divers aspects. Ce qui frappe le plus dans ces photographies, c’est le réseau de traces régulières qui prennent naissance au bord des régions plus sombres, d’une couleur verdâtre qui succèdent à la fonte des glaces. Ces traces, en s’entre-croisant, forment à leur point de jonction comme de petites taches arrondies d’inégale grandeur, puis se prolongent pour aboutir à d’autres points d’intersection, et ainsi de suite ; en sorte que leur réseau s’étend sur toute la surface rougeâtre. Elles paraissent courbes dans l’image parce que, sur une sphère, le plus court chemin d’un point à un autre, même tracé au cordeau, doit nécessairement être curviligne.
Cette surface rougeâtre, ordinairement désignée sous le nom de mer, ne saurait supporter un réseau de lignes régulières si elle était liquide, et ne paraîtrait pas de la couleur dont on la voit au télescope. Il peut bien y avoir, à l’endroit où les glaces polaires sont fondues, de vastes amas d’eau (par exemple dans la partie centrale de la calotte que Lowell a par analogie désignée sous le nom de mer libre du pôle), mais le nom de lacs leur conviendrait mieux, car leur eau se renouvelle tous les ans et ne saurait contenir de sel. A ces lacs viennent s’amorcer les faisceaux de lignes qui forment le réseau des mailles triangulaires dont nous avons parlé. Il y a tout lieu de croire que ces lignes correspondent au parcours des canaux qui doivent être d’origine artificielle et creusés très probablement dans le but de porter au loin la fertilité dans des endroits privés d’humidité. Quelques-uns de ces canaux ont jusqu’à 4000 et 4800 kilomètres de longueur, mais la moyenne est de 2400 kilomètres environ.
Ces lignes ont été aperçues pour la première fois par Schiaparelli, en 1877, et c’est lui qui leur a donné le nom de canaux. Quelque temps après, il vit qu’un de ces canaux était géminé, de manière à former deux lignes parallèles, et, à l’époque de l’opposition suivante, il en découvrit une vingtaine d’autres. Cette découverte faite par lui seul ne trouva parmi les astronomes contemporains que des incrédules ; mais, en 1866, Pierroton aperçut les canaux à l’aide d’un télescope de 29 pouces qui venait d’être installé à Nice et confirma la découverte de Schiaparelli, même relativement aux canaux doubles. La difficulté de distinguer ces lignes ne tient pas à la petite dimension des télescopes, mais bien plutôt à l’impureté de notre atmosphère. Les observatoires étant faits pour voir et non pour être vus, il vaudrait mieux les transporter dans des régions élevées et douées d’un air très pur. C’est ce qu’ont bien compris plusieurs astronomes qui se sont établis sur de hautes montagnes comme Janssen au Mont-Blanc et Lowell à Flagstaff, où il a pu relever 183 canaux observés maintes fois ensuite et dont il a dressé une liste qui forme un supplément considérable à celles qui existaient avant lui. On peut se faire une idée du soin apporté dans les travaux de Lowell par le nombre de ses observations accompagnées de planches qui s’élèvent à 3240 pour ces 183 canaux La carte générale qu’il a dressée selon la projection de Mercator et que nous reproduisons plus loin représente la portion de Mars qui s’étend du 70e degré de latitude sud au 40e de latitude nord. Les régions circumpolaires sont relevées dans une carte spéciale du pôle Sud. Quant au pôle Nord et aux régions qui l’environnent, ils n’étaient pas visibles lors de la dernière opposition à cause de l’inclinaison du pôle Nord vers nous.
Il suffit de jeter un regard sur la carte générale de la planète pour se rendre compte de la régularité des lignes qui constituent le réseau dont nous avons parlé plus haut. n parait impossible de les attribuer à des canalisations naturelles, car les causes physiques ne produisent jamais de résultats si uniformément réguliers. Ce système de lignes si droites, si symétriques, leur irradiation de points spéciaux, la manière dont elles mettent en communication certains points avec d’autres, vers lesquels convergent à leur tour plusieurs autres lignes, tout cela ne saurait provenir, ce semble, que d’une œuvre artificielle. Si elles étaient produites par des fentes rayonnant de centres d’explosions volcaniques, leur largeur ne serait pas uniforme ; elles seraient nécessairement plus larges à une extrémité qu’à l’autre. Du reste, elles n’ont aucune ressemblance avec l’aspect des fissures volcaniques visibles sur la Lune. Ces lignes ne peuvent pas davantage être des rivières, car celles-ci ont une largeur différente à leur source et à leur embouchure. Ce ne sont pas des fentes produites par un craquement dans la glace, car il ne saurait y avoir de glace à l’endroit où on les observe. Enfin des météorites tombant à la surface de Mars ne pourraient y produire des sillons allant invariablement d’un centre d’irradiation à un autre, et aucune théorie n’a pu être établie pour expliquer leur origine naturelle ; reste donc l’hypothèse que ce sont des canaux artificiels.
Deux faits sont incontestables, puisqu’ils peuvent être vérifiés au télescope, c’est que les lignes auxquelles on a donné le nom de canaux sont visibles à certaines saisons, et qu’à certaines autres (toujours les mêmes) elles s’évanouissent ; ce qui n’est pas la conséquence de l’augmentation de distance, car c’est lorsque Mars est plus rapprochée de nous que certains canaux ne sont pas visibles, tandis qu’ils le deviennent lorsque la planète s’est éloignée. On ne peut davantage expliquer cette disparition des canaux par l’hypothèse de nuages ’ou de brouillards qui les cacheraient à notre vue car, au même moment, la ligne terminale des régions sombres est aussi nettement tranchée que lorsque les canaux sont parfaitement visibles. Les canaux deviennent donc visibles, augmentent ou diminuent, pour des raisons qui leur sont propres. Leur apparition peut être temporaire, leur place ne varie pas. De plus, une observation patiente montre que, d’invisibles qu’ils étaient, ils deviennent graduellement perceptibles. On les voit en quelque sorte croître et décroître à des saisons déterminées. Ce visible développement mit la fonte des glaces polaires, et il est à remarquer qu’aucun canal ne devient visible tant. que la fonte des glaces n’a pas progressé sensiblement. Ceux qui sont le plus au sud apparaissent les premiers ; ils deviennent dans la suite de plus en plus distincts et prennent avec le temps une couleur plus foncée.
L’explication qui se présente le plus naturellement a l’esprit est qu’il doit y avoir écoulement d’eau du sud au nord [3] ; mais nous ne saurions nous en contenter, car il faut attendre quelques mois pour que les canaux deviennent visibles à l’équateur ; or un tel intervalle de temps n’est pas nécessaire pour que l’eau y arrive, tandis qu’il est tout naturel que la végétation ne se montre que quelque temps après l’imbibition du sol par l’eau que les canaux y ont amenée. Donc, si nous ,supposons que les lignes du réseau triangulaire que nous apercevons sont, non les canaux eux-mêmes (car il faudrait qu’ils eussent au moins, un degré de large pour être perceptibles), mais la végétation qui se développe sur leurs rives, nous n’aurons plus de difficulté à expliquer le phénomène de leur apparition progressive et de leur changement d’aspect. Nous ne pouvons sans doute arriver à la certitude, mais cette supposition est celle qui explique le mieux ce qui apparat ; à nos yeux.
Le changement d’aspect des canaux consiste, non en ce qu’ils paraissent plus larges, mais en ce qu’ils deviennent de plus en plus foncés et par conséquent distincts, Quant à leur couleur, elle devrait être vert bleuâtre ; mais, sur l’image télescopique, les lignes qui les représentent sont tellement fines qu’on ne peut juger de leur couleur. S’il y avait à la surface de ’Mars des montagnes élevées, elles s’opposeraient à la rectitude des canaux ; mais l’observation nous apprend que cette planète est relativement unie. Ces canaux sont visibles aussi bien dans les régions rougeâtres que dans celles qui sont verdâtres, parce qu’ils y développent ou y augmentent la végétation par l’humidité qu’ils apportent. Ce sont donc des canaux d’irrigation qui, à leur point de jonction, donnent naissance à de véritables oasis.
Tout ce qui précède nous conduit à penser que l’eau étant devenue rare sur la planète Mars, le problème le plus important pour ses habitants, s’il y en a, doit être de s’en procurer. Ce qui augmente la probabilité d’une cause intelligente pour ces canaux, c’est que Lowell a pu très distinctement, grâce à la limpidité de l’atmosphère, en apercevoir de doubles c’est-à-dire formant deux lignes parallèles tout le long de leur parcours, comme feraient les deux lignes d’une voie ferrée ; aucun dessinateur ne pourrait les tracer plus parfaitement parallèles. Leur écartement varie dé 4,25 à 6 degrés et chaque canal paraît avoir un degré de large (largeur qui doit s’entendre de la végétation qu’il développe sur son parcours).
Chacun de ces canaux doubles diffère de son voisin non seulement par la distance qui sépare les deux lignes, mais par l’époque à laquelle la gémination apparaît. Elle se produit au fur et à mesure ,que la végétation doit, selon toute vraisemblance, se développer ; Il s’ensuit donc que ce que l’on avait coutume de désigner, par analogie avec nos cartes de géographie, sous le nom de mers, lacs et canaux n’est, à proprement parler, rien de tout cela. Les vastes espaces rougeâtres que l’on prenait pour des mers sont de vastes plaines arides ou désertes ; les taches systématiques que l’on considérait comme des lacs doivent être les aires de verdure, de véritables oasis qui se forment, comme le montre leur changement de couleur et de dimension, au point de rencontre de plusieurs canaux.
Voilà donc ce que nous révèlent les patientes et laborieuses observations des astronomes. Ces phénomènes si étranges comment les expliquer ?
L’existence d’une atmosphère à peu près semblable à la nôtre, la présence de l’air et de l’eau sur la planète Mars, la rendent habitable pour des êtres animés, Mais l’eau parait y être en quantité très limitée : il n’y pleut pas, il y a certainement disette de cet élément indispensable à toute végétation. Il est donc naturel de penser que s’il s’y trouve, dos êtres vivants doués d’intelligence, ils doivent avoir recours à l’irrigation, car c’est pour eux le seul moyen de subvenir aux besoins de la vie. Nous ne concevons pas qu’il puisse en être autrement. Or il y a précisément un réseau de traces visibles analogues il ce que serait un vaste système d’irrigation bien compris, faisant converger plusieurs canaux ,sur différents points qui correspondent aux endroits où nous devions nous attendre à’ trouver des terres cultivées et des aires de verdure. Celles-ci se comportent, autant que nous pouvons en juger pas le progrès de leur formation et leur changement de teinte, comme le feraient des oasis se couvrant de moissons au milieu du désert. Or tout cela s’explique difficilement par pure coïncidence, il parait au contraire plus probable que c’est là l’œuvre d’êtres intelligents obligés de lutter pour la vie avec toute l’habileté et l’énergie possibles.
La construction d’un système si vaste d’irrigation dépasserait sans doute les limites des forces humaines, mais cette tâche herculéenne cesse de paraître impraticable si nous considérons les conséquences qu’entraîne la petitesse de Mars par rapport à la terre. En premier lieu, la force d’attraction d’un corps dépendant de sa masse et de son volume, on trouve facilement, en appliquant .les formules les plus élémentaires, que la pesanteur des corps à la surface de Mars est environ 3 fois moindre que sur la terre, c’est-à-dire que les corps y sont 3 fois plus légers ; d’où il résulte que la même dépense de force musculaire peut produire 3 fois plus de travail. De plus, les habitants de Mars peuvent être 3 fois plus grands que nous sans qu’il leur soit plus difficile de se tenir debout, puisque leurs jambes ont 3 fois moins à supporter, mais cela suppose qu’ils sont aussi 3 fois plus gros pour être bien proportionnés. La faculté de se tenir debout dépendant des dimensions de la section transversale des muscles du genou, celle-ci, qui a seulement deux dimensions (largeur et épaisseur) devrait être 9 fois plus grande, avec le reste du corps en harmonie ; dans ce cas, les muscles devant être 3 fois plus longs seraient 27 fois plus forts que les nôtres et pourraient faire 27 fois plus de travail sans se fatiguer davantage ; mais comme leur action aurait à s’exercer sur quelque chose qui pèse 3 fois moins (que sur la terre), leur force serait augmentée d’autant, et équivaudrait à 81 fois celle dont nous disposons. Il faut seulement remarquer que le chiffre de 1/3 que nous avons pris comme base de nos calculs n’est pas tout à fait exact et n’exprime qu’approximativement le poids relatif des mêmes corps sur les deux planètes. En réalité, la pesanteur sur Mars est un peu plus du tiers de celle des corps terrestres et, en faisant les corrections nécessaires dans les calculs précédents, on trouve que la force des habitants de Mars n’est que 50 fois plus considérable que la nôtre, ce qui suffit cependant à nous faire comprendre combien, physiquement, ils doivent différer de nous.
Quant à leur valeur intellectuelle, si nous les supposons doués des mêmes facultés que nous, ils doivent être plus avancés en connaissances de toute espèce, car leur race est beaucoup plus ancienne que la nôtre, et ils ont eu plus de temps pour s’instruire et se perfectionner. Si la vie existe sur Mars, elle a dû s’y montrer plus tôt que sur la terre et par conséquent évoluer pendant plus longtemps. En effet, Mars, étant plus petite, a dû. se refroidir plus vile, puisqu’elle a relativement plus d’intérieur pour sa surface externe et que le refroidissement se propage du dehors en dedans. La vie y est donc devenue possible bien avant qu’elle ne le fût sur la terre. Dans tous les cas, le degré d’évolution des êtres animés et inanimés dépend du temps et de l’espace. Or ceux-ci ne sont pas de pures formes de notre esprit, mais des attributs essentiels de l’Univers, de telle sorte que le temps employé pour chaque évolution affecte cette évolution elle-même, comme fait la dimension du corps qui la subit. Les changements produits sur une petite et sur une grande planète au point de vue physique, chimique et organique ne sauraient donc être les mêmes. Ils diffèrent à tel point que si une planète était réduite à des dimensions trop exiguës, ce que nous appelons la vie ne pourrait jamais s’y manifester.
Dans la suite des temps ; une planète se forme et subit peu à peu divers changements qui la rendent le plus en plus apte à supporter des êtres animés. Mais, à un moment donné, ces changements s’arrêtent et par leur cessation rendent toute vie impossible.
Le degré de changement et par conséquent d’évolution dépend de l’âge de la planète. Or Mars est plus vieille que la Terre : ses continents sont affaissés ; ses océans desséchés, ainsi que nous le révèle l’observation télescopique ; Mars est sur son déclin, elle est entrée dans la période pacifique de son existence, à la différence de Jupiter, qui est relativement jeune et qui a également reçu un nom peu en harmonie avec ses qualités.
La vie sur la planète Mars étant plus vieille, le progrès doit y être beaucoup plus avancé. Si, en réalité, les canaux dont nous avons parlé sont l’œuvre d’êtres animés, ceux-ci doivent être actuellement doués d’une intelligence plus affinée que la nôtre et il y a peut-être bien longtemps que nos chemins de fer, nos télégraphes, nos téléphones, nos systèmes économiques et politiques sont dépassés ; mais plus avancés aussi doivent être les habitants de Mars vers la fin de leur monde.
Pour avoir pu établir un système d’irrigation qui embrasse toute la planète ; il leur a fallu un état social où les partis politiques ne s’entre-déchirent plus et où les différends internationaux se règlent autrement que par le droit du plus fort. Depuis combien de temps la guerre a-t-elle cessé, chez nos voisins, d’être l’ultima ratio ? C’est ce que nous ne pouuvons établir même par conjecture ; mais il est très possible que leur civilisation, beaucoup plus vieille, soit aussi infiniment plus parfaite que la nôtre, qui est encore dans son enfance ; et s’ils pouvaient savoir ce qui se passe sur notre globe, où montagnes, rivières, canaux servent à diviser les peuples et à les rendre ennemis acharnés, ’nous leur parattrions certainement bien dignes de pitié.
L’homme, qui s’intitule modestement le roi de la création et s’imagine si aisément que tout, dans l’Univers si vaste, si profond, a été fait pour lui, n’est pas même sur le globe qu’il habite un être nécessairement supérieur. Il est de la nature d’un accident qui aurait très bien pu ne pas se produire. Survivant d’un organisme physique qui est loin d’être le plus parfait, car il n’est pas même le plus parfait dans l’ordre des mammifères, il s’est fait ce qu’il est par son esprit ; mais, autant que nous pouvons en juger, quelque lézard ou batracien aurait pu aussi bien entrer subitement à sa place et être maintenant la créature dominante sur la terre. Sous certaines conditions physiques, cela aurait pu arriver. Il est permis de penser que, dans le milieu tout différent où vivent les organismes qui existaient sur Mars avant l’apparition de l’homme sur la terre, ils ont pu évoluer de façon à laisser celui-ci bien loin derrière eux.
Les diverses études relatives à Mars ont au moins cette utilité de nous montrer la possibilité de créatures supérieures à nous. Tant s’en faut que l’homme soit ; actuellement, le dernier mot de la création, qu’il s’est perfectionné depuis un passé immémorial et se perfectionnera encore dans un avenir incalculable.
Pour conclure avec Lowell, l’astronomie enseigne à l’homme qu’il n’est, dans l’évolution de l’Univers, qu’un détail infime et qu’il lui faudra fatalement partager avec d’autres la royauté qu’il s’est complaisamment attribuée.
Percival Lowell, qui nous donne là une si utile leçon, la met lui-même en pratique en se préparant à recommencer une seconde et une troisième fois les observations et les calculs dont il a pourtant exposé les résultats d’une manière si intéressante dans son dernier ouvrage. Avant d’aller planter sa tente en Algérie, il s’est rendu à Mexico en décembre dernier pour.reprendre ses observations favorites dans des conditions différentes. Désormais il emploiera un télescope de 24 pouces de diamètre fabriqué à Paris, sous sa direction, dans les célèbres ateliers d’Alvan Clarke, les meilleurs du monde pour ce genre de travail. Cet instrument perfectionné lui permettra sans doute, grâce à la . pureté exceptionnelle de l’atmosphère sur ce plateau situé à 700 pieds de haut, de faire avancer la solution du problème auquel il a consacré tant d’argent, tant de veilles et d’infatigables labeurs.
Nous lui souhaitons sincèrement une entière réussite.
ARTHUR ARRIVET.