Les habitants de Mars

La Nature N°655 - 19 Décembre 1885
Dimanche 11 mars 2012

La nouvelle extraordinaire, d’une correspondance posssible avec les Martiens et dont les journaux se sont occupés depuis quelques mois nous est arrivée d’Italie, en passant par la Belgique. Il y aurait dans la vallée de Teramo un astronome amateur, du nom de Gemignani, qui aurait construit un télescope de 18 mètres de longueur, supportant des grossissements de 6500 fois. Observant Mars avec assiduité depuis deux ans il a fini par distinguer de plus en plus nettement d’énormes foyers de lumière blanche, semblables à des foyers électriques, qui dardent leurs rayons à travers la lumière rouge de Mars, et qui sont disposés géométriquement au nombre de trois, toujours aux mêmes heures et offrant les dispositions variées que nous indiquons, avec des intermittences d’éclat. On arrivera, dit-on, à lire ces signaux comme on est arrivé à lire les hiéroglyphes ; du reste, un M. Nizardi s’en est déjà chargé. M, Giacopino, disciple émérite du P. Secchi, se déclare convaincu de la sincérité de la découverte. On le voit, rien n’y manque, pas même l’instrument qui a servi, ni les noms de ceux qui s’en occupent. Malheureusement, il y manque la nouveauté. Il y a longtemps, en effet, qu’il a été dit que lorsqu’on voudrait correspondre avec les habitants d’une autre planète, il faudrait employer des signes géométriques. En outre, si les habitants de Mars voulaient se faire reconnaître de nous, ce ne serait pas des signaux lumineux qu’ils nous feraient, ce serait des signaux noirs. Ils sauraient bien, en effet, que des lumières, si blanches soient-elles, échapperaient à la vision au milieu de la lumière solaire réfléchie. Les prétendus canaux d’il y a deux ans, s’ils disparaissent, pour reparaître ensuite, seraient beaucoup plus concluants. En 1832, un industriel-astronome a déjà trouvé moyen de mystifier ses contemporains en leur vendant des portraits d’habitants de la Lune, obtenus en éclairant avec une bougie quelconque l’image de notre satellite qui se trouvait dans sa lunette, Il ne faudrait pas, dit le journal le Ciel auquel nous emmpruntons ces informations, se laisser berner deux fois dans le même siècle.

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