On reconnaît qu’un corps est plus dur qu’un autre corps, quand il peut rayer ce dernier. Un morceau de verre raye le marbre, un morceau de diamant raye le verre : le verre est plus dur que le marbre, le diamant est plus dur que le verre. Une lame d’acier, de couteau ou de canif, raye le cuivre : l’acier est donc plus dur que le cuivre ; et il n’est pas impossible de percer un sou avec une aiguille beaucoup plus dure que le sou. Le problème parait d’abord insoluble, parce que si l’on essaye d’enfoncer une aiguille dans un sou, comme on enfoncerait un clou dans une planche, on ne manque pas, à chaque tentative, de casser l’aiguille, car l’acier, quoique très dur, est très cassant. M ais si, par un artifice, on arrive à maintenir l’aiguille droite et rigide au-dessus du sou, on peut l’enfoncer dans le cuivre avec un marteau. Il suffit, pour réussir, d’introduire l’aiguille dans un bouchon qui ait même hauteur que cette aiguille : l’aiguille, maintenue dans une véritable gaine de liège, ne pourra fléchir dans aucun sens, elle pourra être frappée violemment suivant son axe sans être brisée.
Dans ces conditions, placez l’aiguille avec son bouchon, au-dessus d’un sou mis sur une tête de boulon, ou même sur une table de bois blanc d’atelier que vous ne craignez pas de détériorer ; prenez un bon marteau de serrurier, un peu lourd, et frappez énergiquement sur le bouchon comme le montre la figure. L’aiguille, si le coup est porté bien droit et bien fort, traversera le sou, et il ne sera plus possible de l’en faire sortir. L’expérience peut se faire aussi bien avec toute autre pièce de monnaie.
Nous devons ajouter que l’on ne réussit pas du premier coup ; il faut recommencer l’essai à plusieurs reprises, mais le fait est réel, et nous avons entre les mains un sou ainsi traversé par une mince aiguille.