Les acanthes forment une petite famille de plantes voisine des verbénacées. Elles appartiennent à l’Europe méridionale. La Grèce, la Dalmatie, l’Italie, le Portugal en possèdent plusieurs espèces. Ce sont de grandes herbes vivaces, à feuilles presque toutes radicales, dont les découpures latérales sont souvent terminées en épines, de là le nom du genre (du grec akanthos, épine).
Les fleurs, qui s’épanouissent en juillet et août, sont disposées en un long épi terminal ; le calice présente quatre lobes dont deux plus grands, la corole forme un tube fendu étalé en une seule lèvre à trois découpures. Il y a quatre étamines, dont deux plus petites. Cette didynamie les rapproche des labiées.
Les deux espèces les plus répandues du genre sont l’Acanthe molle (Acanthus mollis), naturalisée en France dans la région méditerranéenne ; elle y est toutefois très rare. Elle affectionne les endroits arides et présente de grandes feuilles glabres atteignant jusqu’à 60 centimètres de longueur. Ses racines sont profondes et traçantes ; sa tige robuste, atteignant un mètre de hauteur, est ferme, peu feuillée. Ses fleurs, d’un blanc rosé, dont la corole est large de 3 à 4 centimètres, sont disposées en un long épi.
L’Acanthe épineuse (Acanthus spinosus) possède des feuilles moins larges que celles de l’espèce précédente, mais plus épineuses et plus profondément découpées. Sa tige est haute de plus d’un mètre et ses fleurs lilas forment des épis moins allongés.
Ces deux plantes, dont il existe quelques variétés que nous passerons sous silence, sont très employées dans les jardins paysagers à cause de leur ample et élégant feuillage qui forme des touffes d’une beauté remarquable. Pendant l’hiver, sous le climat de Paris, il faut les garantir contre les fortes gelées au moyen de feuilles sèches, qu’on enlève dès que le temps le permet. L’acanthe ornementale
Ces plantes se propagent aisément par semis et par boutures de racines. La feuille d’acanthe a été pendant longtemps l’élément le plus employé de la flore ornementale ; elle n’est caractéristique d’aucun style particulier car on la retrouve partout.
Si l’on en croit la légende, c’est elle qui a donné naissance au chapiteau corinthien. Vitruve dit à ce sujet qu’une jeune fille de Corinthe étant morte au moment de se marier, sa nourrice recueillit plusieurs des objets qui lui avaient appartenu, et les plaça dans une corbeille qu’elle alla déposer sur sa tombe ; elle avait eu soin de recouvrir la corbeille avec une tuile. L’acanthe ornementale
Une racine d’acanthe se trouvait par hasard dans ce lieu ; au printemps, elle poussa des feuilles qui entourèrent la corbeille, mais qui, rencontrant la tulle, furent forcées de se recourber.
Le sculpteur Callimaque, passant près du tombeau fut frappé de l’aspect gracieux qu’il présentait, et trouva le modèle du chapiteau corinthien.
Cet élément ornemental, pris à l’architecture a été utilisé par tous les décorateurs de l’antiquité gréco-romaine. La feuille de l’acanthe molle se retrouve sur tous les vases, les coupes, les bijoux de cette époque.
Au moyen âge, cette feuille, ample, à bords festonnés et légèrement recourbés en ourlets, est généralement abandonnée pour celle de l’acanthe épineuse, plus maigre, plus étroite, à découpures plus raides et plus pointues. On peut voir de beaux modèles de cette ornementation dans plusieurs édifices gothiques, et entre autres à Notre-Dame de Paris. L’acanthe ornementale
La Renaissance est signalée par la réapparition de l’acanthe classique et l’abandon général de l’acanthe épineuse.
Sous Louis. XIV, l’acanthe molle devient encore plus large et occupe une plus grande place dans la décoration. Boule l’utilise pour sa marquèterie, Lepautre I’emploie dans ses vases.
Un peu plus tard, sa largeur diminue d’une façon considérable ; les découpures deviennent très aiguës, les formes naturelles, de plus en plus masquées. L’acanthe se rapproche de la feuille de cèleri, comme au moyen âge elle ressemblait à la feuille de chardon. Cet allongement et ce rétrécissement de l’acanthe sont, avec sa déformation, caractéristiques du style Louis XV.
Elle peut ainsi se mélanger plus aisément aux rocailles, aux coquillages en faveur à l’époque.
Sous Louis XVI, l’acanthe reprend sa forme naturelle, mais on lui donne le rôle ornemental plus effacé qu’elle conserve encore aujourd’hui. La persistance, à travers de longs siècles, de ce motif décoratif est des plus remarquables. La mode et le goût mettent moins de temps d’ordinaire à renverser leurs idoles et à les remplacer par d’autres.