Auteur : Bernie Krause
Titre : Le grand orchestre des animaux. Célébrer la symphonie de la nature
Traduction (Anglais) : Thierry Piélat
Éditeur : Flammarion
Collection : Champs sciences
Paru le 24/10/2018
290 pages - 109 x 177 mm Broché
ISBN : 9782081445383
Prix : 10,00€
Présentation de l’éditeur :
C’est par hasard que Bernie Krause, musicien dans la Californie des années 1960-1970 – les Doors, la musique de Rosemary’s Baby et d’Apocalypse Now –, découvre la richesse des sons de la nature. Depuis, il consacre sa vie à enregistrer les animaux du monde entier. Revenant sur son parcours et ses travaux, il offre une merveilleuse plongée dans l’univers sonore du monde sauvage. Et nous invite à célébrer, malgré le vacarme des activités humaines, la somptueuse symphonie de la nature.
Notre avis : Pour compléter cette quatrième de couverture, signalons que l’auteur, non content de s’intéresser aux sons de la nature en a fait le cœur de son activité professionnelle. Docteur en bioacoustique de renommée mondiale, la fondation Cartier lui a consacré une exposition présentée à Paris durant le deuxième semestre 2016.
Ce volume de la collection Champs Sciences est la réédition au format poche d’un ouvrage paru en France en 2013… ce qui n’enlève rien à son grand intérêt. [1] Il est très agréable à lire, mêlant souvenirs biographiques et connaissances scientifiques. Mais comment faire autrement quand on veut expliquer le contexte de ces milliers d’heures passées dans la nature plus ou moins sauvage (du fin fond de la forêt tropicale africaine à la proximité de bases militaires en passant par les parcs naturels où les visiteurs sont nombreux et rarement attentifs à la préservation de ce qui les entoure. Quand ce n’est carrément pour braconner.) ? Vous y trouverez un peu de technique (quelques diagrammes) et beaucoup de passion. Son écriture, son récit de ses heures passées à tendre oreilles et microphones ne peuvent laisser le lecteur indifférent.
En bref : Un livre passionnant qu’il est difficile, voire impossible, de résumer pour bien rendre compte de son contenu dans le cadre d’une chronique. Je ne peux donc que vous encourager à le lire.
Et pour vous y aider, en voici quelques passages :
Il semble que de nos jours on se sente obligé de faire du bruit partout où l’on va, pour le plaisir de quelques-uns et au grand dam de beaucoup d’autres, qui doivent supporter l’envahissement de leur espace par cette pollution sonore. Nous n’allons pas sur un lac sans nos Jet-Ski et nos canots à moteur ; en bord de mer, on n’oublie pas son ghetto-blaster ; dans les bois, ce sont motos, autos tout-terrain et tronçonneuses ; et dans le désert, on roule en Buggy et dans les parcs nationaux retentissent motos, autoneiges et, maintenant, armes à feu. Il y a le bruit des machines, jouets dont on ne peut apparemment pas se passer. Il y a les bruits de guerre. Celui la musique des autres, celui des jets et autres avions privés qui volent au-dessus de nos têtes. Où que nous essayions de nous isoler du vacarme ambiant, le bruit s’impose. |
Même dans nos activités de loisirs, la puissance de l’univers matériel qui symbolise le rêve américain de prospérité et de liberté est peut-être au cœur même de notre problème de bruit. En tant que nation, nous avons toujours accordé une grande importance aux machines qui alimentent notre sentiment de puissance. |
Il y a quelque ironie dans le fait d’écrire un livre sur ce que nos ancêtres connaissaient intuitivement, qui devait être un élément fondamental de la trame de leur vie et n’exigeait, aucune explication. Les premiers hommes entretenaient sans doute une relation intime avec leurs paysages sonores ; ils avaient probablement appris à « lire » la biophonie pour en tirer des informations essentielles. Leur musique devait être une conversion complexe, sur plusieurs niveaux, des sons environnants, ceux de l’ensemble de la vie animale et du monde inanimé. Notre musique reflète toujours les influences de notre milieu social, de notre éducation, de notre culture et des rapports à notre environnement physique. Pourtant, lorsque les compositeurs des trois derniers siècles ont fait valoir que leurs œuvres étaient inspirées par la nature, elles ne reflétaient en réalité que leur version idéalisée de celle-ci. Elle consistait pour l’essentiel en voix isolées, susceptibles d’être intégrées à leurs compositions de manière prédéterminée, mais ce n’étaient que de faibles échos de la nature. Comment notre musique a-t-elle pu se couper autant du monde naturel ? Y a-t-il aujourd’hui quelqu’un capable de faire une musique traduisant nos liens ancestraux avec lui ? À quoi notre musique ressemblerait-elle si nous pouvions exploiter toute l’expérience, toutes les techniques en notre possession et savions nous remettre en prise avec le règne animal, ne serait-ce que brièvement ? |