Le nom de dague, - de l’italien, daga - est celui d’une arme, de main, à lame ordinairement étroite et aiguë. La dague ne diffère pas sensiblement du poignard moderne ; elle est cependant un peu longue ; et les armuriers réservent de préférence ce nom aux armes de types orientaux et autres qui ne rentrent pas dans les formes régulières du poignard.
Bien qu’elle n’ait parfois qu’un seul tranchant, la, dague se distingue aisément du couteau à armer parce que le milieu de sa lame est toujours, jusqu’à la pointe, la suite directe de l’axe de la poignée.
Comme l’épée, la dague possède une poignée complète avec un pommeau, une fusée et une garde. La forme de ces parties a beaucoup varié au cours des siècles. La garde fut d’abord en croix ; elle se compléta à partir du XVe siècle, par des anneaux latéraux.
Dès la fin du XIIIe siècle les soldats portent la dague à la ceinture. Elle est fixée sur le côté droit, symétriquement avec l’épée qui se porte sur le côté gauche. Arme des gens de pied, elle ne fut adoptée que plus tard par les gentilshommes.
Les dagues les plus anciennes sont effilées et leur pointe se renfle en un bulbe renforcé et évidé appelé percemaille.
La dague à rouelles, commune au XIVe siècle est remarquable par sa poignée formant des espèces de petites roues.
Quant aux dagues à oreilles ou stradiotes, en usage au XVe et au XVIe siècles, leur pommeau rappelle celui des armes moresques, il est épanoui en ailes de papillon.
A la fin du XVe siècle, la dague se porte toujours, aussi bien dans la vie civile, qu’à la guerre. Suspendue à la ceinture, elle fut d’abord tournée la pointe en bas ; appliquée sur le ventre, puis horizontalement sur la hanche droite, et enfin transversalement sur les reins la poignée tournée à gauche.
Certains soldats, comme les lansquenets, ont une dague dont la gaine s’évase par le haut en forme de trousse ; et dans cette trousse sont rangés plusieurs couteaux de formes diverses, A partir du XVIe siècle, la dague devient surtout une arme de main gauche qui accompagne toujours l’épée dans l’escrime. La longueur de sa lame est, en général, le tiers de celle de l’épée.
« La main gauche, dit M. Lacombe, a une forme bien caractéristique. Elle porte d’un côté une garde recourbée jusqu’au pommeau, en forme de coquille. Au talon de la lame, du côté opposé, on remarque une empreinte en creux, destinée à retenir le pouce. On tenait cette arme le pouce en dessus et la garde en dessous, On s’en servait pour parer les coups d’épée de l’adversaire, tandis qu’on l’attaquait avec sa propre épée. Telle était l’escrime du temps. »
Un type très curieux de dague est celui que reproduit notre gravure et dont le modèle est au musée de South kensington. Notre musée d’artillerie des Invalides en possède un spécimen analogue, mais moins beau.
Dès qu’on appuie sur un bouton situé à la partie médiane de l’extrémité du manche, un puissant ressort fonctionne et la lame se sépare en trois branches, dont les deux latérales forment une avant-garde d’une très grande étendue, dans laquelle on cherchait à surprendre l’épée de l’adversaire.
On peut supposer que les bravi de Venise, de Florence Ou de Milan se servaient de cette arme terrible aussi bien que du stylet, mais comme ils étaient presque toujours les seconds, dans les rencontres que les seigneurs auxquels ils appartenaient pouvaient avoir entre eux, l’usage qu’ils en faisaient n’empêcherait pas de croire à l’emploi presque exclusif de ces armes pour les duels.
Selon la tradition, ces dagues seraient d’origine allemande.
Dès le début du XVe siècle, elles servaient dans les séances occultes des francs-juges. On les faisait apparaître au moment où l’on prononçait le serment au nom de la Sainte-Trinité ; les trois branches de l’arme en étaient un symbole. Tous les membres de cette terrible association devaient être pourvus d’une dague semblable.
Le musée de Sigmaringen possède une de ces armes longue de 43 centimètres et d’un travail très soigné. Celle que reproduit notre gravure est très remarquable par la finesse des ciselures de la poignée qui est en bronze doré.
Parmi les types de dagues qui furent employés, il faut citer encore la miséricorde, grande dague à large lame des XIVe et XVe siècles, qui servait pour poignarder l’ennemi vaincu, renversé, demandant quartier et miséricorde.
Les sandedei ou langues de bœuf sont des armes de main du même genre rentrant, comme les miséricordes, dans la catégorie des dagasses ou dagues à large lame.
L’usage des dagues disparut à la fin du XVIIe siècle et l’épée figura seule dans les duels et à l’armée.
G. Angerville