Arcs et arbalètes

La Science Illustrée N° 664, 18 Août 1900
Dimanche 22 février 2009 — Dernier ajout samedi 18 décembre 2010

L’arc est l’arme de trait la plus ancienne et la plus universelle. Déjà connue à l’âge de pierre ; elle est employée encore chez les peuples sauvages.

En Grèce et à Rome, rare était surtout une arme de chasse ; au contraire, chez les peuples orientaux c’était l’arme de guerre par excellence.

L’arc figuré sur les monuments de l’ancien Orient est à deux courbures ; c’est celui-là même que l’on nommait au moyen âge arc turquois.

Les Gaulois se servaient plus volontiers des javelines et de là fronde que de l’arc. On attribue aux Normands l’introduction de cette arme chez les nations occidentales.

Les corps d’archers du moyen âge étaient d’abord porteurs d’un grand arc droit dont le bois était presque toujours d’if, parfois d’érable ou d’aubépine ; la corde était de chanvre ou de boyaux ; elle avait la hauteur d’un homme. Après la première croisade on vit apparaître aussi l’arc turquois formé de cornes de chèvre assemblées ; beaucoup plus petit que l’arc français, il avait une raideur très grande et lançait la flèche avec une force considérable.

Les rois de France du XIIe et XIIIe siècle s’appliquèrent à organiser des corps d’archers, mais cette coutume fut négligée par leurs successeurs, tandis qu’en Angleterre ils gagnaient toujours en puissance. La guerre de Cent ans fut le triomphe de l’arc ; la supériorité des Anglais dans la manœuvre de cette arme était manifeste.

Charles VII réorganisa les archers français ; il créa des archers à cheval ; la discipline imposée, à ces soldats fut sévère, leur adresse devint très grande.

Un bon archer, au XIVe siècle, lançait douze flèches en une minute et manquait rarement son but à 220 mètres. Le fer des flèches était barbelé et très effilé ; le bois était garni de plumes ou de lanières de cuir. Contenues dans une trousse suspendue à la ceinture, les flèches étaient placées sous le pied gauche au moment du combat, le fer tourné en dehors, l’archer n’avait qu’à se baisser pour les prendre. La flèche, à 220 mètres, ne pouvait traverser la cotte de mailles mais elle tuait les chevaux qui n’avaient pas encore d’armure. L’arc était une arme légère très redoutable ; son seul inconvénient était la trop grande sensibilité de sa corde à la pluie et à l’humidité. En France, son usage dans les armées cessa vers 1514. Il persista en Angleterre jusqu’au XVIIe siècle, en 1627 des archers anglais prirent part au combat de l’île de Ré.

Le dernier usage qui ait été fait de l’arc contre nos soldats, sur les champs de bataille européens, paraît avoir eu lieu en 1807, à Friedland ; en poursuivant les Russes une de nos colonnes rencontra des Kalmouks, qui, à sa grande hilarité, lui envoyèrent quelques volées de flèches.

Quant à l’arbalète, c’est une modification de l’arc qui permet un tir plus précis et plus puissant, mais qui est plus incommode, plus lourde à porter ; on la met plus difficilement à l’abri de la pluie qui la détend et la rend inoffensive ; de plus son tir est très lent. Elle ne prend de la valeur que dans la guerre de siège.

Elle se compose essentiellement d’un arc d’acier monté sur un fût de bois ou arbrier que l’on épaule pour tirer. Connue dans l’antiquité classique, employée par les Normands de Guillaume le Conquérant, par nos piétons au XIIIe siècle, l’arbalète se tendait à la main et n’avait pas une grande puissance ; aussi lui préférait-on généralement l’arc.

Au XIVe siècle on la perfectionnait en lui ajoutant un mécanisme destiné à tendre la corde ; elle devint alors très usitée.

Ce mécanisme consistait en un pied de chèvre, sorte de levier composé de deux pièces articulées, ou en une moufle qui donnait à l’arme une très grande force de tension, ou enfin en un cranequin. Ce dernier modèle, dont étaient munis les arbalétriers à cheval, possède comme organe de tension, un petit cric d’une grande force qui prend un point d’appui sur les tourillons de l’arbrier. Le cranequin est très visible dans le spécimen que nous reproduisons.

Les arbalètes à tour, dont l’arc atteignait parfois 10 mètres de long, étaient des machines de siège montées sur un véritable affût et qui se bandaient avec un treuil. L’arbalète lançait des flèches, des viretons courts à pointe comique, de lourds carreaux à fer barbelé, des galets ou jalets, etc.

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