Les déserts occupent une partie considérable de la surface du globe. Peu nombreux dans les zones tempérées, ils s’étendent sur de vastes étendues dans les régions tropicales et glaciales. Mais il ne faut pas seulement entendre par déserts les champs de glace des pôles et les mers de sable qui recouvrent une partie de l’Afrique et de l’Asie ; on donne aussi ce nom à toute une contrée où l’homme n’a établi ni cités, ni demeures fixes, où la terre n’a pas été défrichée et mise en culture, en un mot, n’a pas été conquise par le travail et l’industrie de l’homme. Un désert est donc toute portion de la surface de la terre où la population humaine est très clairsemée ou manque totalement en raison des conditions climatériques qui y rendent la vie impossible.
Aux deux pôles de la terre, s’étendent des déserts glacés que la rigueur du climat rend à peu près inhabitables. Le pôle antarctique n’a vraisemblablement jamais été habité. Le point le plus méridional a été atteint par James Ross, en 1842 ; il est parvenu jusqu’à 78°,9’,30" [1].
Les déserts polaires arctiques ne sont pas séparés des terres habitées, comme ceux du pôle antarctique, par de vastes mers ; ils sont plus rapprochés des continents européen, asiatique et américain.
Les populations les plus septentrionales de ces déserts glacés sont les Esquimaux, qui y forment des campements distants de 30 à 150 kilomètres. Le plus septentrional est celui d’Ita, dans le Smith Sound, par 78° de latitude N., où toute végétation a disparu. On n’a pas encore trouvé de traces de séjour des Esquimaux au delà du 81e degré. De nombreux explorateurs ont tenté de s’avancer dans les solitudes désolées du pôle ; Nansen a atteint 86°,13’ [2].
En Europe, les régions les plus désertiques sont les steppes de la Russie méridionale et de la Hongrie, territoires plats occupés par de hautes herbes, où la quantité d’eau qui tombe est insuffisante pour une végétation forestière, et dont certaines parties sont consacrées au pâturage ; elles sont le prolongement des vastes steppes asiatiques.
Une partie de la Finlande, avec ses lacs, ses marais, ses tourbières, est aussi à peu près déserte. Les landes de Hollande et du Hanovre, la Campine au nord de la Belgique, les landes de Bretagne et celles de la Gascogne, en France, sont encore des régions désertiques. Parmi les parties incultes de la France, on peut citer encore les marais de la Bresse, du Forez et de la Sologne. Les sables d’Arbonne, dans la forêt de Fontainebleau, sont même à mentionner, tant ils semblent une réduction du Sahara algérien ou du désert des Montagnes Rocheuses.
Les déserts auxquels on a souvent réservé spécialement cette désignation ont pour type le désert d’Arabie et celui du Sahara. Ils comprennent de l’ouest à l’est, c’est-à-dire de l’Atlantique à l’Asie centrale, le Sahara, le désert arabique, le désert de Perse et celui de l’Inde orientale ; ils se relient par le désert de Gobi à la région des steppes. Au nord de cette bande saharienne, s’étend la zone des steppes passant par la Hongrie, la Russie, la Sibérie, la Mongolie.
Le Sahara est traversé par des vents qui sont d’une sécheresse absolue. Les plaines rocheuses dites hammada et les dunes sablonneuses, ou ergs, en occupent la plus grande partie, mais quelques régions sont habitées : ce sont les oasis. Elles sont arrosées par des cours d’eau ou oueds, ou par l’eau de puits artésiens naturels ou artificiels.
Au sud de l’Afrique, un autre désert fait pendant au Sahara, c’est le Kalahari, avec ses dunes arides et son sol sablonneux à fond imperméable.
En Asie, la presqu’île de l’Arabie Pétrée, avec ses pierres noires et son simoun, est à peu près déserte. Au delà de la vallée de la Mésopotamie, le désert recommence. Le grand désert de Perse, qui possède un lac salé dans sa dépression centrale, passe pour le plus effroyable de tous ; aucune plante n’y pousse, pas même les graminées. Au sud, par le désert de Lout, et celui du Baloutchistan méridional où faillit périr l’armée d’Alexandre le Grand, il se relie au désert de Thar, au delà de l’Indus, dans l’Inde occidentale. Au nord le désert de Perse se continue par le Kara-Koum et le Kyzyl-Koum.
On peut remarquer que toute cette bande désertique, qui s’étend du Sahara à l’Asie centrale, est coupée par de grandes vallées fluviales, Nil, Euphrate, Indus, qui renferment une population très dense.
De l’autre côté de Pamir et au nord du Tibet, s’étend le Takla-Makan, récemment exploré par le Dr Sven Hedin, puis le grand désert de Gobi, qui représente le bassin d’une mer desséchée analogue à ce qui est aujourd’hui la mer Caspienne. Les régions désertes de l’Amérique n’offrent pas le même caractère que celles de l’Afrique et de l’Asie. Dans l’Amérique du Nord, ce sont des prairies ou savanes, dans l’Amérique du Sud, les llanos, des savanes et des pampas. Quant à l’Australie, elle possède au centre et à l’ouest de véritables déserts.
On peut se poser, à l’occasion des déserts, une question : sont-ils appelés à diminuer ou même à disparaître un jour ?
Nous constatons tout d’abord que les races civilisées ont progressivement conquis et mis en valeur les landes et les petits déserts de leurs pays. C’est ainsi que les landes de Gascogne sont fertilisées par un effort méthodique, que les dunes ont été arrêtées par des semis de pins, que les marais de nombreuses régions disparaissent grâce à des travaux régulièrement suivis. Les tourbières et les sables du nord de l’Europe ont été conquis à l’agriculture. Au Sahara, les puits artésiens qui ont été forés on t permis d’importantes plantations de palmiers ; on pourrait presque dire que l’homme créé à volonté des oasis. Dans l’Amérique du Sud, les pampas commencent à se peupler même en dehors des vallées fluviales.
Est-ce à dire que l’homme parviendra quelque jour à s’établir dans les déserts plus vastes et à les transformer à son profit ? Ce n’est guère probable.
La condition d’un désert, ainsi que l’a montré M. de Lapparent, tend toujours à s’aggraver, puisque l’évaporation, certainement supérieure à l’alimentation en pluie, s’opère aux dépens des réserves d’eau existantes.
Cette action est bien sensible, dit le savant géologue, en Asie, où le lac Balkhach qui, dans les temps historiques était en relation avec l’Ala-koul, est aujourd’hui divisé en cinq nappes, et a perdu un mètre d’eau en quinze années. Dans la Sibérie occidentale, le lac Abychkan, unique en 1812, est partagé aujourd’hui en 14 petites flaques. De même, le Lob Nor ne cesse de changer de place et de dimensions.
Il y a peu de jours, M. Georges Rolland, dans une communication à l’Académie des Sciences, relative au régime du bassin artésien de l’Oued-Rirh, dans le Sud Algérien, examinait ce qu’il y a de fondé dans la crainte de voir ce bassin s’épuiser et les nouveaux sondages nuire aux puits déjà existants. On ne doit pas considérer la nappe souterraine du Sahara comme inépuisable ; il en résulte que l’extension des oasis sahariens ne saurait être indéfinie.
Ce qui maintient aux déserts leurs caractères, c’est le défaut d’humidité. Dès que la végétation devient possible, la transformation commence à s’opérer. Mais il est à remarquer que presque tous les déserts occupent des dépressions, il en résulte qu’ils ne reçoivent les courants d’air qu’après que ceux-ci ont franchi les hauteurs qui enferment le bassin, ayant perdu par ce travail la plus grande partie de leur humidité.
Cependant l’aggravation des caractères désertiques ne continue pas fatalement d’une façon indéfinie. Un pays où l’insolation règne sans partage, ajoute M. de Lapparent, devient forcément le siège d’une aspiration d’air qui fait naître un minimum barométrique et provoque l’afflux des vents qui maintiennent l’équilibre en apportant tôt ou tard de la vapeur.