L’Angélique (Angelica Archangelica L.). Ombellifères, tire son nom du grec « aggelos » ange, par allusion à de prétendues propriétés merveilleuses. Elle a pour synonymes : Angélique cultivée, Angélique de Bohème, Herbe aux Anges, Herbe du Saint Esprit.
Habitat. — Originaire des montagnes du Nord de l’Europe où elle croit naturellement, elle pousse aussi en Autriche dans les Alpes et les Pyrénées, dans les lieux humides, le long des fleuves et des rivières.
Description sommaire. — Plante bisannuelle susceptible d’un grand développement. Racine grosse, fusiforme, se divisant en un grand nombre de rameaux s’enfonçant perpendiculairement dans la terre. Tige droite, fistuleuse, épaisse, pouvant atteindre 1,5 m à 2 m. de hauteur. Feuilles très grandes, alternes, bipinnatiséquées, à pétiole fistuleux, embrassant par une gaine très large, tombant à l’automne aux premiers froids. Fleurs odorantes, nombreuses, verdâtres, apparaissant en juillet-août. Elles sont réunies en ombelles dont la supérieure très développée peut mesurer 0,30 m de diamètre, les latérales étant beaucoup moins grandes. Fruit (akène), ovoïde, allongé, contenant des graines nues, aplaties d’un côté, convexes de l’autre. Toutes les parties de la plante exhalent une odeur suave et une saveur chaude et aromatique.
Culture. — L’angélique croît bien partout où le climat n’est pas froid ni humide. Le terrain qui lui convient le mieux est celui qui dérive des formations volcaniques, comme dans la Limagne d’Auvergne (A. R. et D. B.). Elle prospère dans les sols d’alluvion profonds, frais et sablonneux, si possible, mais elle craint les sols argileux et compacts. Toutefois, si l’on veut qu’elle prenne tout son développement, il est nécessaire que le sol soit bien fumé, ’et comme sa racine est pivotante et qu’elle s’enfonce profondément, on devra enfouir par un labour préalable le fumier bien décomposé. L’angélique est cultivée sur une grande échelle surtout dans deux départements : le Puy-de Dôme, région de Clermont-Ferrand, et les Deux-Sèvres, région de Niort.
Multiplication. Semis. — Elle a lieu par semis, mais l’époque de celui-ci varie avec les régions. Sous le climat de Paris, on sème en juillet et repique en octobre. Dans les Deux-Sèvres, on sème sur couche en mars, et dans la région de Clermont-Ferrand, le semis se fait en pépinière en décembre ou février avec repiquage de juillet à octobre. D’une façon générale, les graines semées au printemps, vers le mois de mars, lèveront vers le mois de juin et si le semis est fait à l’automne, la germination aura lieu au printemps, ce qui est préférable. Il importe de semer immédiatement après la maturation des graines qui perdent assez rapidement leur faculté germinative. On y procède en grand en établissant des planches de 1,30 m, environ, en laissant entre chacune d’elles un sentier de 0,30 m de largeur. On trace au cordeau des lignes écartées de 0,30 m en leur donnant une profondeur d’environ 0,03 m, puis on dépose les semences dans les sillons et on les recouvre de terreau sableux. (A. G. et J. D.)
Plantation ou repiquage. — Le terrain ayant été bien fumé, ameubli, hersé et roulé, on trace des lignes espacées de 0,80 m et on plante au plantoir les petits plants à 0,60 m les uns des autres. La reprise est souvent rapide, si l’on a choisi un temps frais ou pluvieux. Dans le Jardin familial, la place ’à accorder à la culture de l’angélique dépendra des emplois qu’on a en tête, et surtout si, en outre de l’usage thérapeutique, on veut confire les tiges.
Soins culturaux. — Ils consistent d’abord en binages tant que la plante n’a pas atteint la moitié de son développement, puis en arrosages dont la fréquence varie avec la nature du sol et du climat. Il existe un adage : « l’Angélique doit avoir les racines dans l’eau et la tête au soleil ». La durée de la plantation est généralement de trois ans et même davantage, si l’on a soin de couper la tige avant la floraison.
Récolte. Dessiccation. Rendement. — La récolte comprend les tiges, feuilles, graines et semences. Celle des tiges et pétioles peut avoir lieu la première année de juin à août, niais il vaut mieux attendre la seconde année. Les tiges sont coupées le matin à la rosée ; on les tranche en biseau au ras du sol ; on en enlève les feuilles et on met les bâtons en bottes qu’on livre de suite aux confiseurs. On sèche les feuilles à l’ombre. Les graines sont récoltées en août au fur et à mesure de la maturité des ombelles qu’il faut surveiller, car si elle est trop avancée elles laissent tomber les graines sur le sol, et si elle est insuffisante, il est nécessaire d’exposer les ombelles coupées quelques jours au soleil pour que les semences se détachent facilement. L’obtention des graines résulte du battage des ombelles avec un léger fléau ; on les passe au crible et au van, puis on complète leur dessiccation. On évalue le poids de l’hectolitre e entre 14 et 6 kilogrammes. Les racines sont arrachées en hiver. On les nettoie et, après les avoir coupées en deux ou en quatre, on les met sécher en plein soleil : 10 kg de racines fraîches laissent 2,630 kg à 3 kg de racines sèches. Les, meilleures proviennent de plantes d’un an n’ayant donné ni tiges, ni feuilles, ni graines (A. R. et D B.). On les conserve dans des boîtes en bois, mais leur vente doit avoir lieu assez tôt, parce qu’elles perdent facilement leurs propriétés et sont attaquées par les insectes. Aux environs de Clermont-Ferrand, on estime le produit d’un hectare entre 8 000 et 12 500 kg pour une dépense culturale de 1 276 francs. Un hectare peut fournir 1200 kg de semences.
Composition chimique. — L’angélique contient : huile volatile et acide angélique, angélicine, résine amorphe, acide malique et malates, sucre, gomme, amidon, etc. Les essences des trois parties de la plante ont une composition un peu différente, bien qu’elles soient constituées par des terpènes pour une grande partie, mais avec une teneur variable en cymène, phellandrène, acide valérianique, etc. La proportion d’essence est d’environ 0,35 à 1,0 % dans les racines, 1 à 1,2 % dans les semences et 0,10 % dans la plante verte. A noter que l’essence contenue dans les semences renferme 75 % de térébangélène ; elle se combine dans la racine et dans la tige avec des principes résineux pour former une gomme résine d’odeur musquée très suave : le baume d’angélique.
Propriétés thérapeutiques. — L’Angélique a joui en son temps d’une certaine réputation près des médecins de la Renaissance qui, d’après l’érudit Dr H. Leclerc, appelaient sa racine « racine du Saint-Esprit », à cause des « grandes et divines proprietez quelle a contre de très griefves maladies. » Ils la regardaient comme « céphalique et propre à récréer le cœur ». En réalité, elle est stimulante, stomachique, carminative et antispasmodique ; elle constitue un excellent remède de l’anorexie surtout de cause psychique.
Préparations pharmaceutiques. — Elles sont peu nombreuses et ne concernent que les racines et les semences. Infusion 20 g des unes ou des autres par litre d’eau bouillante ; teinture 2 à 10 g en potion ; poudre 2 à 6 g Ces préparations sont faites avec des racines et des semences sèches, mais on a tendance aujourd’hui à les employer fraîches quand il s’agit d’une infusion. L’angélique entre dans la composition du Baume du Commandeur, de l’Eau de mélisse des Carmes. La poudre de semences est utilisée pour détruire les poux. La liquoristerie l’emploie dans la confection de plusieurs liqueurs de table : Chartreuse, eau et crème d’Angélique, Raspail, Bitter, Vermouth. La confiserie se sert des tiges fraîches sur une grande échelle pour préparer l’Angélique de Niort, de Clermont-Ferrand, de Nevers et de Châteaubriant. Enfin, dans quelques pays du Nord, on consomme la tige et les pétioles crus ou cuits comme légumes.
Observations commerciales. — L’Angélique mérite d’être beaucoup plus cultivée qu’elle ne l’est, car nous avons importé de Bohême entrer à 2 millions de francs pour des semences et des racines et nous en importons encore. Les dernières sont plus estimées que les nôtres et payées un peu plus cher. Cette plante figure d’ailleurs parmi celles dont la culture est officiellement recommandée. L’herboristerie a payé, il y a quelques années, les feuilles 0,50 fr à 0,60 fr le kilogramme ; les semences 1,25 fr à 2 fr. ; les racines 0,75 fr à 1 fr En 1924, les prix sont montés entre 1 fr à 1,20 fr pour les feuilles mondées, 3,75 fr à 4 fr pour les racines entières, 3,50 fr à 4 fr pour les semences criblées, mais la vente n’est réellement forte que pour les deux derniers produits.