Grâce à leur grande dureté, à l’aisance avec laquelle ils résistent aux attaques du temps, les minéraux siliceux jouent un grand rôle dans les arts. A ce point de vue, quelques-uns d’entre eux ont déjà été étudiés ici-même, notamment les agates et les diverses variétés du quartz (Voir Science lllustrée, t. XX, p.412, et t. XXI, p. 204 et 224). Pour en finir avec cette catégorie d’espèces minérales, nous nous proposons aujourd’hui de passer rapidement en revue les propriétés et les applications du jaspe et de l’onyx.
Le jaspe est très voisin de l’agate, mais il existe entre ces deux pierres une différence fondamentale. L’agate est toujours transparente ou tout au moins translucide lorsqu’elle est en éclats minces ou taillée en plaques. Au contraire, le jaspe fortement coloré par des matières étrangères est complètement opaque. Malgré la grande proportion de matières colorantes qu’il contient, sa dureté est considérable et il possède tous les caractères fondamentaux des minéraux siliceux ; il ne fait pas effervescence aux acides ; il raye le verre et l’acier, il fait feu au briquet.
Le jaspe se trouve en rognons ou en nodules de petites dimensions ; parfois aussi on le rencontre en masses plus considérables disposées en dykes ou en filons, il est alors moins pur.
Les jaspes communs sont fortement colorés en rouge, jaune et vert. Parmi ses nombreuses variétés, on recherche surtout pour l’ornement le jaspe ronge ou sanguin commun en Sicile, et le jaspe vert-foncé parsemé de rouge ou jaspe-héliotrope. On connaît aussi des jaspes zonés, fleuris, arborisés, rubanés, panachés, tigrés, etc, Les prix sont très variables ; telle variété peut valoir jusqu’à 60 fois plus que telle autre, suivant les besoins.
Les beaux jaspes viennent de l’Inde, de Sicile, dOberstein et des monts Ourals.
Les anciens ont donné le nom de jaspe à une foule de substances très différentes, mais ayant entre elles des analogies de colorations ; notamment à certains porphyres rubanés.
Chaque signe du zodiaque avait, dans l’antiquité, sa pierre symbolique qui exerçait son action bienfaisante tant que le signe correspondant régnait à l’horizon ; le jaspe correspondait à mars et l’onyx, dont nous parlerons tout à l’heure, à juillet. Comme de toutes les pierres rares on en faisait des amulettes, des colliers pour chasser les maladies, des plaques, des coupes, des cachets, de la grosse bijouterie.
Les jaspes sont très employés aujourd’hui dans la fabrication des mosaïques dites de Florence. La France possède d’habiles artisans qui rivalisent avec les Italiens dans la confection de ces incrustations à l’aide desquelles sont reproduits différents motifs artistiques : fleurs, fruits, paysages ou portraits.
Quant à l’onyx, c’est une simple variété d’agate dont le fond a la couleur de la corne (onyx, ongle) et qui présente des zones de diverses couleurs fortement tranchées : blanc, noir, rouge.
Cette pierre a, de tout temps, été très recherchée pour la glyptique. On en faisait des vases de grandes dimensions, des cachets, de grands camées comme celui de la bibliothèque nationale où est figuré le triomphe d’Auguste et celui du musée de Vienne qui représente le même sujet, mais qui est de dimensions plus restreintes que le nôtre. Dans la symbolique chrétienne, l’onyx était le symbole de la chasteté.
Les modernes n’ont pas négligé cette belle matière. Notre gravure reproduit une magnifique aiguière Renaissance que l’on peut voir au Louvre, dans une des vitrines de la galerie d’Apollon. Elle est en onyx et surmontée d’une Minerve casquée formant couvercle. La monture et la garniture métallique sont décorées d’émaux aux vives couleurs.