Le bracelet

La Science Illustrée N° 663, 11 Août 1900
Dimanche 22 février 2009

L’usage de porter au poignet un anneau ornemental est aussi ancien que l’homme. Les peuplades de l’époque de la pierre polie avaient déjà des bracelets formés de graines, de pierres brillantes, de coquillages enfilés, comme en ont les quelques sauvages qui errent encore à la surface du globe.

Dans les temps historiques, les Perses et les Mèdes aimèrent surtout à se parer de bracelets ; ils en portaient non seulement au poignet, mais encore au bras, un peu au-dessous de l’épaule. Ils s’en servaient pour indiquer le rang et la richesse, usage qui s’est perpétué en Orient jusqu’à nos jours.

Nos musées possèdent des bracelets égyptiens de toute beauté ; il en est en or découpé et estampé, orné de pâtes de verre incrustées dans des cloisonnages, ou de pierres gravées ; scarabées, lions et fleurs de lotus y abondent comme motifs de décoration.

A la différence des Asiatiques, chez lesquels les bracelets étaient portés par les hommes aussi bien que par les femmes, les Grecs réservaient ce genre d’ornement aux femmes ; elles en abusaient. Non seulement leurs poignets en étaient couverts, mais encore leurs bras, leurs chevilles, leurs jambes. Une grecque en promenade devait annoncer de loin sa présence, car tous ces bijoux étaient ornés souvent de petites clochettes : la vue et l’ouïe étaient également satisfaites.

Les bracelets grecs, très élégants, présentaient parfois deux ou trois tours de métal et se terminaient en tête de serpent ; d’autres, en torsade, finissaient par deux sphinx féminins qui en formaient la fermeture.

A Rome, le bracelet plus riche, est lourd, surchargé de pierres précieuses, de médailles, de camées, d’amulettes.

Sous l’empire, les hommes en portaient comme les femmes, aussi bien aux chevilles qu’aux poignets. On distribuait aux soldats, en récompense de leurs services, des bracelets de forme spéciale, les armilles. De bronze ou d’or, ils se portaient au poignet, mais quand ils étaient trop nombreux, le titulaire les fixait sur sa poitrine à côté de ses autres décorations. Un certain Sicinius Dentatus n’avait pas moins de 160 bracelets gagnés sur les champs de bataille ; il devait succomber, à la lettre, sous le poids des récompenses.

Les Gauloises s’entouraient les bras et les poignets d’épais fils d’or tordu. Les hommes étaient munis, en général, d’armilles de bronze, armes plutôt qu’ornements, véritable coup de poing antique.

L’usage du bracelet se continua pendant le moyen âge. Saint-Eloi fabriquait des bracelets d’or pour son maître. Les inventaires du moyen âge citent beaucoup de ces bijoux ; malgré cela leur emploi était assez restreint.

A partir du XIIIe siècle, ils disparaissent de la toilette féminine pour n’y reparaître que peu de temps, sous les Valois.

Sous Louis XIII toutes les dames de la cour portent le bracelet de perles fines. Avec ses successeurs, il acquiert une importance de plus en plus grande dans la parure. Les dames du Directoire se contentèrent de simples cercles de cheveux ; avec l’Empire reparaissent les camées. De cette époque date un bracelet curieux qui appartint à la reine de Westphalie et qu’on pourrait appeler le bracelet acte de naissance. Il a été vendu en 1880. Les pierres et les substances qui le composent se suivent ainsi : nacre, émeraude, labrador, émeraude, puis, en roses, le nombre 21 ; viennent ensuite : feldspath, émeraude, vermeil, rubis, iris, émeraude, rubis et 1783 en roses. En prenant la première lettre de chaque substance, on lit : née le 21 février 1783.

Sous la Restauration, le type gothique revient en faveur avec le romantisme. De nos jours, le bracelet a des formes très diverses ; tantôt il affecte une grande simplicité, tantôt, au contraire, il est richement orné et couvert de pierreries. Chez tous les peuples actuels, même au centre de l’Afrique, on retrouve le bracelet.

Dans l’Inde, ce bijou est des plus gracieux, il est formé de nombreux rangs de perles enfilés dans de la soie, de plaque de métal ornées de pierres et de perles, ou de beaux filigranes à décoration géométrique ou florale. Tous n’ont pas la valeur de celui que nous reproduisons. L’or, l’argent, le cuivre, le fer, le verre, le plomb, des rondelles sciées dans la coquille de gros gastéropodes servent à leur confection ; il y en a pour toutes les bourses, même les moins garnies.

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