Dans un précédent article [1] , notre éminent collaborateur, M. Wilfrid de Fonvielle, décrivait à nos lecteurs la partie terminée de la voie souterraine du chemin de fer électrique de Londres. L’inauguration officielle a eu lieu le 4 novembre dernier en présence du prince de Galles, accompagné de son fils le duc de Clarence. Le prince, avant de monter dans le train, lança le courant électrique dans la ligne au moyen d’une clef d’or. Parti de la Cité, il parcourut toute la ligne en s’arrêtant à la station de Kenngton Oval pour la Visiter rapidement et descendit à la gare terminus de Stockwell,
Ce nouveau chemin de fer permet aux habitants de Londres-Sud de gagner rapidement la Cité. Il part de Clapham-Road, à Stockwell et arrive dans la Cité il la station de King Villiam Street, en s’arrêtant aux gares intermédiaires de Kennington-Oval , Kennington Park Road, d’Elephant and Castle et de Borough. Au début, le départ des trains aura lieu toutes les cinq minutes, mais très prochainement, en raison du trafic énorme de la ligne, les trains se succéderont à des intervalles de deux minutes. Les arrêts étant assez fréquents, les trains parcourront la ligne à une vitesse moyenne de 23 kilomètres à l’heure environ ; le trajet complet s’effectuera en un quart d’heure.
Le tarif uniforme sera de 0 fr. 20 et les voyageurs passeront par un tourniquet-compteur, ce qui évitera la distribution des billets.
Cette ligne souterraine a été construite en quatre ans, elle a coûté environ 600 000 francs par kilomètre. La compagnie a reçu du Parlement l’autorisation de la continuer jusqu’à Clapham Common.
Nombre de petits tramways électriques, tant sur le continent qu’en Angleterre, sont mus par l’électricité, et. en Amérique certaines villes en sont pourvues, mais nulle part ce mode de traction n’a été appliqué sur une plus large échelle.
Le projet de ce chemin de fer a été conçu par MM Mather et Platt, de Manchester. Nous allons le décrire brièvement. Les machines destinées à fournir le courant électrique sont installées à Stockwell, la station terminus suburbaine ; c’est là qu’on a réuni tout le matériel. L’électricité est engendrée par trois grandes dynamos du type Edison-Hopkinson, actionnées chacune par une machine compound verticale particulière, construite par MM. John Fowler et Cie ; ces machines, semblables aux machines marines, ont leurs deux cylindres côte à côte.
Chacune d’elles peut développer une force de 375 chevaux-vapeur, et les dynamos rendent 75 pour 100 de cette force.
Des dynamos, le courant arrive à une plaque de distribution, d’où il est envoyé à chaque partie de la ligne, suivant les besoins.
Le courant est conduit par des câbles isolés à un rail d’acier central qui repose sur des coussinets de verre. Ce rail parcourt toute la voie. Les locomotives reçoivent directement le courant, au moyen de collecteurs qui frottent sur ce rail.
Les locomotives sont construites sur un principe nouveau, qui n’a pas encore été appliqué, bien que sir William Siemens en ait déjà eu l’idée, il y a quelques années. Sur chaque essieu de la machine est fixée une dynamo motrice, dont l’axe tournant est justement l’essieu des roues de la locomotive. De cette façon, la force est appliquée directement sur la partie roulante sans intermédiaire d’aucune sorte, ce qui simplifie énormément la machine. Le courant recueilli par le collecteur passe par une tablette de distribution placée à l’intérieur de la locomotive sous le contrôle du mécanicien. Celui-ci peut ainsi régler l’admission du courant et par suite la vitesse de sa machine ; il peut changer la direction du courant et par suite le sens de la marche [2]
La locomotive peut en trainer, à la vitesse de 38 kilomètres à l’heure, un train complet, pesant 30 tonnes. Dans la pratique, la vitesse n’est que de 23 kilomètres. Le train est muni d’un frein à air et la locomotive d’un frein à main.
Les gravures qui accompagnent cet article complètent celles que nous avions précédemment données.
L. Beauval