La Poterie grecque dans l’antiquité

G. Angerville, La Science Illustrée N° 696 — 29 mars 1901
Lundi 23 septembre 2013

L’origine de la céramique remonte à la plus haute antiquité. Après l’art de fabriquer des armes pour se défendre et quelques tissus grossiers pour se garantir des injures du temps, c’est celui que les hommes cultivèrent le premier.

Dans le limon déposé sur le bord des fleuves ils trouvèrent une matière ductile, facile à travailler, prenant et conservant aisément la forme une fois donnée.

Simplement séchées à l’air, ces poteries étaient fort fragiles et présentaient l’inconvénient de se délayer dans l’eau. L’artisan qui imagina de les faire cuire, à l’aide d’un feu de broussailles, dans un trou creusé dans le sol, réalisa un immense progrès. Mais les vases cuits ainsi à température peu élevée restent encore poreux et absorbants. Un nouveau progrès fut réalisé le jour où l’on construisit le premier four véritable et où. l’on recouvrit cette terre poreuse d’une couche vitreuse, imperméable, d’une glaçure.

Tous les vases grecs de l’antiquité, que leurs formés et leur décoration rendent si remarquables au point de vue de l’art, sont des poteries communes, grossières, composées d’argile, de marne argileuse et de sable, mélange qui nous sert actuellement à faire des terrines, des cruches et des pots à fleurs. L’artiste, par son travail, a anobli la matière.

Ces poteries, cuites à basse température et en une seule fois, sont tendres, aisément rayables au couteau. On les a réparties en deux groupes : les poteries mates et les poteries lustrées.

Les premières, que l’on retrouve à l’origine de toute civilisation, sont poreuses et se laissent assez aisément traverser par les liquides, n’étant pas recouvertes d’un vernis.

Les poteries lustrées sont, au contraire, caractérisées par l’application sur la terre d’un lustre extrêmement mince, un silicate alcalin, de potasse ou de soude, toujours coloré par un oxyde métallique introduit primitivement dans sa composition.

Quant aux poteries vernissées proprement dites, c’est-à-dire recouvertes, non d’un lustre, mais d’un vernis vitreux à base de plomb, elles furent connues des anciens Égyptiens et, certainement aussi, des potiers de l’antiquité grecque et romaine, mais ne furent guère fabriquées par eux, si l’on en juge pas le petit nombre de pièces de cette sorte que possèdent nos musées.

Revenons donc aux produits de fabrication courante à cette époque.

Les poteries mates fournissaient, en général, les objets d’économie domestique : amphores pour conserver les grains, l’eau, l’huile ou le vin ; plats d’usage culinaire, etc.

Ces amphores, qui avaient jusqu’à 2 mètres de haut, ne pouvaient être travaillées au tour, elles étaient construites à la main à l’aide de plaques rectangulaires et courbes que l’on plaçait par zones circulaires superposées, en les pressant par leurs deux faces pour les faire adhérer entre elles. Après une dessiccation assez prolongée à cause de l’épaisseur des parois, on roulait les vases jusqu’au four, où ils étaient chauffés pendant deux jours, puis on laissait refroidir pendant une semaine, et on livrait au client.

Quant aux poteries lustrées, elles étaient travaillées au tour avec un soin infini. Le tour du potier était, en effet, un instrument d’une haute antiquité. Homère, décrivant la danse d’Arcadie, compare la vélocité des jeunes gens et des jeunes filles formant une ronde à la rapidité des mouvements que le potier imprime à la roue de son tour.

Ces vases, qui font aujourd’hui l’ornement de nos musées, avaient, à l’époque de leur création, des attributions diverses. Les uns servaient à décorer des temples ou des demeures particulières, d’autres renfermaient la cendre des morts ou servaient de prix aux vainqueurs de certaines fêtes, comme aujourd’hui les vases de Sèvres, d’autres enfin étaient des cadeaux de noces, des gages d’amitié ou d’amour. Sur ces poteries, aux formes artistiques figurent, tantôt des décorations géométriques, tantôt des plantes, des animaux ou des scènes empruntées à la mythologie ou à la vie de tous les jours.

Des inscriptions gravées donnent d’ordinaire le nom du potier qui façonna le vase, et celui du peintre qui, sur la pièce crue, traçait à la pointe, puis au pinceau, les sujets et les ornements.

Notre gravure reproduit l’un des plus beaux vases de l’antiquité grecque : l’amphore de Nicosthènes, du nom du potier qui la façonna. La décoration apparaît en noir sur le fond rouge du vase.

Ce lustre noir est à base d’oxyde de fer et d’oxyde de manganèse ; il est très brillant, sans crudité et les sujets tranchent nettement sur le fond.

G. Angerville

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