Blaise Pascal est le premier qui ait conçu la possibilité d’exécuter des calculs à l’aide de mouvements mécaniques. Il construisit à dix-neuf ans sa machine arithmétique en faisant représenter des nombres à des roues d’engrenages, dont le passage des dents en un certain point indiquait exactement le nombre de ces dents. Cette machine décrite dans l’Encyclopédie de Diderot et patronnée par Leibnitz, n’a pu réaliser qu’un compteur additionnant les nombres inscrits les uns à Ia suite des autres. Elle ne faisait pas réellement la multiplication et la division.
Viennent ensuite la machine de Roth, qui n’était qu’une simplification de la précédente, puis l’arithmomètre Thomas, effectuant réellement les quatre opérations, grâce à des cylindres cannelés à arêtes saillantes, dont les longueurs étaient proportionnelles aux nombres 9, 8,7,6, 5,4,5,2,1, et à un pignon mobile, en contact avec ces arêtes, et commandant une sorte de compteur.
M. Hirn a montré que cet arithmomètre était l’instrument des calculs rapides et tout à fait rigoureux ; son exactitude et sa rapidité dans les calculs de nombres qui ont jusqu’à vingt-quatre figures au produit au moyen de la machine qui n’admet que six figures au facteur, en font, dit M. Hirn, un appareil précis et incomparable dont se servira un jour l’astronome tout comme le comptable d’un bureau quelconque.
Cette prédiction s’est aujourd’hui réalisée, et nous voyons les machines à calculer employées dans les grandes administrations, les chemins de fer, la banque, etc., etc., où elles rendent les plus grands services comme précision et comme économie de temps. Mais il ne faut pas oublier qu’elles sont délicates et coûteuses, et demandent à être confiées à des mains adroites, ce qui en limite forcément l’emploi.
Viennent ensuite les machines à calculer portatives, telles que la règle à échelle logarithmique dite règle à calcul, qui rend les plus grands services dans les calculs rapides n’exigeant pas une précision absolue ; elle est fort appréciée sur les chantiers de travaux, et dans les bureaux d’études et de dessin. Ce petit instrument facile à mettre dans la poche permet non seulement d’exécuter les quatre opérations, mais encore de résoudre des triangles rectilignes et sphériques, d’extraire des racines carrées, cubiques et de tous les degrés, d’estimer le volume des corps d’après leur poids, et réciproquement, etc.
Mais elle demande un certain temps d’apprentissage, et ne peut être employée pour des calculs rigoureux.
A côté des machines à calculer et des règles logarithmiques dont nous venons de parler, on a construit récemment des machines à calculer simplifiées, entre autres des multiplicateurs se bornant à faire automatiquement la multiplication des nombres quelconques par des nombres quelconques, et cela par des moyens fort simples, tout en donnant des produits rigoureusement exacts.
Voici par exemple le multiplicateur automatique dont nous donnons le dessin ci-dessus. Inventé par M. Eggis, cet appareil se compose essentiellement de 9 feuilles de carton mince portant respectivement les produits des 9 premiers nombres par les 9 premiers nombres. Ces feuilles, découpées de façon convenable, sont ensuite superposées de telle façon que les chiffres de la deuxième feuille inférieure soient placés à côté des chiffres de la première feuille, que les chiffres de la troisième soient placés à côté de ceux de la seconde, et ainsi de suite. Les feuilles sont ensuite placées dans une boîte de la grandeur d’une ardoise d’écolier, et recouvertes, en guise de couvercle, d’une plaque métallique percée de 9 fenêtres horizontales, ayant comme hauteur deux lignes de chiffres ; c’est dans ces fenêtres que se lisent les produits partiels.
Chaque feuille porte à sa partie inférieure un petit bouton à vis qui se meut dans une rainure ; on a ainsi, sur le couvercle de la boîte, 9 rainures dans lesquelles peuvent glisser les 9 boutons.
Par le jeu successif de ces derniers, on fait glisser les feuilles de façon à former, dans la fenêtre n°1, le nombre qu’il s’agit de multiplier.
S’agit-il par exemple, du nombre 819764545, on fera apparaître, en manœuvrant le bouton de gauche, le chiffre 8 à gauche de la fenêtre, puis on vissera la tète du bouton contre la rainure pour éviter tout déplacement de la première feuille.
Le second bouton, remonté jusqu’au haut de la rainure, fera apparaître, dans la même fenêtre, le chiffre 1 à côté du 8, et ainsi de suite pour le reste du nombre. Tout cela se fait, bien entendu, en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire.
Voici donc notre multiplicande posé. Ce qui fait l’originalité de cette machine, c’est qu’il n’y a plus besoin d’y toucher maintenant pour effectuer la multiplication de ce nombre par un nombre quelconque.
Voulons-nous le multiplier par 856, par exemple, il nous suffit de lire les produits partiels par 6, par 5 et par 8, dans les fenêtres 6, 5 et 8 correspondantes, et de les inscrire, en reculant chacun d’un rang vers la gauche, de façon à n’avoir plus qu’à les additionner pour avoir le produit total. L’appareil porte lui-même une ardoise sur laquelle on peut faire rapidement cette opération.
Le produit par 6, par exemple, se compose des 2 nombres lus dans la fenêtre 6 qui sont : 405432123 et 864264840, dont la somme est 4918586070.
On additionne mentalement ces deux nombres, et la somme 4918586070 est inscrite sur l’ardoise, comme premier produit partiel. Nous n’avons pas à insister sur le temps que l’on gagne avec ce petit appareil pour les longues et fastidieuses multiplications, que l’on est souvent forcé de refaire plusieurs fois. Ici le résultat est obtenu instantanément, et avec une précision absolue.
Ajoutons que le multiplicateur automatique peut également être employé pour exécuter toutes les opérations ayant la multiplication pour base, par exemple pour les comptes faits de journées d’ouvriers, la réduction en francs des monnaies étrangères au cours du Jour, etc., etc.
Nous espérons avoir fait comprendre à nos lecteurs combien cet appareil si simple est appelé à rendre de services ; terminons en disant qu’il peut être construit à très bon marché, et par suite devenir un objet d’utilité pratique pour tous ceux qui ont à faire des calculs d’une certaine longueur.
Arthur Good