Ce petit appareil a été inventé, il y a une vingtaine d’années, par M. Boucher, ingénieur au Havre, mais des défectuosités de fabrication empêchèrent qu’il ne se répandît dans le public, lorsque M. Châtelain le reprit tout récemment et le modifia de fond en comble de façon à en faire un instrument de précision, d’une marche sûre et impeccable. Le calculigraphe, tel qu’il est construit à présent, constitue à ce titre une invention nouvelle. Son usage ne tardera pas à se généraliser, car il apporte aux personnes chargées d’effectuer des calculs longs et minutieux, une aide rapide et sûre, dont les résultats sont d’une irréprochable exactitude.
Le calculigraphe se fabrique sur deux modèles. Le plus simple à unique cadran, suffit à toutes les opérations d’arithmétique.
Le modèle à double face résout les problèmes d’algèbre, de géométrie, de trigonométrie.
Le principe de cet appareil repose sur cette propriété des logarithmes, à savoir que : la somme des logarithmes de deux nombres est égale au logarithme de leur produit, et inversement que : si du logarithme d’un nombre on retranche le logarithme d’un autre nombre, on obtient le logarithme du quotient de la division du premier par le second.
Sans s’occuper plus longtemps de la théorie des logarithmes, toute personne en possession de la marche de l’instrument, et celte science spéciale consiste uniquement à lire sur des cercles à divisions chiffrées, comme on lit sur un double-décimètre gradué en millimètres, toute personne sera apte à se servir utilement du calculigraphe.
Le modèle simple est une réduction du modèle à double cadran, nous aborderons la description do ce second type, dont on déduira celle du premier.
Le diamètre représenté en vraie grandeur par nos croquis, est de 0m,05 ; le boîtier qui contient le mécanisme porte deux cadrans protégés par des glaces.
L’un de ces cadrans est fixe, l’autre mobile. Celui-ci reçoit son mouvement, au moyen de la couronne du pendant, que l’opérateur fait pivoter entre ses doigts, comme s’il s’agissait de remonter une montre à remontoir. Le bouton placé à côté du pendant actionne deux aiguilles, placées l’une sur le cadran fixe, l’autre sur le cadran mobile. Ces deux aiguilles rivées sur le même axe, tournent ensemble. Une troisième aiguille, l’index, est fixée à demeure sur le bord supérieur du boîtier, devant le cadran mobile.
Les deux cadrans portent chacun quatre cercles concentriques, divisés d’une façon particulière donnant : sur le cadran mobile, trois groupes de divisions ou échelles, et sur le cadran fixe, deux échelles seulement.
Au moyen de la couronne du pendant on amène sous l’aiguille ou sous l’index telle division voulue du cadran mobile, de même qu’au moyen du bouton, on peut porter l’aiguille de l’un ou l’autre cadran sur une division quelconque de ce cadran.
Les positions diverses qu’occupent à volonté les aiguilles et le cadran mobile, forment une série de combinaisons qui permettent d’effectuer les opérations annoncées plus haut.
Les échelles du cadran mobile comptent : 1° L’échelle des nombres ordinaires développée sur le troisième cercle intérieur ; 2° L’échelle des carrés développée sur les deux premiers cercles intérieurs ; 3° L’échelle des sinus des angles développée sur le cercle extérieur ;
Les échelles du cadran fixe sont : 1° L’échelle des cubes développée sur les trois cercles intérieurs ; 2° L’échelle des décimales, des logarithmes développée sur le cercle extérieur.
Cette description demanderait à être amplifiée par une indication de la représentation des logarithmes sur les cadrans du cercle, et par quelques renseignements sur la division et la lecture du cadran mobile et du cadran fixe. Les personnes désireuses de s’éclairer plus à fond, s’en référeront à la notice imprimée, très détaillée et très claire, que le constructeur du calculigraphe a rédigée, et que son étendue nous empêche de reproduire.
Nous nous bornerons à donner le mécanisme de quelques opérations, qui démontreront l’utilité et la simplicité réelles de cet appareil.
En général, quel que soit un problème posé, il se réduit toujours à une formule numérique, qui relève des opérations de l’arithmétique.
Ces opérations se font sur l’échelle des nombres, où se lisent les résultats,quand même on ferait intervenir des valeurs obtenues sur les échelles des carrés, des cubes ou des sinus.
Commençons par la multiplication. Soit à multiplier A par V. On amène A sous l’index, on porte l’aiguille sur I, et on amène V sous l’aiguille.
L’index indique alors le produit. Lorsque V est variable, on épuise toutes les valeurs de V.
Pour diviser A par B, on amène A sous l’index, puis on porte l’aiguille sur B, et on amène le I du cadran mobile sous l’aiguille, l’index indique alors le quotient. On peut procéder en portant l’aiguille sur B, le 1 du cadran étant à l’index, on amène alors A sous l’aiguille et l’index montre le quotient.
Pour trouver le quatrième terme d’une proportion dont on connaît les trois premiers, on amène le deuxième terme sous l’index, on porte l’aiguille sur le premier, et on amène le troisième sous l’aiguille ; l’index indique le quatrième. En général, l’index et l’aiguille indiquant les deux termes d’un rapport, tous les nombres qu’on amènera en ces points seront dans, le même rapport.
La similitude des mouvements indiqués dans les trois règles précédentes montrent que la multiplication et la division sont des proportions dans lesquelles l’un des termes est l’unité.
Exemples : Si 24 francs représentent le prix d’un objet, on demande le prix de 32 objets semblables.
On établit la proportion 1 : 24 = 32 : x. On amènera donc 24 sous l’index et on portera l’aiguille sur I. On aura ainsi les deux termes d’un rapport indiqués l’un par l’aiguille et l’autre par l’index ; le troisième terme 32 étant amené sous l’aiguille, on lira la valeur de x, c’est-à-dire 768 francs, qui viendront sous l’index.
Si on demande le prix d’un objet, sachant que 32 objets coûtent 768 francs, on établit la proportion 32 : 768 = 1 : x. On amènera donc 768 sous l’index et on portera l’aiguille sur 32. On aura ainsi les deux termes d’un rapport indiqués l’un par l’aiguille et l’autre par l’index ; le troisième terme I étant amené sous l’aiguille, on lira la valeur de x, c’est-à-dire 24 francs qui viendront sous l’index. Sous l’aiguille sont toujours des unités de même nature et sous l’index également. Dans cet exemple, l’aiguille ayant servi à indiquer les objets, l’index a servi à indiquer les francs.
Il serait facile de multiplier les exemples. La notice, dont nous avons parlé, fournit, nous le répétons, tous les renseignements désirables sur le calcul des logarithmes, des carrés, des cubes, des sinus, des triangles, etc., sur la division et la lecture des cadrans mobiles ou fixes. Ce petit appareil, très simple, quoique compliqué en apparence, est d’un prix qui le rend accessible aux bourses les plus modestes.
G. Teymon