Les débuts de l’armure de plates

La Science Illustrée N° 632, 6 Janvier 1900
Samedi 21 février 2009 — Dernier ajout mardi 6 février 2024

L’armure dont nous voulons nous occuper est l’armure complète d’acier battu, ajustée au corps, articulée de façon à permettre tous les mouvements. Cette armure, qui fait de l’homme de guerre une véritable statue d’acier, n’apparaît qu’à la fin du moyen-àge.

L’antiquité grecque et romaine n’a employé que la cuirasse en peau, ou en étoffe recouverte de lames de métal, protégeant le ventre et la région des aines, le casque garantissant le crâne, la nuque et une partie de la face, les cnémides, sortes de jambières de métal qui protégeaient le devant de le jambe entre le genou et le cou-de-pied ; des courroies, bouclées au-dessus et au-dessous du mollet, les maintenaient en place.

Pendant toute la période carlovingienne et jusqu’au XIVe siècle, l’armure porte le nom d’adoubement et consiste en broigues, puis en cottes de mailles auxquelles viennent s’ajouter, dès le début du XVe siècle, des demi-boîtes en fer pour protéger le coude et le genou (cubitières et genouillères), puis bientôt d’autres pour garantir les bras (garde-bras) et les cuisses (tumelières). Toutes ces pièces, fixées par dessus le haubert, consistent en deux lames de fer, plus ou moins courbées, réunies d’un côté par des charnières et libres de l’autre. Comme les deux parties d’une boîte, elle se rapprochent pour enfermer le membre et sont fixées alors solidement par des courroies et des boucles. Le côté de la charnière était placé à l’extérieur, les boucles et les courroies sur la face intérieure des membres. Vers 1350, on ajouta deux nouvelles pièces pour les avant-bras et les jambes.

Le garde-bras fut modifié à ses deux extrémités, vers l’épaule et vers la saignée. On le fit terminer de chaque côté par trois ou quatre lames circulaires à recouvrement qui laissaient plus de liberté aux membres. Les tumelières subissent un changement analogue. Sur l’épaule, au jarret, dans les endroits où apparaissent la maille du haubert, on mit des sortes de petits boucliers métalliques. Ainsi on cherchait peu à peu à faire disparaître les défauts de l’armure par où pouvaient passer la pointe d’une pique on d’une épée et surtout la flèche de l’archer.

L’enveloppe de mailles qui entourait le pied disparut et fut remplacée par des lames articulées. Le costume militaire suivant toujours les errements du costume civil, la chaussure se terminait en pointes ridiculement longues que le cavalier était forcé d’enlever pour combattre à pied.

Le tronc n’était toujours protégé que par la cotte de mailles. Sous Charles V, on commença à employer un corselet de fer formé de deux pièces ; celle de devant allait de la ceinture au creux de l’estomac ; celle de derrière s’arrêtait entre les deux épaules. Pour protéger le ventre, on attacha à la ceinture de la cuirasse un système de lames circulaires, articulées à recouvrement. Ce jupon de fer se nommait les laudes. Sur les flancs, on fixa aux faudes des plaques de fer ou tassettes qui descendirent le long des cuisses à la rencontre des cuissards.

L’habileté des batteurs de plates devenant plus grande, ils arrivèrent à forger de grandes pièces d’un seul morceau et l’on vit succéder à la demi-cuirasse dont nous parlions plus haut la cuirasse complète enfermant le corps jusqu’au cou.

Pour fermer les larges échancrures qu’elle présentait aux épaules, on imagina un système de lames articulées, courbées en demi-cercle ; ce fut l’épaulière qui permettait les mouvements des membres supérieurs.

Désormais l’armure est complète et on peut, sur notre gravure, voir les différentes pièces qui la composaient au début du XVe siècle, vers 1410.

Le corps de cuirasse complet en deux pièces formant boîte, très serré à la taille, se continue par une jupe de fer articulée (braconnière ou faudes). Les défauts des aisselles sont protégés par des rondelles. La défense du membre supérieur comprend l’épaulière, le canon d’arrière-bras, la cubitière, le canon d’avant-bras et le gantelet de fer à doigts séparés et articulés.

Le membre inférieur était défendu par le cuissot ou cuissard, la genouillère, la grévière, le soulier ou soleret. Quant à la tête, elle était enfermée complètement dans un bassinet relié à l’armure du tronc par un gorgerin habillant le bas du visage et le cou..

Ce qui frappe le plus, quand on examine les armures, c’est leur sveltesse. On est étonné de voir combien peu d’hommes de nos jours pourraient y entrer.

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