Le hêtre des forêts (Fagus sylvatica) est un grand arbre pouvant atteindre 35 à 40 mètres. Son tronc élancé ne se bifurque qu’à une grande hauteur ; son écorce est lisse et d’un blanc grisâtre ; ses feuilles ovales, ciliées, d’un vert intense, sèchent à l’automne et ne tombent souvent qu’à la fin de l’hiver.
Pline l’Ancien consacre dans son Histoire naturelle tout un chapitre au hêtre « qui s’élève très haut, étend au loin ses rameaux, a un feuillage touffu, épaississant l’ombre », toutes qualités déjà chantées par Virgile.
Le laurier passait autrefois pour préserver de la foudre ; le hêtre semble, d’après de récentes observations, jouir à un degré autrement élevé de cette propriété. D’après une statistique portant sur onze années pour certains territoires forestiers d’Allemagne, la foudre aurait en effet frappé un grand nombre de chênes, beaucoup de pins, de sapins et d’autres essences, mais pas un seul hêtre. Différents forestiers affirment aussi cette immunité du hêtre à l’égard de la foudre.
Le bois de ce bel arbre est très dur et possède une foule d’applications dans l’industrie ; le cœur et l’aubier sont aussi résistants l’un que l’autre, ce qui tient à ce que la couche interne ne possède pas un dépôt de tannin beaucoup plus abondant que la région périphérique.
Chez les Romains, les cendres du hêtre, mélangées à du suif de chèvre, formaient une sorte de savon, dont la Gaule et la Germanie fournissaient de grandes quantités et qui était employé par les élégantes d’alors pour teindre leurs cheveux en blond doré. L’eau oxygénée a détrôné depuis les cendres de hêtre.
Le fruit du hêtre ou faîne, séparé de son involucre épineux à trois valves régulières, sert à faire de l’huile ou entre dans l’alimentation du bétail. Avantageuse pour les animaux de la race bovine, la faîne est refusée par les moutons, elle est nuisible aux chèvres et rapidement toxique pour les chevaux. Dans une expérience récente, un poulain de neuf mois auquel on avait donné, en deux fois à quatre jours d’intervalle, un kilogramme de faînes a été pris de fièvre, de troubles respiratoires et de spasmes à la suite desquels il est mort.
Le hêtre, très abondant dans nos forêts, joue un rôle important dans la décoration des parcs ; il est rustique, croît même à l’ombre et s’accommode de toutes les terres un peu fraîches. Le sol argilo-siliceux est cependant celui qui lui convient le mieux.
Parmi les. variétés les plus communes, on peut citer le F. pendula qui est presque un hêtre pleureur ; ses branches et ses rameaux pendent toujours vers le sol. Le Hêtre pourpré (P. purpura) est un grand arbre dont les feuilles sont, dès leur apparition, d’un rouge foncé, couleur qu’elles gardent jusqu’à l’automne. Elles deviennent presque vertes avant leur chute et ne persistent pas sèches pendant l’hiver. Le F. nivea est une variété fort rare à feuilles parfaitement blanches et le F. variegata possède des feuilles panachées.
Tout un groupe de hêtres, qui comprend des variétés plus ou moins fixées, est connu sous le nom bien mérité de hêtres tortillards.
Les branches sont tordues, repliées en tous sens, affectant les formes les plus bizarres ; elles se dirigent de tous côtés, se contournent tantôt à droite, tantôt à gauche, se replient plusieurs fois sur elles-mêmes de manière à former l’agglomération la plus singulière. Parfois le tronc lui-même est tordu, formant presque une ligne spirale.
Dans la forêt de Verzy, près de Reims, il existe un grand nombre de hêtres tortillards au milieu d’arbres normaux de la même espèce. L’un d’eux, vieux de cinq siècles, car il est désigné comme arbre de ligne de coupe dans un titre du XIVe siècle, n’a pas plus de 2m,50 de circonférence. Ces arbres, qui sont de véritables monstruosités végétales, ont donc une croissance lente et vivent très longtemps. Leurs racines ont, comme on s’en est assuré, une disposition analogue à celle des branches.
Le hêtre tortillard de Dain, près de Metz, est un arbre qui jouit d’une certaine réputation dans la région. Les habitants du pays le nomment Joli Fou et d’assez nombreux promeneurs le viennent voir.
Celui que nous reproduisons est un arbre allemand également très curieux. Il croît sur la Wittekindsberge, non loin de la Weser. Ses branches sont emmêlées d’une façon inextricable et forment des échelons faciles à gravir.
Beaucoup de botanistes considèrent le hêtre tordu ou tortillard comme une variété non persistante du hêtre ordinaire, due seulement à la nature du sol et à l’exposition. Il faut remarquer que cette même particularité, mais à un moindre degré, se rencontre quelquefois dans les acacias, les ormes et les chênes.