Hé oui ! déjà en 1933 l’idée de remplacer une partie de l’essence par de l’alcool était très sérieusement envisagée.
L’accroissement énorme de la consommation d’essence de pétrole, conséquence du développement des moteurs à explosion, a amené de nombreux techniciens à chercher soit des carburants de remplacement, soit des moteurs capables d’utiliser des carburants spéciaux. Ainsi sont nés notamment les gazogènes à charbon de bois et les moteurs Diesel qui sont aujourd’hui couramment employés sur les camions automobiles. Mais, pour l’exigeante voiture de tourisme, il était difficile de supprimer ou même de réduire la consommation d’essence sans restreindre du même coup les commodités d’emploi de ce précieux combustible.
Cependant, de nombreuses recherches ont été orientées dans ce sens et, finalement, on a montré que l’addition d’alcool éthylique à l’essence permet de mieux utiliser celle-ci ; tout en améliorant les conditions de travail du moteur. L’intérêt de ces recherches est particulièrement aigu dans les pays tels que le nôtre où les possibilités de fabrication de l’alcool permettent d’obtenir ce combustible en grande quantité.
Nous utilisons mal l’essence parce qu’elle détone trop facilement
fin d’augmenter le rendement des moteurs, c’est-à-dire afin d’obtenir plus de travail d’un même volume de carburant, les constructeurs sont conduits peu à peu depuis quelques années à augmenter le taux de compression de leurs nouveaux modèles. Cette façon d’agir se justifie, puisque le calcul démontre et que la pratique vérifie (fig. 1) qu’un moteur fournit plus de puissance à partir d’une même quantité de carburant, à mesure que l’on augmente son taux de compression. Cependant, l’on ne peut élever indéfiniment le taux de compression des moteurs sans craindre de voir apparaître, au-delà d’une certaine limite, qui dépend de la nature du carburant utilisé, le phénomène de la « détonation ».
Ce phénomène est caractérisé par le fait que la combustion du mélange explosif, formé par les vapeurs de carburant et l’air, au lieu de se propager avec une vitesse relativement faible (quelques mètres à la seconde) devient, extrêmement rapide (la vitesse de l’onde de combustion atteint alors plusieurs kilomètres par seconde). Les gaz de combustion produits instantanément agissent avec une grande violence sur le piston ; et les calories brusquement dégagées par l’explosion n’ont plus le temps de se dissiper dans l’air ou le métal environnant.
Il s’en suit que le moteur, au lieu de fonctionner avec une souplesse comparable à celle de la machine à vapeur, devient rétif et bruyant ; on dit qu’il « cliquette » ou « cogne », particulièrement en côte.
Il est à peine besoin de dire tout d’abord que les organes du moteur soumis à de telles secousses s’usent exagérément.
Mais il arrive souvent que le phénomène insuffisamment accentué n’est pas perceptible à l’oreille. Toutefois, si on ne l’entend pas, cette « prédétonation », se manifeste encore par des effets thermiques désastreux ; le métal en contact avec les flammes prend un aspect particulier dénommé couramment « métal brûlé ». Il perd beaucoup de sa résistance. Enfin, les parties atteintes par l’onde, telles que parois de la chambre d’explosion, fonds de piston, soupapes, sièges de soupapes, etc… se détériorent très rapidement.
Ce défaut est d’autant plus grave que l’on ne s’en aperçoit qu’au moment où le moteur donne des signes de défaillance et que le dommage est pour ainsi dire consommé.
Or, la plupart des moteurs actuels ont un taux de compression égal ou supérieur à 5, et comme ils sont généralement alimentés avec de l’essence tourisme ordinaire, ils subissent parfois les effets de la détonation et presque toujours ceux de la « prédétonation ». Aussi déplore-t-on souvent leur usure trop rapide.
Comment chiffrer la tendance plus ou moins grande d’un carburant à donner naissance à ce phénomène ?
On utilise à cet effet un moteur spécial à compression variable permettant de comparer deux combustibles donnés : par exemple, un carburant, à examiner et un autre, pris comme carburant type.
Or, parmi,les hydrocarbures obtenus assez facilement à l’état pur, on a remarqué que l’heptane détone avec une extrême facilité, tandis qu’au contraire l’iso-octane résiste très bien à la détonation. On a été conduit ainsi à choisir ces deux carbures comme points extrêmes d’une échelle et à donner la valeur 0 à l’heptane et la valeur 100 à l’iso-octane. Toutes les valeurs intermédiaires comprises entre 0 et 100 sont obtenues aisément par mélange de diverses proportions de ces deux produits.
Si le combustible examiné fournit les mêmes résultats que le mélange contenant par exemple 70 % d’iso-octane et 30 % d’heptane, on dit que le « nombre d’octane » de combustible est de 70. Plus le nombre d’octane est élevé, mieux se comporte le carburant étudié au point de vue de la détonation.
Le tableau suivant donne le « nombre d’octane » de diverses essences.
Essence poids lourd | 45 |
Essence automobile ordinaire | 50 à 55 |
Essence aviation médiocre | 60 à 68 |
Bonne essence d’aviation | 68 à 75 |
Essence mélangée à des antidétonants | 75 à 90 |
L’échelle de valeur antidétonante suivante est généralement adoptée aux États-Unis pour éviter la détonation dans les moteurs d’avions. Elle donne le nombre d’octane minimum en fonction du taux de compression du moteur.
Taux de compression | Nombre d’octane |
5 | 65 |
5 à 5,5 | 73 |
5,5 à 6 | 80 |
6 à 7 | 87 |
Ainsi, il s’avère indispensable d’employer des carburants non détonants ou à « nombre d’octane » élevé. On a essayé, à cet effet, d’améliorer les qualités de l’essence par l’adjonction de produits appelés « antidétonants ».
Les antidétonants usuels améliorent les qualités de l’essence, mais ils provoquent l’accroissement du dépôt de calamine
Parmi les milliers de composés étudiés, le plomb tétraéthyle présente une grande efficacité, même employé à faible dose. Mais la toxicité de ce produit rend dangereuse l’essence-éthyle, à la fois pour l’automobiliste et pour le citadin. Aussi est-elle interdite dans de nombreux pays.
D’autre part, elle dépose plus de calamine que l’essence ordinaire, si bien que l’on déplace le mal sans le supprimer : en effet, les particules charbonneuses très dures, provoquent d’abord l’usure des pièces en mouvement par véritable rodage à la manière de l’émeri, ou, coinçant les segments dans leurs gorges, suppriment le joint souple entre les pistons et les parois des cylindres. En outre, une couche épaisse de calamine finit par constituer un véritable isolant thermique, évite le refroidissement de certaines parties du moteur et peut même provoquer l’auto-allumage par points chauds, phénomène dont les effets sont aussi désastreux que ceux causés par la détonation.
On a pensé également soit à additionner l’essence de benzol, soit à utiliser des essences de pétrole, telles que les essences de Bornéo ou de Roumanie naturellement riches en carbures benzéniques. Ainsi ont pris naissance les supercarburants connus actuellement sur le marché. Mais la combustion des carbures benzéniques comporte malheureusement un très important dépôt de carbone.
La solution était donc incomplète puisque tous ces « supercarburants » n’avaient pas la calamine qui, elle aussi, peut provoquer le cognage. C’est alors que l’on a songé à l’alcool éthylique qui, essayé depuis longtemps déjà comme carburant, devait apporter à l’essence les qualités qui lui manquent.
L’alcool communique à l’essence des propriétés à la fois antidétonantes et anticalaminantes
L’idée d’employer l’alcool comme carburant remonte à une trentaine d’années, mais les débuts ont été malheureux, car on en connaissait mal les qualités. Il a fallu les difficultés économiques de l’après-guerre pour que des savants comme M. D. Berthelot, M. Dumanois (inspecteur général de l’Aéronautique, directeur des services techniques de l’Office National des Combustibles liquides), le professeur Hubendick en Suède, le professeur Warziniock en Pologne, le Dr Dietrich de Berlin, etc … arrivent à mettre en lumière les avantages de l’essence alcoolisée.
Parmi ces avantages, les propriétés antidétonantes et anticalaminantes de l’alcool le placent en tête de tous les carburants connus actuellement. Pratiquement, on ne peut arriver à faire détoner l’alcool et, s’il était consommé seul dans un moteur dont le taux de compression atteindrait 13, il donnerait des résultats surprenants, malgré son faible pouvoir calorifique. Comme on ne peut songer à employer des moteurs spéciaux pour utiliser l’alcool, on a envisagé l’emploi de mélanges d’alcool et d’essence. La courbe de la figure 2 indique le nombre d’octane de ces mélanges en fonction de leur concentration en alcool.
Elle montre que les mélanges contenant seulement 20 pour 100 d’alcool, dont le nombre d’octane dépasse 80, conviendraient parfaitement aux moteurs à taux de compression supérieur à 6, qui deviennent de plus en plus nombreux. Mais l’expérience montre aussi que les moteurs de série, au taux de compression voisin de 5 fonctionnent bien mieux avec l’essence alcoolique qu’avec l’essence pure. Leur consommation diminue et leur puissance augmente comme le montre le tableau suivant, résumé d’essais effectués par le professeur Warzinioek à l’aide d’un moteur au taux de compression de 4,9
Carburant (composition volumétrique) | Moyenne de la puissance fournie entre 1300 et 1700 tours-minute | Moyenne de la consommation en g.ch.h entre 1300 et 1700 tours-minute |
Essence pure | 29,95 | 298,6 |
95 % essence — 5 % alcool | 30,1 | 274,7 |
85 % essence — 15 % alcool | 30,41 | 282,4 |
75 % essence — 25 % alcool | 30,6 | 237,2 |
65 % essence — 35 % alcool | 30,49 | 285,5 |
Les garagistes connaissent bien les propriétés de l’alcool comme décalaminant, car ils ont maintes fois l’occasion de l’utiliser pour le nettoyage des moteurs encrassés. Grâce à cette activité de l’alcool, due sans doute à l’oxygène qu’il possède dans sa molécule, les carburants qui en contiennent une proportion suffisante ne déposent pas de calamine dans les moteurs. Pour mettre en lumière cet avantage, le Monopole de l’alcool en Pologne a fait effectuer l’essai suivant : une voiture Chrysler de série a parcouru, sans arrêt du moteur, 20044 km avec 3656 litres de carburant contenant 70 pour 100 d’essence et 30 pour 100 d’alcool. A la fin du parcours on n’a remarqué sur les pistons et soupapes qu’un très faible dépôt de carbone, qui ne présentait, en aucune façon, la dureté de la calamine déposée habituellement.
Quelques autres avantages de l’alcool
Nous ne pouvons passer sous silence quelques au qualités qui, sans avoir l’intérêt de celles qui viennent d’être exposées, contribuent néanmoins à faire de l’alcool un adjuvant indispensable de l’essence utilisée à l’alimentation des moteurs.
L’alcool évite le givrage intérieur, cette formation de glace due à la condensation de l’humidité atmosphérique sur les parois intérieures de la tuyauterie d’aspiration et qui peut provoquer l’arrêt du moteur, faute d’alimentation.
Augmentant le rendement de transformation des calories de l’essence en travail, il diminue le dégagement de chaleur ; le moteur chauffe moins, se trouve mieux lubrifié et s’use moins rapidement.
L’alcool, parfaitement miscible à l’eau, permet à l’essence alcoolisée de dissoudre les gouttes d’eau qui peuvent tomber accidentellement dans les réservoirs des voitures. Le moteur ne cessera pas de tourner, tandis qu’il s’arrêtera net s’il est alimenté avec de l’essence pure lorsque cette eau non miscible à l’essence parviendra au carburateur.
Enfin, l’alcool rend l’essence conductrice de l’électricité, ce qui améliore la sécurité des entrepôts d’essence où des décharges d’électricité statique ont souvent provoqué des incendies.
Une formule récente : le mélange ternaire essence-benzol-alcool
Le benzol, sous-produit de la distillation de la houille est, comme l’alcool, un produit national. Étant donné qu’il possède un nombre d’octane très supérieur à l’essence et un fort pouvoir calorifique, il constitue un excellent carburant utilisé depuis longtemps pour donner à l’essence des qualités antidétonantes.
M. l’inspecteur général Dumanois a montré, à la récente Exposition internationale de l’Aéronautique, les qualités que possèdent les carburants ternaires à hase d’essence, d’alcool et de benzol comme carburants d’aviation.
Tout en faisant ressortir leur valeur antidétonante et anti-calaminante « qui peut prolonger cinq fois la vie d’un moteur », il a montré leur tolérance vis-à-vis de l’humidité et les avantages qu’ils présentent au point de vue de la suppression des gommes, et surtout du givrage dont les conséquences sont terribles pour l’avion.
Ces mélanges ternaires peuvent être utilisés avec succès par l’automobile et les courbes (fig. 3), dues à M. Dumanois, montrent la différence de consommation d’un même moteur quand il passe de l’essence pure au mélange : essence 65 vol., éthanol (alcool éthylique) 15 vol., benzol 20 vol.
Il est juste de dire que cette diminution de la consommation ne peut être observée qu’avec des moteurs à taux de compression supérieur à 5. Dans les moteurs à faible taux de compression, en effet, la dépense de ce carburant est comparable à celle de l’essence. Ainsi le tableau suivant résume quelques essais effectués sur un moteur Bauche de 12 ch au taux de compression de 4,5 en utilisant le « Serco » comme carburant ternaire à base d’alcool.
Nombre de tours | 1.400 | 1.300 | 1.200 | 1.100 | 1.000 | 900 |
Essence — gicleur 75 | 0,39l | 0,40l | 0,40l | 0,45l | 0,48l | 0,50l |
Serco — gicleur 75 | 0,38l | 0,40l | 0,43l | 0,45l | 0,48l | 0,49l |
Serco — gicleur 80 | 0,40l | 0,40l | 0,42l | 0,46l | 0,50l | 0,49l |
Par contre, les moteurs de fabrication récente, dont le taux de compression dépasse 5, peuvent fournir à consommation égale des kilométrages supérieurs à ceux obtenus avec l’essence quand ils utilisent ces carburants ternaires.
Le XIIIe concours du bidon de cinq litres, disputé à la Ferté-Bernard (Sarthe) fin septembre de l’an dernier, a donné à ce point de vue des résultats significatifs.
Chaque concurrent a parcouru d’abord le plus grand nombre possible de km avec un bidon de cinq litres d’essence. Puis, il a recommencé l’épreuve, sans rien changer à la voiture, en utilisant cette fois le carburant ternaire composé de 15 pour 100 d’alcool, 15 pour 100 de benzol et 70 pour 100 d’essence.
Nous indiquons ci-après les km parcourus par le premier de chaque catégorie.
Catégories | Noms | km parcourus avec l’essence | km parcourus avec le carburant ternaire |
Voiture de tourisme | |||
jusqu’à 5 ch. | Quéru(Rosengart) | 104,085 | 106,039 |
6 à 7 ch. | Buisard (Fiat) | 86,136 | 9O,606 |
11 à 15 ch. | Callerot (Hotchkiss) | 36,963 | 44,561 |
Voitures utilitaires | |||
charge utile 200 | Bachelier (Rosengart) | 113.446 | 120,616 |
— — 400 | Dordoigne (Rosengart) | 94,574 | 95,738 |
— — 1400 | Vaudolon (Citroën) | 13,636 | 33,880 |
Classement général | |||
Au plus grand nombre de km voyageurs | Kempf (Mathis) | 66,182 | 74,386 |
Au plus grand nombre de tonnes kilométriques | Emry (Peugeot) | 58,670 | 63,536 |
Ces résultats se passent de commentaire.
En définitive, les carburants à base d’alcool, soit binaires, soit surtout ternaires, sont techniquement supérieurs à l’essence tourisme. Ils permettent notamment, de prolonger la vie du moteur en diminuant la dépense kilométrique de carburant.
Le régime actuel de l’alcool en France
La plus grande partie de l’alcool destiné à la carburation est obtenue, en France, par fermentation des jus sucrés extraits de la betterave, soit directement, soit par l’intermédiaire des mélasses.
La technique de la fermentation, permettant d’obtenir des « vins » en solutions alcooliques diluées, a bien subi quelques perfectionnements depuis les découvertes de Pasteur, mais ce sont surtout les procédés de distillation employés à l’« épuisement » des « vins » et à la purification de l’alcool qui se sont améliorés sensiblement au cours de ces dernières années. On ne pouvait obtenir autrefois, après plusieurs opérations successives, nécessitant chacune une forte dépense de combustible, qu’un produit contenant 96 % d’alcool et 4 % d’eau. Maintenant, un seul appareil à distiller est capable d’extraire directement, à l’état pur et anhydre, l’alcool contenu dans les vins les plus dilués.
On peut dire que, sans être fabricant, l’État a le monopole de l’alcool absolu et, d’une façon plus générale, de l’alcool dit « industriel » [1]. Il achète en effet cet alcool aux distillateurs et le revend aux usagers à des prix variables selon l’emploi auquel il est destiné. L’alcool absolu destiné à la carburation est devenu le plus important des débouchés de l’alcool industriel, mais l’État, pour accroître ce débouché parallèlement au développement de la fabrication de l’alcool industriel, s’est trouvé dans l’obligation de réduire sensiblement le prix de l’alcool destiné à la carburation. Ainsi s’est posée la question de l’équilibre financier du Service des Alcools ; Cet équilibre est assuré d’une part, grâce au prix de vente élevé de l’alcool destiné à certains usages (vinage mutage des vins, fabrication des vinaigres, parfumerie, produits chimiques, etc.), d’autre part, moyennant une taxe sur les essences de pétrole.
En vue même d’assurer définitivement cet équilibre sur des bases précises, le Parlement vient de voter une loi qui contingente la production de l’alcool de betteraves. Mais cette mesure ne s’est révélée indispensable avec une telle acuité qu’en raison du bas prix fixé actuellement pour l’alcool destiné à l’alimentation des moteurs.
Or, nous avons mont.ré que loin d’être un carburant de rebut, l’alcool est un excellent carburant qui est introduit aujourd’hui, légalement, en proportion de 11 à 20 % dans les essences de tourisme et qui surtout, est susceptible d’entrer dans la composition de supercarburants.
Lorsque l’alcool sera enfin apprécié à sa réelle valeur, il semble que l’État pourra relever progressivement le prix de vente de l’alcool destiné à la carburation. Il n’en résultera pour l’usager qu’une augmentation insignifiante du prix du bidon de carburant, augmentation largement compensée par les avantages de toute nature. Mais, par contre, le Service des Alcools, se trouvant devant une situation financière assouplie, pourra largement développer ses achats d’alcool absolu pour le plus grand bien de tous : consommateurs, distillateurs, agriculteurs.
Le problème a d’ailleurs été résolu dans ce sens dans différents pays étrangers, en Allemagne, en Suède, en Italie, où les supercarburants sont tous à base d’alcool.
Les diverses sources permettant d’obtenir l’alcool à bas prix
Il est possible, enfin, d’envisager dans l’avenir la production de l’alcool plus économiquement qu’à partir de la betterave. Dans le domaine des procédés de fermentation, on sait que de nombreuses plantes de nos colonies peuvent subir la fermentation alcoolique. Citons, notamment, l’agave sisal, l’asphodèle, le palmier dattier, végétaux extrêmement vivaces qui ne demandent aucun soin cultural.
D’un autre côté, la saccharification du bois arrive enfin au stade industriel et des usines se montent actuellement en Europe centrale pour fabriquer l’alcool de cellulose.
N’oublions pas, enfin, l’alcool de synthèse, qui a fait son apparition il y a quelques années. Il s’obtient par traitement spécial de l’éthylène dégagé des fours pendant la distillation de la houille (fig. 6 et 7). Son prix de revient n’atteint pas celui du benzol.
Conclusions
L’alcool convient donc parfaitement comme adjuvant de l’essence. Il permet de tirer un meilleur profit de celle-ci tout en évitant l’usure du moteur parce qu’a supprime la détonation et le calaminage. Son usage permet également de diminuer les importations d’essence d’une quantité légèrement supérieure au volume d’alcool consommé, puisqu’à égalité de travail on dépense moins d’essence alcoolisée que d’essence pure.
Dans l’avenir, en augmentant à la fois le taux de compression des moteurs et la proportion d’alcool dans le carburant, on aura le moyen de diminuer davantage encore la consommation d’essence étrangère.
Les découvertes et les perfectionnements apportés dans le domaine de l’industrie de l’alcool, et surtout le nombre et la diversité des matières premières utilisables à sa fabrication entraîneront peu à peu l’abaissement du prix de revient de l’alcool.
Enfin, sans envisager qu’il puisse remplacer intégralement les produits du sous-sol, ne peut-on pas affirmer que l’alcool, qui représente de l’énergie solaire sans cesse captée par les plantes, est mieux que l’essence, un carburant d’avenir, les réserves naturelles de pétrole, sans doute très grandes étant nécessairement limitées.
Quoi qu’il en soit, dans l’état actuel de la question, le mélange alcool-essence s’impose de plus en plus, et c’est pourquoi l’usage de l’alcool tiré des produits de notre sol, qui permettra de résoudre le problème des carburants d’une façon quasi inespérée, se développe rapidement en France et dans tous les pays du monde, malgré toutes les résistances qui lui ont été opposées.
Armand Courtier