La Valériane officinale ( Valeriana officinalis L. Valérianacées paraît tirer son nom du latin « valere » être en bonne santé. Elle a pour synonymes : Valériane sauvage, Herbe aux chats, Herbe de Saint-Georges, Herbe à la meurtrie. Il existe d’autres espèces dont les deux plus connues sont : la Valériane Phu ou grande valériane ( Valeriana Ph) et la Valériane des marais ou Valériane dioïque ( Valeriana dioica). Mais bien qu’elles aient, à peu près, les mêmes propriétés que la Valériane officinale, elles ne sont guère employées.
Habitat. — Très répandue en France, elle croît surtout sur le bord des ruisseaux, des fossés, dans les bois humides, mais parfois aussi au bas des coteaux, dans une terre sèche et sablonneuse qui influe sur la coloration des racines. Elle est cultivée depuis quelques années dans le Nord et un peu sur les bords de la Loire.
Description sommaire. — Plante vivace, à tige florifère atteignant jusqu’à i m. 5o de hauteur. Racine tronquée brune en dehors, blanchâtre en dedans, inodore à l’état frais, mais prenant par la dessiccation une odeur très désagréable qui plaît beaucoup aux chats et lui a valu un de ses synonymes. La souche forme des stolons nombreux pouvant donner autant de plantes nouvelles. Feuilles opposées, les inférieures pétiolées, les supérieures sessiles, très découpées en segments nombreux et dentés. Fleurs (juillet-août), d’un blanc rosé, réunies en corymbes au sommet de la tige, à odeur agréable. Corolle infundibuliforme, à limbe évasé. Fruit (achaine) couronné par une aigrette plumeuse.
Culture. — La valériane croît dans tous les sols ; toutefois, elle préfère ceux qui sont frais, aussi doit-on choisir les terrains bas non inondés et peu ensoleillés. Si le Jardin familial possède un endroit un peu humide on le lui accordera de préférence, et, s’il se trouve un fossé dans la ferme, l’on en garnira les bords.
Multiplication. — Elle a lieu de deux façons : par semis et par éclats de souche, mais la première est bien plus longue que la seconde qu’il convient de préférer pour la rapidité de la production. On consultera avec avantage pour la culture de cette plante (10 hectares lui sont attribués à Etrechy sous la direction de M. J. Demilly) le livre de MM. A. Goris et J. Demilly, La culture des plantes médicinales. En voici un résumé.
Par semis. — Vers le mois de juillet, récolter dans une bonne plantation les graines provenant d’exemplaires vigoureux et donnant un poids supérieur de racines. Prendre les précautions nécessaires, car les graines très petites et munies d’une aigrette de poils s’envolent rapidement. Les semer immédiatement sur un bon sol que l’on conservera, autant que possible, humide. Semer sur des planches pour que le travail soit plus facile et ne recouvrir les graines que très légèrement de terre. La germination se fera pendant l’automne et les plants continueront à végéter au cours du printemps. On aura de cette façon, vers le mois d’août de l’année suivante, des touffes déjà d’une certaine vigueur qui pourront alors être replantées à l’automne, mais ce procédé fait perdre un an au point de vue de la récolte, si on le compare à l’emploi de souches.
Par éclats de souches. — Sur un sol bien préparé, effectuer, vers le 1er octobre, la plantation de la façon suivante. Diviser les souches de valériane arrachées dans les bois ou, de préférence, dans une bonne culture, pour avoir du beau plant. Laisser à chaque segment un œil bien constitué muni de racines à sa base. Une souche de valériane pourra donner suivant sa force 15 à 20 petits plants. Les planter immédiatement en plein champ à o m. 30 en lignes et à o m. 8o d’écartement, en se servant soit de la charrue, soit d’une pioche, à o m. 10 de profondeur. Recouvrir le plant par un léger hersage, puis rouler pour que les racines adhèrent au sol. Dans le Jardin familial un gros plantoir adroitement manié suffira. On donnera ensuite les soins culturaux nécessaires, binages et sarclages, pour empêcher l’envahissement par les mauvaises herbes.
Récolte. — D’après M. J. Demilly, il faut procéder à l’arrachage des racines au mois d’octobre-novembre qui suit la plantation, parce que, d’une façon générale, il faut cultiver la valériane comme une plante annuelle. C’est à tort qu’on pourrait croire que les souches prennent chaque année un plus grand développement et donnent une récolte de racines de plus en plus abondantes. Il n’en est rien, parce que la tige élancée formée au moment de la floraison se fane et, en se détruisant, amène la destruction de toutes les racines qui avaient servi à son développement. Mais comme cette tige florifère ne se forme que sur des souches de deux ans, si l’on arrache les racines la première année, elles seront naturellement plus abondantes. Néanmoins, certains auteurs sont d’avis de préférer les racines de trois ans au moins. Arrachées à la pioche, les racines doivent être nettoyées aussitôt à l’eau courante. Cette opération est très simple quand elles proviennent d’un terrain sablonneux, mais devient très difficile lorsqu’elles ont poussé dans un sol argileux ; il faut alors les faire tremper quelque temps auparavant pour que la terre se détache mieux.
Séchage. Rendement. Conservation. — On étale les racines en couche mince sur des claies placées dans un grenier ou un hangar très aéré et l’on a soin de les remuer fréquemment. Lorsque les racines sont trop grosses on les fend en deux. La dessiccation ainsi faite est lente et demande au moins une quinzaine de jours ; aussi, quand la récolte est importante, vaut-il mieux recourir à un séchoir à air chaud. On estime que le rendement de 10 kg de racines fraîches varie entre 2 kg 5oo et 2 kg 890 de racines sèches. La conservation s’effectue dans des sacs ou des caisses placés dans un local très sec et bien aéré. La durée ne doit pas dépasser une année.
Composition chimique. — Pendant longtemps on a estimé que la racine de valériane ne contenait que : acide valérianique, huile essentielle, matière insoluble dans l’alcool, gomme, ligneux et sels, mais depuis les travaux de MM. J. Chevalier et G. Pouchet, on sait que l’acide valérianique n’existe que dans la plante sèche où il se forme, sous l’influence d’une oxydase, un glucoside et un alcaloïde qui sont partiellement détruits par la dessiccation. L’action de la valériane est due, non à l’acide valérianique, mais aux éthers du bornéol et surtout à l’alcaloïde et au glucoside.
Propriétés thérapeutiques. — La racine de valériane a été considérée, peut-être à tort, par les Anciens, comme guérissant l’épilepsie ; aujourd’hui, on la reconnaît surtout comme un puissant antispasmodique possédant une réelle action dans les névroses, l’hystérie, les états neurasthéniques. On l’a préconisée aussi comme vermifuge et fébrifuge. D’après certains auteurs, la valériane, à petite dose, augmente l’action des organes digestifs, à dose moyenne, elle excite le système nerveux et, à dose trop élevée, elle provoque la sueur et peut occasionner des vertiges et des migraines.
Préparations pharmaceutiques. — Les nombreuses préparations contenues dans les formulaires reposent encore en grande partie sur l’emploi de la racine sèche. A l’intérieur : extrait 1 à 10 gr. en pilules ; infusion 10 gr. pour r 000 ; poudre 1 à 20 gr. ; sirop 20 gr. ; teinture alcoolique à 20 gr. ; teinture éthérée 2 à 5 gr. A l’extérieur ; décocté 30 gr. pour 1 000. Depuis les travaux de Bourquelot, Goris, Perrot, Arnoud, etc., sur la stérilisation ou stabilisation des plantes médicinales, et depuis que l’on connaît l’altérabilité des principes de la valériane pendant sa dessiccation, il faut préférer les préparations obtenues avec la racine fraîche stabilisée dont voici les principales : extrait mou 1 à 3 gr. ; extrait fluide 10 à 15 gr. ; intrait 0gr. 20 à 0gr. 60 ; alcoolature 2 à 10 gr. ; eau distillée 20 à 40 gr. Cependant, si l’on ne dispose que de racine sèche, le Dr H. Leclerc conseille, non son infusion, mais sa macération à la dose de 10 gr. pour un verre d’eau froide ; laisser en contact 1 2 heures. La poudre de racine est encore utilisée dans la médecine vétérinaire aux doses suivantes : 15 à 30 gr. pour le cheval, 30 à 8o gr. pour le bœuf, 5 à 10 gr. pour le mouton et le porc et 0gr. 50 à 3 gr. pour le chien, sous forme de breuvages, d’électuaires ou de lavements contre certaines maladies nerveuses.
Observations commerciales. — La consommation et la vente de la valériane à l’état sec sont toujours très grandes. Avant la guerre nous en importions des quantités notables de la Belgique et de l’Allemagne, aussi sa culture a-t-elle été conseillée, en première ligne, par la Feuille d’Informations du Ministère de l’Agriculture dans ses numéros des 11 juillet et 7 novembre 1916. Cet organe eu avait alors établi le prix à 0 fr. 45 le kilogramme avec la mention « vente forte ». Ce prix a été souvent dépassé depuis ; en 1924, l’herboristerie en gros a payé les racines sèches 2 fr. 25 à a fr. 50. Il y a donc un réel intérêt à cultiver cette plante en grand, et d’en proposer la vente à l’état frais, maintenant que l’activité des préparations faites avec les racines fraîches est bien établie comme supérieure à celle des produits obtenus avec les racines sèches.