Ce moteur nous arrive de Munich et, au dire de la revue viennoise die Zeit, sa découverte doit révolutionner l’industrie mécanique. Du reste son inventeur, M. Rudolphe Diesel, n’est pas un inconnu pour les technologistes. Il a publié, en 1893, un ouvrage assez remarqué, Theorie und Construction eines rationellen Wärmemotors, sans lequel il émettait des idées fort originales sur la combustion. Aujourd’hui, quittant les brumeuses régions du rêve, ce chercheur serait parvenu à construire une machine utilisant 28 à 30 pour 100 de la chaleur fournie soit le double environ du rendement habituel.
Empressons-nous donc de signaler cette invention pendant que les périodiques d’outre-Rhin la placent au Capitole. Quelques semaines de retard nous exposeraient peut-être à la trouver au bas de la Roche Tarpéienne !
Voici, d’après la récente communication de M.Diesel à l’assemblée annuelle des ingénieurs allemands, les principes qui l’ont guidé et la description sommaire de son appareil.
Dans toute combustion, il faut distinguer la température d’inflammation de la chaleur de combustion et s’inquiéter surtout de la seconde. Un exemple banal fera ressortir cette différence. Si on allume une allumette en la frottant, on développe une chaleur de 18-20 degrés, tandis que la réaction chimique de la combustion élève la température de 1000 degrés. En outre, il est plus avantageux de produire cette température avant la combustion et indépendamment d’elle. Pour atteindre ce but, le constructeur bavarois comprime mécaniquement l’air à la pression de 45 atmosphères dans un cylindre, puis il injecte, d’une façon régulière, la matière combustible (pétrole, gaz ou charbon pulvérisé) dans la masse gazeuse surchauffée.
Le moteur comprendra généralement trois cylindres : un d’expansion et deux de combustion, placés à droite et à gauche de celui-ci. Le premier est pourvu à la partie inférieure d’une pompe à air. Quant aux deux autres, ils reçoivent la substance à brûler dans un réservoir renfermant de l’air, comprimé nécessairement à une pression supérieure, et, grâce à un dispositif spécial, la combustion est isothermique.
Cependant le type réalisé est une machine verticale d’une puissance de 20 chevaux et à un seul cylindre communiquant avec un réservoir en acier où se trouve de l’air à 45 atmosphères. Ce récipient permet d’injecter le pétrole dans le cylindre de travail et il est alimenté par une pompe de compression. Sa consommation serait de 250 grammes de pétrole par heure et par cheval. Une fois même elle aurait été seulement de 234 grammes. La densité du pétrole employé était 0,795 et son pouvoir calorifique 10.206 calories. La mise en marche se produirait facilement par l’ouverture d’un simple robinet placé entre l’accumulateur à gaz et le cylindre. C’est un avantage qu’on appréciera pour les tramways et les automobiles. Enfin, d’après le professeur Schröter, la combustion s’effectuerait parfaitement, les gaz dégagés ne sentiraient « presque » rien, le fonctionnement serait très doux et le rendement aussi économique pour les petits que pour les grands modèles.
M. Diesel s’occupe actuellement d’essayer à Augsbourg une machine de 150 chevaux dont les qualités seraient encore plus merveilleuses. Attendons pour y revenir d’avoir des renseignements plus complets car, tout en souhaitant la confirmation d’une telle découverte, il est prudent de se rappeler l’hémistiche du poète : Timeo Danaos et dona ferentes…