L’abbé Jean Caselli dont il a été très souvent question en France il y a un quart de siècle, vient de mourir dans un hôpital de Florence à l’âge de soixante-dix-sept ans.
Cet électricien distingué est né à Sienne. Il a fait son éducation à Florence sous la direction du célèbre Nobili. Son premier travail scientifique fut l’éloge de son maitre. Ce travail lui valut l’honneur d’être nommé membre de la Société scientifique de cette ville. Bientôt après il reçut le diaconat et entra comme précepteur dans la maison du comte San Vitale appartenant à l’une des grandes familles de Parme. En 1848, il participa au mouvement national et vota pour l’annexion du duché de Parme à la monarchie constitutionnelle de Charles-Albert.
La défaite de Novarre ramena les Autrichiens dans les duchés, et l’abbé Caselli dut se réfugier en Toscane, où il s’occupa de travaux électriques avec l’aide de son frère Louis.
C’est alors qu’il conçut l’idée d’un télégraphe autographe transmettant les dessins et les écrits à l’aide d’un système des plus ingénieux, que M. Figuier a très-bien décrit dans les chapitres de ses Merveilles de la Science consacrés au télégraphe.
L’abbé Caselli arriva à Paris où son confrère l’abbé Moigno dirigeait le Cosmos, journal scientifique déjà très répandu. L’abbé Moigno entreprit avec ardeur la propagande du système Caselli, qui était du reste une merveille d’ingéniosité. L’abbé poussa l’enthousiasme jusqu’à aller à Newcastle, où se tenait la session de 1864 de l’Association britannique, pour présenter le télégraphe Caselli à cette Société.
L’appareil fut mis en expérience sur la ligne de Marseille et produisit des résultats surprenants. Le Corps législatif et le Sénat s’empressèrent de voter un projet de loi proposé par le gouvernement qui demandait l’autorisation de traiter avec l’abbé Caselli et d’établir une surtaxe sur les dépêches autographes.
En 1865 un décret impérial parut, autorisant l’usage du Pantélégraphe sur les lignes de Lyon et du Havre. Le prix des télégrammes autographes était fixé à 20 centimes le centimètre carré.
Malheureusement le public n’apprécia pas les avantages de l’autographie, dont on peut certainement se passer. Personne ne prit de télégrammes autographes, et l’invention tomba.
En Angleterre, le voyage de l’abbé Moigno avait été inutile. Les compagnies avaient deviné l’issue financière des tentatives de Lyon et du Havre.
L’abbé Caselli ne fut pas plus heureux en Russie où il avait signé un traité semblable à celui qui le liait au gouvernement français. Il arriva à son système ce qui arrivera infailliblement à la télégraphie électrique en général, laquelle est en voie d’être supplantée par la téléphonie, de telle sorte qu’on aperçoit sa ruine complète.
La gloire de l’abbé Caselli ne put résister à cette épreuve, qui ne détruisait pas le mérite de ses combinaisons. Il tomba dans l’oubli. La construction d’un moteur électro-magnétique entreprise aux frais de la cassette impériale, et l’invention d’un gouvernail électrique ne purent le tirer de l’oubli.
Ajoutons qu’il a été président de la Société scientifique de sa ville natale, et qu’au commencement de sa carrière il fut journaliste scientifique à Florence. Il rédigea dans cette ville, pour le compte de la maison Lemonnier, un journal de vulgarisation sous le titre de La Récréation.