Messieurs [1],
L’année dernière, à pareille époque, je vous faisais pressentir l’invasion du choléra épidémique en Europe ; mes craintes étaient malheureusement trop fondées. Le fléau indien, après avoir frappé ses premiers coups à Toulon, s’est étendu, en France, sur le littoral méditerranéen et la base des Pyrénées ; d’autre part, en Italie et en Espagne. De plus, il a été signalé récemment à Yport, près de Fécamp, ainsi qu’à Nantes ; il est à Paris. J’aurai soin, dans les circonstances actuelles, de vous parler du passé et du présent de la redoutable pandémie et d’appeler votre attention d’une manière spéciale sur la prophylaxie et le traitement.
Je vais vous exposer pendant un semestre l’Histoire des principales découvertes en médecine et en chirurgie. Vous apprécierez comment elles se sont produites, et quelles difficultés il a fallu surmonter pour que la vérité arrive au jour, après des périodes d’erreur et de tâtonnement. Pour rendre à chacun sa part de mérite ou de gloire, je vous présenterai la biographie de plusieurs penseurs et travailleurs des temps anciens et modernes. Je vous montrerai les ouvrages qu’ils ont laissés et qui sont des monuments impérissables.
Depuis quelques mois, la Faculté a vu se produire dans ses rangs deux vides regrettables. Le professeur Adolphe Würtz nous a été enlevé plein de force et d’activité. Vous connaissiez tous son infatigable ardeur et sa bienveillance. Würtz avait une autorité incontestée ; il s’est illustré par la découverte des urées composées, des premiers alcaloïdes artificiels. Ses travaux ont contribué largement aux progrès de la chimie et de la physiologie ; ses écrits ont exposé d’une manière élégante et claire la théorie atomique.
Nous possédons encore M. le professeur Léon Gosselin, mais vous ne le trouverez plus dans les salles de clinique et à l’amphithéâtre de la Charité, car il a pris prématurément sa retraite. Qu’il me soit permis d’adresser de cette place, en votre nom et au mien, un respectueux et affectueux souvenir à notre cher et excellent maître. Si l’écho de mes paroles parvient jusqu’à lui, qu’il lui apporte le témoignage de notre vive sympathie et nos vœux pour le rétablissement de sa santé.
Je vous parlerai aujourd’hui de Celse et de ses œuvres. Celse est un auteur de premier ordre ; son traité est la première collection médicale qui nous soit parvenue quatre siècles après les Livres hippocratiques. Il nous a fait connaître une grande partie de ce que nous savons, non seulement sur l’état de la médecine et de la chirurgie à Rome, mais encore en Grèce et surtout à l’école d’Alexandrie.
I.
Suivez sur une carte la marche de notre science depuis les écoles rivales de la grande Grèce, Cos dans son île et Cnide sur le continent. La médecine émigre une première fois vers Alexandrie, si bien placée entre l’Asie et l’Afrique, capitale des contrées conquises par le
Macédonien Alexandre, le disciple d’Aristote. C’est là que les progrès de l’anatomie donnent une impulsion incomparable et une hardiesse étonnante à la chirurgie alexandrine. Puis, l’Égypte étant devenue une province romaine, la médecine émigre une seconde fois et vient à Rome, nouvelle capitale du monde.Mais, avant l’arrivée des médecins grecs, les Romains avaient-ils une médecine autochtone ? Nous examinerons soigneusement cette question. Je puis vous assurer dès à présent que les médecins en renom qui ont exercé à Rome étaient tous Grecs de naissance, et si leurs noms ont été latinisés ou s’ils ont pris des noms nouveaux, c’est par suite du droit de cité qu’ils avaient acquis.
Celse et Pline sont deux historiens et deux auteurs médicaux remarquables ; le premier, résumant en un beau langage la médecine ancienne ; le second, patient compilateur, d’un style énergique, rapportant d’innombrables extraits d’anciens médecins, ainsi que de formules et de recettes populaires. Nous devons à leur érudition une foule de renseignements qui sans eux eussent été absolument perdus. Étudions particulièrement l’œuvre de Celse.
Et d’abord, que savons-nous du célèbre auteur latin ? Me sera-t-il possible de vous raconter sa vie, d’insister sur les épisodes de sa carrière, de vous dire comment il a composé ses ouvrages ? Non, messieurs. Celse n’est qu’un surnom : Celsus, qui signifie élevé, haut, grand, et nous ne savons ni où il est né, ni où il a vécu. Il y a plus, on discute sur la profession qu’il a exercée. Était-il médecin, agriculteur, légiste, rhéteur ? A-t-il suivi les armées romaines ? A-t-il été secrétaire d’un prince ? Toutes ces suppositions ont été faites, soutenues même par des critiques habiles ; en définitive, elles prou vent une seule chose, c’est que nous ne possédons rien de sür concernant la personne de Celse. Actuellement, au lieu d’accroître la somme de notions que nous possédons sur lui, nous arrivons à la restreindre.
Cherchons néanmoins à connaître le vrai nom. la patrie de Celse, les ouvrages qu’il a composés.
On lit sur le titre de la plupart des éditions du Traité de ln médecine (De Te medica), ainsi qu’en tête de plusieurs manuscrits, mais les moins anciens : Aurelius Cornelius Celsus. Rhodius, et après lui Daniel Leclerc, ont douté que Aurelius, étant un nom de famille, eût pu être employé comme prénom. Jamais, dans les habitudes romaines, les deux noms des familles Aurélie et Cornélie n’auraient été réunis ensemble. Beaucoup de manuscrits portent la lettre A ; Leclerc pensait que le mot Aurelius avait dû être mis d’après cette initiale et répété d’édition en édition. L’examen d’un manuscrit trouvé au Vatican et plus ancien que tous les autres nous a donné le véritable prénom de Celse : Aulus. Enfin, Bianconi montre que ce prénom Aulus était très commun dans la famille Cornélie. Les trois noms en usage chez les Romains libres font penser que Celse n’était pas d’une origine obscure. Ou sait que, pendant la dictature de Sylla, plusieurs milliers de personnes furent autorisées à prendre le nom de Cornelius. J’ajouterai que Columelle et Pline, qui citent souvent Celse, le désignent sous le nom de Cornelius Celsus. Au reste, Celsus était un surnom l’épandu.
Beaucoup de personnages ayant marqué dans les sciences, le droit, la rhétorique, l’on t porté. Celse, ayant écrit sur tous ces sujets, a été confondu facilement par ses biographes avec des auteurs différant de lui par leur position et même par le temps où ils vivaient.
Quelle est la patrie de Celse ? Ludovico Ricchieri, latinisé sous le nom de Cælius Rhodiginus, et qui écrivait au commencement du XVIe siècle, a dit que Celse était de Vérone, sans donner de motifs suffisants, et parce que les habitants de cette ville revendiquaient l’honneur de l’avoir pour compatriote. Kühnoltz, avec Rousseus et Fabricius, ont regardé Celse comme Romain de naissance, mais en avouant qu’ils n’ont aucun document authentique à cet égard. Il paraît probable que Celse a séjourné à Rome.
A quelle époque Celse a-t-il vécu ? On a parlé des règnes d’Auguste, Tibère, Caligula ; Rhodius, dans sa Vita Celsi, de Néron jusqu’à Trajan, de l’an 68 jusqu’à l’an 98 de notre ère. Cette opinion est insoutenable. Pline l’Ancien, mort en 79, pendant l’éruption du Vésuve, a commencé son XXIXe livre en disant que personne n’avait écrit en latin sur la médecine, et on pourrait conclure qu’à ce moment-là, Celse n’avait rien produit. Mais, remarquez-le bien, Pline a cité à plusieurs reprises l’ouvrage de Celse, en se contredisant lui-même, à moins que Pline ne regardât point Celse comme médecin, ce qui est encore plus probable.
Bianconi fait Celse contemporain de Tibère ; il s’appuie sur le témoignage de Columelle qui appelle Celse « un homme de son temps, nostrorum temporum vir », mais Columelle dit de lui-même qu’il était vieux en composant son ouvrage. Il est certain pour moi que Celse a écrit pendant la première moitié du siècle d’Auguste ; son style est regardé comme étant de cette . époque par tous les littérateurs. Celse parle de Thémison comme d’un auteur qui l’a précédé depuis peu, nuper ; enfin il ne dit rien d’Antonius Musa, médecin ’d’Auguste, qui avait, dit-on, sauvé l’empereur, et qui était quelque peu chef d’école. Ce dernier. avait traité par l’eau froide une maladie de foie du souverain ; or Celse dit expressément que, pour les maladies du foie, rien n’est mauvais comme les remèdes froids, et il conseille les remèdes chauds. Certainement Celse se fût expliqué d’une autre façon s’il avait écrit après la maladie d’Auguste qui eut lieu l’an 22 avant Jésus-Christ, ou en 731 depuis la fondation de Rome.
Il faut que je vous fasse distinguer Cornelius Celsus des autres auteurs avec lesquels il a été confondu. Pour soutenir son opinion, Bianconi, De Celsi ætate, attribue à un Celsus qui faisait partie de l’entourage de Tibère le Traité de la médecine. Or ce Celsus, allant aux armées d’Orient avec le futur tyran, était l’ami d’Horace, qui nous en a fait connaître le vrai nom : il s’appelait Celsus Albinovanus. Les raisons données par Bianconi ne sont donc pas acceptables.
Notre Celsus n’est pas le philosophe épicurien de ce nom, qui fut célèbre sous Marc-Aurèle, ni le jurisconsulte Juventius Celsus, condamné à mort sous Domitien ; ni un Celsus, pareillement jurisconsulte, qui vécut sous Trajan.
Aulus Cornelius Celsus est absolument distinct d’Apuleius Celsus. Apuleius, plus jeune, était Sicilien et avait composé un antidote contre la rage. Il avait été à la fois le maître de Scribonius Largus, médecin de Claude, ainsi que de Vectus Valens, un des favoris de Messaline et mis il mort en même temps qu’elle.
Je vous ferai connaître une curieuse inscription relative à Marcus Livius Celsus, qui reçut le titre d’archiâtre et qui était secrétaire d’une école de médecine, tabularius scholæ medicinæ. Marcus Livius Celsus est postérieur aux deux Celsus médicaux qui viennent de nous occuper : Aulus Cornelius et Apuleius.
Nous arrivons maintenant à rechercher l’ensemble des ouvrages de Celse et à décider s’il était médecin. Cette dernière question doit vous surprendre ; elle a soulevé des controverses, elle est de plus en plus résolue négativement — vous entendez bien, négativement — par des autorités considérables dont je partage l’avis.
Vous savez déjà que Celse a écrit sur un grand nombre de sujets. Quelle idée peut-on se- faire de l’œuvre dans son ensemble ? Nous pouvons la comparer à une sorte d’encyclopédie, à un résumé des connaissances humaines. Le titre de la collection devait être : Artes ; Libri artium ou De artibus, Après le traité De re rustica en cinq livres, venait le traité De re medica, en huit livres. Un traité sur la rhétorique, probablement en sept livres, devait suivre, et d’autres leur succédaient, mais dans un ordre que nous ignorons. Nous n’en savons pas le nombre exact ; il yen avait un sur le droit, un autre sur la philosophie, un sur l’art militaire.
Tous ces traités étaient du même auteur, et non de divers Celsus, Nous en avons la certitude par Columelle, Quintilien, Végece, qui tous s’accordent à citer comme auteur unique : Cornelius Celsus.
Columelle nous apprend que le Tmité d’agriculture de Celse, De re rustica, était des plus remarquables. Columelle appelle Celse : celeberrimus auctor ; il le cite presque constamment, il le place au-dessus de Caton, Varron, Magon. S’il le réfute, c’est avec déférence : « Je ne puis assez m’étonner que cette erreur ait été commise par Cornelius Celsus, cet homme qui connaissait non seulement l’agronomie, mais encore toute la nature. n Au sujet des abeilles, il dit textuellement : « Il est impossible de surpasser la science d’Hyginus, les ornements de Virgile et l’élégance de Celse." La première phrase du premier livre De re medica nous prouve que ce traité faisait suite au Traité sur l’Agriculture, et Columelle est formel sur les cinq livres composant De re rustica. Nous en avons la confirmation par l’ancien manuscrit du Vatican dont je vous ai parlé à propos du prénom de Celse ; il porte sur le titre : Auli Cornelii Celsi liber sextus, idemque medicinæ primus. Enfin, un manuscrit de Padoue, qui ne comprend que le livre IV, se termine par ces mots : Artium Cornelii Celsi liber nonus, idem medicinæ liber quartus. Il devient inutile d’insister, la certitude est complète.
Quintilien n’a pas rendu justice à Celse, il ne flattait que Domitien. Après avoir cité Caton, Varron, Cicéron, il dit de Cornelius Celsus : « homme d’un génie médiocre, mediocri vir ingenio, qui a écrit sur tous les arts, et principalement sur l’art militaire, l’agriculture et la médecine », La qualification est méchante, pour ne pas dire plus, s’adressant à un homme auquel on reconnaît un savoir universel. Quintilien juge Celse de la sorte, parce qu’il n’en partage pas les idées sur la rhétorique ; quand il le cite, c’est pour le contredire avec aigreur. Si on a pu dire, medicorum invidia pessima, on aurait pu ajouter scriptorumque. Je relève toutefois dans Quintilien une précieuse remarque chronologique : le traité de Celse sur la rhétorique devait être postérieur à l’an 29, où parurent les Géorgiques, puisque Quintilien reproche à Celse d’avoir critiqué le vers 357 de ce poème virgilien.
En parlant de ceux qui ont écrit en latin sur la philosophie, le même Quintilien nomme en première ligne Cicéron, puis Brutus, et, en troisième ligne, Celse, dont les nombreux écrits philosophiques ne manquent ni d’élégance ni d’éclat, non sine cultu et nitore. Ces écrits, nous devons l’admettre, étaient remarquables.
Végèce, auteur d’une grande autorité, spécial, et qui écrivait au IVe siècle de notre ère, donne les plus grands éloges au traité de Celse sur l’art militaire, De re militari. Il le cite fréquemment, et même dans le titre de son ouvrage ; il le met au premier rang avec Caton, Trajan et Adrien, ce qui est un grand honneur, car vous savez quelle importance les Romains attachaient aux choses de la guerre.
Tous les écrits, tous les traités de Cornelius Celsus, ont attiré l’attention. On peut dire que Celse a excellé, pour le fond comme pour la forme, sur l’agriculture, l’art militaire, la rhétorique, la philosophie. Son traité de médecine est un chef-d’œuvre, et comme c’est le seul qui nous soit parvenu, on se fait difficilement à l’idée que l’auteur ne fût pas un médecin et un médecin éminent. Examinons de près le pour et le contre.
C’est par une subtilité de commentateur que Gueuzius, suivi par Sanchez Ribeiro et Capperonnier, a voulu réfuter le jugement trop sévère de Quintilien sur Celse en défigurant le texte que je vous ai fait connaître. Au lieu de mediocri vir ingenio, on a substitué C. Celsus med. (medicus) acri vir ingenio, pour prouver en même temps que Celse était médecin. Je ne m’y arrête pas plus longtemps.
On a invoqué les passages suivants pour établir que Celse était praticien. Au sujet des ulcères de la gorge (livre IV, ch. IX, p. 227, édit. Védrènes), on lit : Asclépiade, auteur estimé de beaucoup de conseils, que nous avons nous-même suivis, recommande de boire du vinaigre très concentré… Ce liquide peut, il est vrai, arrêter une hémorragie, mais non guérir les ulcères. — Dans le traitement du flux de ventre (liv. IV, ch. XXVI, p. 258), il discute avec Asclépiade : Contrairement à l’opinion de ses devanciers, Asclépiade soutenait que la boisson devait être constamment froide, et même aussi froide que possible. Pour moi (ego… existimo), j’estime que chacun doit s’en rapporter à sa propre expérience, pour régler s’il convient de boire chaud ou froid. Vous voyez qu’il n’y a pas ici la prescription formelle d’un maître convaincu. — En parlant de l’ictère (liv. III, ch. XXIV, p. 201-202), Celse dit : Quelques médecins négligent les premiers moyens et prétendent obtenir la guérison avec les diurétiques et les aliments atténuants. Pour ma part (ego ubique)… si les forces sont suffisantes, je préfère les remèdes énergiques ; si elles sont faibles, ceux qui sont peu actifs. Ceci prouve le bon sens de Celse, conseillant les moyens forts ou faibles, suivant l’état des forces. En indiquant le temps où il faut donner à manger aux fébricitants (liv. III, ch. v, p. 150-151), Celse s’exprime ainsi : Quelques-uns, ayant égard à la rémission que les malades éprouvent d’ordinaire le matin, pensent que c’est alors qu’il faut donner les aliments… D’autres donnent le soir la nourriture à ces malades… Pour toutes ces raisons, je diffère jusqu’à minuit, ob hæc ad mediam noctem decurro. Cette citation, dont le texte a été fort discuté, faisait dire à des Étangs que Celse est pris ici en flagrant délit de pratique médicale. Acceptons le passage, admettons même que Celse ait vu et même soigné des fébricitants ; mais de ceci aller jusqu’à certifier que Celse a été médecin de profession, il y a bien loin. Je crois seulement, pour ma part. que notre auteur avait essayé de traiter les fièvres intermittentes, si communes de tout temps dans la campagne de Rome.
Celse était-il opérateur ou chirurgien de profession ? Rien ne le prouve. S’il donne une opinion sur l’ankyyloblépharon (liv. VII, ch. VII, § 6, p. 484), c’est, d’après Mégès, le plus savant des médecins opérateurs de Rome. — Quand il parle d’un résultat exceptionnel de la section pour la langue bridée par le filet (liv. VII, ch. XII, p. 505), il me paraît certain que la personne qu’il a connue n’avait pas été opérée par lui. — Dans les chapitres sur la luxation du fémur (liv. VIII, ch. XX, p. 616 et suiv.) et sur les affections de l’ombilic (liv. VII. ch. XIV, p. 507 et suiv.), Celse rapporte la pratique des autres, non pas la sienne, et il se montre embarrassé pour conclure. Il avait dû assister à des opérations ou en contrôler les suites, cela n’est pas douteux. Vous savez, du reste, que la sensibilité des Romains, habitués aux combats de gladiateurs et aux supplices des esclaves, n’était pas forte. Je ne crois pas que Celse ait opéré d’une manière habituelle et hors le cas d’une nécessité pressante.
A ces passages cherchés avec soin et interprétés avec passion, il serait facile d’en opposer beaucoup d’autres où Celse montre son inexpérience médico-chirurgicale.
Je vous ai prouvé que les œuvres de Celse formaient une encyclopédie latine, dont la partie médicale apparaissait à l’époque où les principaux médecins de Rome étaient de nationalité grecque ou avaient étudié dans des auteurs grecs. La langue latine n’était pas employée par eux ; Celse l’a acceptée, les mots lui manquaient pour désigner les maladies, il a eu recours aux périphrases, Quand la difficulté devenait trop grande, il se servait du terme grec, ou bien il employait la locution : Quod Græci vocant. Il note : Medici appellant, dicunt. J’ajoute qu’en agissant ainsi, l’auteur latin ne devait pas avoir en vue les médecins qui étaient Grecs et qui s’exprimaient en grec, mais, en définitive, les philiâtres, les gens du monde qui tenaient à posséder des notions médicales, à s’instruire en médecine et qui se servaient de préférence du latin, leur langue maternelle.
Très souvent Celse oppose aux traitements divers des médecins ceux mis en usage par les gens de la campagne et, sans se prononcer, il a quelque tendance à les voir employer. Je vous citerai en particulier la manière de traiter les strumes (liv. V, ch. XXVIII, § 7, p. 370-371), la pleurésie (liv. IV, ch. XIII, p. 238), le mal de dents (liv. VI, ch. IX, p. 436). De même, pour les maladies des yeux, à propos des suffusions sanguines par cause externe (liv. VI, ch. VI, § 39, p. 421), ainsi que pour l’emploi du collyre d’Evelpide, il dit qu’en l’absence de médecin ou de médicament on peut employer le blanc d’œuf ou le lait de femme (liv. VI, ch. VI, § 8, p. 402). Ce n’est pas là un langage d’oculiste expert et s’adressant aux praticiens spéciaux. Ce sont des conseils pour les philiâtres et les gens du monde.
Une dernière preuve vous sera fournie par la description des maladies (les parties génitales, parles obscenæ. Quoique, à l’époque de Celse, le relâchement des mœurs fût déjà grand, la langue latine n’avait pas encore « dans les mots, bravé l’honnêteté ». Celse observe que les Grecs ont, pour désigner les parties honteuses, des mots convenables et adoptés par l’usage, mais qui « n’ont pas même l’excuse d’être employés par les personnes qui parlent avec une certaine retenue » (liv. VI, ch. XVIII, p. 447). Toutefois, cette considération ne le détourne pas d’écrire « parce qu’il veut embrasser tout le cercle des connaissances qu’il regarde comme salutaires ; ensuite parce qu’il importe surtout de répandre dans le public le traitement des affections que chacun ne montre à autrui qu’avec une extrême répugnance » (loc. cit., p. 447). Vous voyez nettement à qui s’adresse le Traité de la médecine, au public et non aux médecins proprement dits.
Celse ne pratiquait pas l’art médical ; il s’élève contre les médecins intéressés, qui exercent en vue du gain (liv. III, ch. IV, p. 146) et qui voient trop de clients. Il vaut mieux avoir, dit-il expressément (liv. I, p. 39), pour médecin un ami qu’un étranger, utiliorem tamen medicum esse amicum quam extraneum.
Remarquez, messieurs, qu’en ne donnant pas à Celse la qualification de médecin, nous revenons aux idées anciennes. Personne, dans l’antiquité, ni même au moyen âge, n’a rangé Celse parmi les médecins romains. Pline, qui a cité plusieurs fois Cornelius Celsus, le place parmi les auctores et jamais parmi les medici. Aucun auteur médical n’a parlé de lui, ni chez les Grecs, ni chez les Latins. Galien et Cælius Aurelianus, Aétius, Oribase et Paul d’Égine gardent un silence absolu, qui serait inexplicable si Cornelius Celsus avait été médecin et s’il avait écrit pour des médecins. Le traité De re medica faisait partie d’une encyclopédie pour les gens du monde, destinée au public en général, aux philiâtres en particulier.
Lorsque le Traité de Celse sur la médecine, le seul qui nous soit parvenu, fut imprimé, puis répandu, on le trouva si parfait et tellement supérieur à ce qu’on possédait en langue latine sur les sciences médicales, qu’il fut admis d’emblée parmi les classiques du premier ordre. On ne s’inquiéta pas’ de savoir si l’auteur était un praticien, voué à la profession médicale. Puis on s’aperçut que l’auteur du Traité de la médecine était le même que le Cornelius Celsus de Columelle, de Quintilien et de Végèce, et alors, d’un commun accord, les savants reconnurent que Celse n’était pas médecin.
Les érudits conservaient celte opinion, tandis que les médecins qui lisaient, qui étudiaient Celse, ne pouvaient imaginer et admettre que l’auteur le plus exact, le mieux renseigné qu’ils avaient entre les mains, n’eût pas été un homme du métier. Daniel Leclerc, Schulze et la plupart des historiens médicaux qui suivirent partagèrent et propagèrent cette idée ; dix-sept siècles après Celse, on a pensé pour la première fois qu’il était médecin ; mais nous devons aujourd’hui, avec Van der Linden, Bianconi, Dezeimeris, Broca, Daremberg, reconnaître le contraire.
Celse était donc un compilateur, mais un compilateur de génie. Si le Traité de la médecine ne renferme presque rien d’original, s’il est une traduction des Grecs avec les réflexions de l’auteur, fort sensées, fort justes le plus souvent, ne nous étonnons pas que ceux qui avaient sous les yeux les sources où Celse avait puisé ne l’aient pas cité.
Cornelius Celsus, très instruit, n’était pas plus médecin qu’agronome ou guerrier. C’était un ami des sciences, un de ces philiâtres indiqués par Galien, qui, soit à Alexandrie, soit à Rome, et plus tard en Italie ou dans les Gaules, s’instruisaient des choses de la médecine dans les livres plutôt qu’au lit des malades. Les philiâtres discouraient médicalement ; ils pouvaient traiter leur famille et leurs amis, comme nous le verrons faire à Caton le Censeur. Celse n’a été ni un praticien occupé ni un simple amateur. Sans expérience chirurgicale, il expose admirablement : mais il décide rarement et se laisse guider par son bon sens, surtout dans les questions touchant à l’hygiène.
On a dit de Cornelius Celsus qu’il était le Cicéron des médecins. Cette appellation me paraît inexacte, elle pourrait avec plus de justesse s’appliquer à Pline. Au contraire, la qualification d’Hippocrate latin me parait bien mieux caractériser Celse.
II.
Le traité de Celse, De re medica, comprend huit sections ou livres, divisés en chapitres et sous-divisés en paragraphes. La chirurgie, quoique moins étendue, a été, de la part des traducteurs français, l’objet de soins particuliers avec accompagnement de figures et représentations d’instruments. Sans la négliger, je tiens à insister sur la médecine proprement dite.
Le 1er livre de la médecine est le sixième de l’ouvrage général des Arts. C’est en quelque sorte un résumé d’hygiène qui s’ouvre par une préface, præfatio ou præmium, des plus remarquables, par un aperçu historique et la recherche de la meilleure doctrine médicale.
Les littérateurs ont célébré, comme les médecins, ce premium. qui a été qualifié d’admirable, dans lequel Celse a exposé l’histoire de l’art médical depuis les temps anciens jusqu’à son époque, en citant Esculape, mis au rang des dieux, ses deux fils Podalire et Machaon ; les philosophes Pythagore, Empédocle et Démocrite, très versés dans la médecine ; Hippocrate, de Cos, remarquable par le savoir et l’éloquence, qui sépara la médecine de la philosophie, c’est-à-dire qui l’affranchit de la tutelle des philosophes. Depuis lui, Dioclès de Caryste, puis Praxagore et Chrysippe exercent notre art. Celse nous fait connaître l’École d’Alexandrie avec Hérophile et Érasistrate : c’est, dit-il, à cette époque que la médecine fut divisée en trois parties. Enfin il parle de ses prédécesseurs immédiats et de ses conternporains.
Dans son examen des doctrines médicales, Celse discute tour à tour le dogmatisme hippocratique, scrutant la nature même des choses ; l’empirisme, rejetant le raisonnement et n’admettant que les expériences et le méthodisme introduit par Asclépiade et auquel Thémison « a tant récemment dans sa vieillesse apporté quelques modifications ». Quoi qu’on en ait dit, et le texte sons les yeux, vous verrez que Celse n’est pas tendre pour les méthodistes, bien qu’il cite et qu’il adopte plusieurs fois les opinions d’Asclépiade. Avec une sagacité rare, Celse réfute tour à tour les hypothèses exagérées des dogmatiques, les illusions des empiriques, mais aussi les prétentions outrées des méthodiques qui n’admettent « que les caractères communs des maladies, caractères qui sont de trois sortes : le resserrement, le relâchement et un état mixte ». Celse déclare qu’il veut le raisonnement appuyé sur l’expérience ; son « avis, sans adhérer à l’une ou l’autre doctrine, ne s’éloigne trop d’aucune d’elles et tient en quelque sorte le milieu entre les sentiments extrêmes » ; retenant de chacune ce qu’il y a de meilleur. Il n’est donc ni dogmatiste, ni empirique, ni méthodiste : étant tout cela, il conservera en tout temps sa liberté de penser, mais il ne s’enrôlera sous aucune bannière particulière.
Je dois vous faire remarquer la division de la médecine indiquée par Celse. Des controverses nombreuses se sont élevées à ce sujet ; voici le texte. « La médecine fut divisée en trois branches (partes) ; l’une guérissait par le régime ; l’autre par les médicaments ; la troisième par les opérations manuelles. La première reçut des Grecs le nom de διαιτητιχη, la seconde celui de φαρμαχεητιχη, la troisième celui de χ&epsilonιροργιχη". (Liv. 1er, préface, p. 23, édit. védrënes.) Pour Daniel Leclerc, Sprengel, Haller, Choulant et le plus grand nombre des historiens, ce passage prouverait une division de la médecine en trois branches répondant à trois catégories de praticiens traitant les malades, les uns par l’application du régime suivant l’extension ancienne de ce procédé, les autres employant les médicaments extérieurs, les derniers pratiquant les opérations. Hocker émet une opinion moins exclusive, et qui me parait juste ; d’après lui, cette division de la médecine en trois parties ne devait pas fournir trois classes d’hommes de l’art, mais il résultait de ce partage que chacun s’attacha plutôt à l’une des branches qu’aux autres et contribua de la sorte à un perfectionnement spécial.
Pour se former une opinion impartiale à cet égard, il nous faut rechercher dans Celse comment il expose et comprend la division de la médecine. Or la moitié de son Traité, soit les quatre premiers livres, correspond, ainsi que nous le verrons bientôt, aux maladies internes, à celles qui relevaient du régime (diététique). Dans les livres intermédiaires se trouvent les maladies externes exigeant l’emploi des topiques et des moyens extérieurs (pharmaceutique). Les derniers livres exposent ce que nous appelons la médecine opératoire (chirurgique ou chirurgie). Mais notez, dès à présent, ce fait qui vous frappera : les matières de chacune des sections ne sont pas nettement séparées, elles sont fort souvent mélangées entre elles. De plus, l’au leur dit expressément, dans l’exposé de sa pharmaceutique : « Il importe avant tout de savoir que toutes les parties de la médecine sont tellement liées entre elles, qu’il est impossible de les séparer entièrement et que chacune tire son nom du système curatif auquel elle demande le plus. Par exemple, celle qui traite par le régime emploie quelquefois les médicaments ; de même, celle qui lutte à l’aide de ces derniers doit aussi faire intervenir le régime, dont l’utilité est d’un grand secours dans tous les maux qui affligent le corps. » (Liv. V, p. 271, édit. Védrènes.) Nous devons conclure, par Celse lui-même ; qu’il s’agit, en définitive, d’une division scientifique et nosologique des maladies, fondée sur la thérapeutique, ayant pour but de permettre une classification plus ou moins régulière, malgré des empiétements nombreux et réciproques des trois sujets d’études. D’ailleurs, l’histoire nous montre les médecins de l’antiquité grecque, illustres ou obscurs, pratiquant toutes les branches de l’art de guérir. Il n’existait pas de distinction acceptée ou consacrée par l’usage ; les médecins étaient également chirurgiens. Toutefois il faut reconnaître et apprécier les grands progrès que les découvertes anatomiques de l’École d’Alexandrie avaient fait faire à la chirurgie qui, nous dit encore Celse, "à cause de la grande extension qu’elle avait prise, fut consignée dans des livres spéciaux n. Il est sûr que si, du temps de Celse, des praticiens ont été appelés chirurgiens, à cause d’aptitudes individuelles, la majorité exerçait la médecine tout entière et dans son ensemble. J’ajoute, enfin, que, pour Galien qui nous donne une longue liste des spécialités médicales, ces spécialités ne sont pas des parties distinctes de la médecine qui est une, quelles qu’en soient les divisions. Galien admet, comme Celse, une division scientifique de la médecine, fondée sur la diversité des moyens thérapeutiques, mais non une division matérielle et nettement séparée.
Sprengel est dans l’erreur quand il croit que la pharmaceutique pouvait répondre à la rhizotomie, à la pharmacopolie antiques, et plus ou moins comparable à notre apothicairerie ou pharmacie. Celse dit positivement en tête du cinquième livre que la pharmaceutique est la branche de la médecine qui combat les maladies principalement par les médicaments : "Passons maintenant, dit-il, à cette partie de la médecine qui lutte plutôt à l’aide des médicaments. » L’histoire des médicaments est ici jointe à la nosographie comme dans la première partie : la matière de l’hygiène est jointe à la diététique. Les rhizotomes anciens n’étaient pas médecins, et leur rôle était secondaire ; ils recueillaient les plantes qu’ils vendaient sur le marché, soit au public, soit aux médecins. Les pharmacopoles tenaient toute espèce de drogues premières, mais du temps de Celse ne préparaient pas de médicaments. J’insisterai bientôt sur ces questions.
Revenons à l’exposé rapide du traité De re medica. Après le præmium, le premier livre vous offrira dans la succession des principaux chapitres : De quelle manière l’homme sain doit se conduire et de quelle manière les personnes délicates. — Observations concernant le tempérament, l’âge et les saisons, — pour ceux qui ont la tête faible, — qui souffrent des yeux, de coryza, de catarrhe de la gorge, de maux d’estomac, de flux de ventre. — Conseils sur le chaud et le froid de l’air, — sur la conduite à tenir en temps d’épidémie pestilentielle.
Dans le IIe livre de la médecine, Artlium liber septimus, Celse a exposé les signes de la maladie et les secours généraux. Il fait de continuels emprunts aux Livres hippocratiques, aux Aphorismes, au Pronostic, aux Prorrhétiques. Il passe en revue les saisons, les âges, les tempéraments, qui mettent à l’abri de la maladie, ou, au contraire, qui y disposent davantage. Il recherche les signes prémonitoires de la maladie, les bons et les mauvais signes dans les maladies et les fièvres, — les signes qui annoncent qu’une maladie sera longue, — les indices de la mort, — les signes propres à plusieurs espèces de maladie, — les symptômes qui font espérer le retour à la santé ou craindre quelque danger.
Le régime ou la diététique est toujours opposé aux états morbides qui précèdent ; mais, ainsi que je vous l’ai dit, et sans être astreint à un ordre absolu, Celse passe à la saignée par la veine. Ce chapitre est curieux par ses développements ; l’auteur indépendant est peu soucieux des doctrines sur la révulsion et la dérivation. En principe, il recommande la saignée du bras pour les maladies générales, et le plus près possible de la partie malade pour les affections locales. Puis viennent les ventouses, d’un emploi fort ancien, car Hippocrate en parle comme d’un moyen thérapeutique depuis longtemps en usage ; les premières paraissent avoir été de corne. — De la purgation, — du vomissement, auquel on avait recours même en santé. — De la friction, sur laquelle Asclépiade a insisté, mais qui est due à Hippocrate. — De la gestation et de ses diverses espèces : en bateau, en litière, en chariot, dans un lit suspendu. — De la diète. — Des moyens de provoquer la sueur. — Des aliments et des boissons, tant de bon suc que de mauvais suc, doux, acres, etc. (Des attractifs, des astringents, des émollients, des échauffants, de ceux qui durcissent et de ceux qui assouplissent les tissus.
Nous venons de voir, dans ce deuxième livre, des principes de pathologie et de thérapeutique générales. Le livre III renferme une pathologie plus spéciale avec limites assez distinctes et un traitement approprié.
Les Grecs, dit Celse, ont partagé les maladies en aiguës et en chroniques ; mais il y a un plus grand nombre de classes. Il les divise en celles qui affectent tout le corps et celles qui n’en intéressent qu’une partie. Il montre comment on reconnaît si les maladies augmentent, si elles restent stationnaires ou si elles diminuent. Il s’occupe des différentes espèces de fièvres et des diverses manières de les traiter. — Du temps où il convient de donner des boissons aux fébricitants. — Du traitement des fièvres pestilentielles, de la fièvre demi-tierce, des fièvres lentes, de la fièvre quotidienne, de la fièvre tierce, de-la fièvre quarte, de la fièvre double-quarte. Remarquez la netteté des types indiqués pour les fièvres à malaria.
Je mentionne, parmi les chapitres du livre III, les suivants qui vous intéresseront au point de vue historique : Des trois espèces de folie. — De la maladie cardiaque, χαρδιαχος ; des Grecs, où on retrouve les symptômes de la suette. — Des hydropiques, — De la consomption et de ses espèces. — Du mal comitial, ainsi nommé parce que les comices romains étaient dissous lorsque quelqu’un tombait en épilepsie dans ces assemblées, pour éviter le malheur dont on croyait que cet événement était le présage. — De l’ictère, mal royal. Il Il (le malade) aura un lit et une chambre ornés avec goût ; il se livrera aux divertissements, aux jeux, aux amusements et aux plaisirs qui procurent à l’esprit des distractions agréables ; voilà pourquoi cette maladie semble avoir été surnommée royale. » (Liv. III, chap. XXIV, p. 202. édit. Védrènes.) — De l’éléphantiasis. — De la résolution des nerfs : générale, αποπληζια ; locale, παραλυsigma ;ις. — Des douleurs de nerfs, du tremblement nerveux. — Des suppurations internes.
Le IVe livre de la médecine, IXe livre des arts, débute par une description des parties intérieures du corps humain, curieuse pour l’époque. Cette description indique les connaissances anatomiques dues à l’École d’Alexandrie ; elle est rapportée par Celse pour faciliter la connaissance des maladies de tous les organes internes et le traitement qui leur convient. Puis viennent : le traitement des maladies de la tête..Du rhume et de l’enchifrènement. — Des maladies du cou, des maux de gorge et de l’angine. — De la difficulté de respirer, δνσπνοια, ασθμα, ορθοπνοια. — Des ulcères de la gorge, pour lesquels Celse cite Asclépiade, mais dont il n’adopte qu’en partie les idées. — Des maladies de l’estomac.- De la douleur de côté, πλευριτις. — De l’hépatite. — De la rate malade. — Des maladies des reins. Des maladies des intestins, et d’abord du choléra (uniquement nostras). — De la dysenterie, de torminibus. — De la lienterie. — Des vers dans le ventre, indication des vers plats et ronds. — De l’hystérie. — De l’écoulement trop abondant de semence, — Des douleurs de la hanche (coxalgie) et des genoux, des mains et des pieds (surtout goutteuses). — De la manière de restaurer un convalescent.
Le livre Ve énumère les propriétés des médicaments, tandis que les précédents ont eu en vue le régime (diatétique), C’est par ce livre que commence la pharmaceutique, branche de la médecine employant surtout les médicaments externes. Érasistrate, et aussi Hérophile, ne traitaient sans leur secours aucune maladie. Asclépiade avait exclu en grande partie leur usage. Dès le temps de Celse les médicaments étaient fort composés, rarement simples. La polypharmacie a toujours plu à la majorité des malades.
Vous verrez successivement : les remèdes hémostatiques, les agglutinatifs des plaies, — les maturatifs et suppuratifs, les apéritifs (des bouches des vaisseaux), — les détersifs, rongeants, corrosifs, caustiques, escharotiques, discussifs, attractifs, expulsifs, lénitifs, — les incarnatifs (faisant renaître les chairs), les émollients.
Un chapitre important est celui du mélange des simples et de la valeur des poids. L’once romaine pesait sept deniers. Celse a divisé le denier en sixièmes ou sextants ; chaque sextant pèse, de la sorte, autant que l’οβολος des Grecs. J’ajoute que le triens vaut deux sextants.
Vous trouverez une longue suite de Malagmes (analogues aux cataplasmes et faits avec des plantes), — d’emplâtres et de pastilles (composés principalement avec des substances métalliques), — de pessaires. — Des mixtures sous forme sèche. — Des gargarismes. Je vous signale encore : les antidotes qui remédient à des accidents extrêmement graves. Le premier qu’indique Celse contient vingt-neuf substances ; le second, ou antidote d’ambroisie, fut imaginé par Zopyre pour un roi Ptolémée ; le troisième et le plus renommé est l’antidote de Mithridate qui, en le prenant tous les jours, se mit, dit-on, à l’abri du danger des poisons. Cet antidote renfermait trente-quatre substances broyées ensemble et incorporées à du miel. — Les acopes, liquides avec lesquels se font les onctions. — Les catapotes, ανωδυνα, anodins. qui calment la douleur et qui ont aussi d’autres usages.
J’ai eu soin de vous prévenir que la médecine et la chirurgie, telles que nous les comprenons, sont mélangées dans l’œuvre de Celse. En voici une nouvelle preuve. Après cette exposition de médicaments, il examine les troubles morbides auxquels le corps est sujet et il commence par les blessures. Il s’occupe tour à tour des blessures incurables, des blessures difficiles à guérir, des blessures dont la guérison est la plus sûre. Celse recherche l’influence de l’âge, de la constitution, du genre de vie et de la saison ; il expose les signes des blessures internes, des blessures du cœur, des poumons, du foie, des reins, de la rate, de la vessie, de la matrice, du cerveau, de la moelle épinière. Les caractères du sang, de la sanie et du pus étant appréciés, Celse donne la manière d’arrêter l’hémorhagie dans les plaies ; après l’emploi de plusieurs moyens, il dit expressément : « Si l’hémorhagie résiste, il faut saisir les vaisseaux qui fournissent le sang, les lier en deux endroits autour de la plaie et les couper dans l’intervalle, afin qu’ils se rétractent, tout en ayant leurs orifices fermés. » (Liv. V, chap. XXVI, § 21, p. 336.) Remarquez bien que Celse décrit la ligature des vaisseaux comme étant usuelle ; c’est probablement à l’École d’Alexandrie qu’en revient l’invention. Evelpide passe pour l’avoir apportée à Rome.
Puis viennent les traitements contre l’inflammation des plaies, — les procédés de réunion, -la manière de bander les plaies, suivies de l’hygiène du blessé et du pansement. Les ulcères et leur traitement, celui de l’érysipèle, de la gangrène, des plaies compliquées, complètent ce chapitre.
Le suivant vous offrira de curieux renseignements. Il s’agit des plaies qui proviennent de morsures, soit de l’homme, soit du singe, souvent du chien, quelquefois des bêtes féroces ou des serpents. Le traitement de la morsure du chien enragé est extrêmement remarquable : extraire le virus avec une ventouse et cautériser par le feu. Celse parle de la rage, que les Grecs appellent υδροφοβους, « maladie des plus tristes, dans laquelle le malade est à la fois tourmenté par la soif et la crainte de boire et où il ne reste qu’un faible espoir au malheureux blessé ». (Liv. V, chap. XXVII, § 2, p. 354.) Le traitement des morsures de serpents, de la piqûre de l’araignée et du scorpion, les remèdes contre certains poisons précèdent le traitement des brûlures.
Celse avait reconnu cinq espèces de troubles du corps. Nous venons de voir le premier par cause externe ; les autres proviennent soit d’altération par cause interne comme dans le cancer, soit par production d’un corps étranger ; tantôt par excès quand une veine tuméfiée tourne en varice, tantôt par défaut comme lorsqu’un organe est trop court. Fidèle à cet arrange-ment, Celse s’occupe des ulcères par vice interne ; il Y place le charbon, maladie importée, le carcinome, le thériome, le feu sacré et l’ulcère chironien, qui sont énigmatiques, — puis les strumes, le furoncle, le phyma, les abcès et les fistules.
La fin du Ve livre traitait de plusieurs affections générales de la peau ; des différentes espèces de pustules, pustulæ, εξανθημα des Grecs, — de la gale, scabies, αγρια, — des papules, — des formes du vitiligo, αλφος, μελας, λευχη sur lesquelles l’accord historique n’existe point encore.
Le VIe livre commence par la description d’autres éruptions cutanées : du prurigo, — du sycosis, — de l’area, — des boutons et éphélides. Mais Celse est bien plus utile à connaître dans les descriptions qui suivent pour les maladies de chaque partie du corps, surtout des yeux, des oreilles, des organes des sens, à l’intégrité desquels les Romains tenaient beaucoup.
L’oculistique est fort développée ; il donne un grand nombre de collyres, collyria, d’après Denys, Cléon, Théodote, et surtout Evelpide, « le plus grand médecin oculiste de l’époque ». Les collyres trygode, celui appelé μεμιγμ&epsiolon;νος, les collyres chiron, sphœrion, un dernier collyre liquide, étaient tous d’Evelpide. Il y avait encore le collyre philalèthe, le collyre cythion ou téphrion, celui d’Hermon, celui de Nilée, le meilleur de tous et beaucoup d’autres. Je vous engage à parcourir les chapitres relatifs à la cataracte, suffusio, υποχυσις, — à la mydriase, — à l’héméralopie, etc. Les maladies des oreilles, la surdité, les bourdonnements, la manière d’extraire les corps étrangers auriculaires, précèdent les maladies des fosses nasales, leurs productions charnues, polypes, carunculœ carnosissimæ, — le mal de dents, « qu’on peut ranger parmi les plus atroces tourments » — les ulcères buccaux, comprenant les αφθαι des Grecs, commençant par les gencives, envahissant le palais et la bouche, — la gangrène buccale, — les parotides, etc.
Après avoir parlé de la saillie de l’ombilic et donné la formule d’un emplâtre pour éviter d’en venir à une opération ou à l’emploi du cautère actuel, Celse arrive aux affections des parties génitales. C’est ici qu’il dit expressément : « Les Grecs ont.. des expressions assez convenables et déjà acceptées par l’usage… il est assez difficile d’exposer ce sujet si l’on veut concilier la bienséance avec les préceptes de l’art. » (Liv. VI, chap. XVIII, p. 447.) Le mérite de Celse est grand pour être parvenu à faire passer en latin des choses que les Romains ne pouvaient dire et bien connaître faute de mots acceptés ; il n’a pas hésité devant la défaveur et presque le scandale d’une description des maladies des parties honteuses.
Les maladies de la verge, coles, gangrène, phagédénisme, callosité, etc., ne me paraissent pas se rapporter à la syphilis, mais plutôt aux ulcérations vénériennes non spécifiques. Les maladies testiculaires et de l’anus, les rhagades, les condylomes, les hémorroïdes, sont traités par les bains, les emplâtres, les médicaments caustiques. Enfin, le traitement des ulcères des doigts, ongle incarné, par l’alun, les escharotiques, au besoin par le scalpel et « la cautérisation avec des fers déliés », termine le VIe livre et clôt la pharmaceutique.
Le VIIe livre De re medicina, ou XIIo livre Artium, se rapporte ainsi que le suivant à la médecine opératoire. Celse y trace brièvement l’histoire de la chirurgie. "La troisième partie de la médecine est celle qui guérit par le secours de la main… branche bien que la plus ancienne… cultivée par Hippocrate, avec plus de soin que par ses devanciers… Elle fit aussi des progrès en Égypte, dus principalement aux travaux de Philoxène, qui l’exposa en plusieurs volumes avec beaucoup de talent. Gorgias, Sostrate, Héron, les deux Apollonius, Ammon d’Alexandrie et beaucoup d’autres hommes célèbres l’enrichirent aussi chacun de quelques découvertes. A Rome également, des maîtres d’un mérite réel, et dans ces derniers temps surtout, Tryphon le père, Evelpiste, et, comme on peut en juger d’après ses travaux, Mégès, le plus savant de tous, contribuèrent par des changements heureux aux progrès de cette science. » (Liv. VII, chapitre 1er, p. 461-462, édition Vèdrènes.)
Le portrait du bon chirurgien est tracé de main de maître. « Le chirurgien doit être jeune, ou du moins assez voisin de la jeunesse ; il faut qu’il ait la main ferme, prompte, jamais tremblante, la gauche non moins habile que la droite ; la vue. nette et perçante ; l’esprit hardi ; le cœur assez compatissant pour vouloir la guérison de son malade, mais non au point de mettre, sous l’émotion de ses cris, plus de précipitation que la circonstance ne le comporte, ou de moins retrancher que le cas ne l’exige ; en un mot, il doit tout faire comme si les gémissements du patient ne l’impressionnaient pas. Peut-être demandera-t-on quel est le domaine propre de cette branche, puisque les chirurgiens revendiquent pour eux le traitement de beaucoup de plaies et d’ulcères dont j’ai parlé ailleurs ? Pour ma part, je crois que le même homme peut suffire à tout ; et puisqu’il y a des divisions, je loue celui qui en embrasse le plus. » (Loc. cit., p. 462-463.)
Après cet exposé, Celse donne le traitement des entorses, — des tumeurs spontanées, avec la manière de les ouvrir et de les guérir, — les bons et les mauvais signes de la suppuration. Les fistules ,en général, les fistules thoraciques, abdominales, celles de l’anus l’occupent ensuite ; puis vient la manière d’extraire les traits, flèches, traits à fer large ou empoisonnés et les autres espèces de projectiles. Ce chapitre est curieux à étudier. ++ L’auteur latin examine tour à tour : les tumeurs de la tête nommés ganglions, mélicéris, athéromes et stéatomes, — les maladies des yeux curables par une opération ; kystes palpébraux ; le tubercule du bord ciliaire, nommé χριθη par les Grecs, à cause de sa ressemblance avec un grain d’orge ; l’onglet des yeux, πτερυγiota ;ον ; l’enucanthis, l’ankyloblépharon ; l’ægylops ; l’irritation causée par les cils déviés ; la lagophtalmie ; l’ectropion ; le staphylome, les clous de l’œil ; la cataracte ; la lippitude. — Et ensuite les maladies des oreilles curables par une opération. — La manière de restaurer les mutilations des oreilles, des lèvres et du nez, les polypes des fosses nasales, — l’ozène.
Dans le chapitre des affections de la bouche, qui se traitent par des opérations, se trouvent indiquées : les dents ébranlées ; l’induration des tonsilles, l’inflammation de la luette ; la langue bridée par le filet ; l’abcès sous-lingual, grenouillette. — Puis viennent : les affections du cou ; les affections de l’ombilic ; la manière d’évacuer l’eau chez les hydropiques.
Les plaies pénétrantes de l’abdomen et des intestins ; la rupture de la membrane interne ; les varices de l’abdomen, sont à lire, ainsi que l’exposé des maladies des testicules et les opérations qui se pratiquent sur ces organes. Il en est de même pour le traitement de la descente de l’intestin ou de l’épiplon dans le scrotum ; de la hernie aqueuse ; du cirsocèle et de la castration. Je vous recommande les opérations qui ont pour but de recouvrir le gland découvert, paraphimosis, — de découvrir le gland, φιμωσις, — de pratiquer l’infibulation.
L’emploi des sondes d’airain contre la difficulté d’uriner, — la mention des calculs de l’urètre et leur extraction, — et par-dessus tout, l’opération de la taille, ainsi que le traitement consécutif, sont décrits d’une manière très remarquable.
Les fissures calleuses de l’anus ; les condylomes ; les hémorroïdes, le traitement des varices ; de l’adhérence et de la rétraction des doigts ; l’amputation des membres après la gangrène, terminent ce livre VII, un des plus instructifs de l’ouvrage de Celse.
Le livre VIII de la médecine, XIIIe livre des arts, commence par un traité d’ostéologie. Après avoir décrit la position et la forme de tous les os du corps humain, l’auteur s’occupe de l’altération et de la corruption des os, des signes auxquels on les reconnaît, et de leur traitement ; — des fractures, fissures, perforation et contusion des os.
La manière d’exciser les os par la trépanation forme un chapitre très intéressant. Il est suivi du traitement des fractures du crâne, du nez, du maxillaire inférieur, de la clavicule, des côtes, de la colonne vertébrale, et des divers os des membres supérieurs et inférieurs.
L’étude des luxations, luxations complètes dans lesquelles ossa moventur sedibus suis, est faite de la tête aux mains et aux pieds, en commençant par la luxation du maxillaire inférieur ; — puis celles de la colonne vertébrale, du bras, du coude, du fémur, du genou, etc., sont complétées par les luxations accompagnées de plaies.
Cette brève et sèche énumération des VIIe et VIIIe livres de Celse, ayant plus particulièrement trait à la chirurgie, ne peut vous en donner qu’une idée imparfaite. Il vous faudra lire et relire la plupart des chapitres, et vous serez surpris des ressources que présentait alors la médecine opératoire.
Je tiens à vous donner quelques éclaircissements sur le texte et à vous signaler quelques points saillants.
L’entorse, désignée sous le terme luxata ; luxatio, n’est pas la luxation vraie dans laquelle les os sont déplacés, ossa excedunt. L’antique traitement de l’entorse par les scarifications de la peau et les résolutifs, la laine grasse imbibée de vinaigre et d’huile, est bien loin du massage, et surtout de la bande élastique soigneusement appliquée autour de l’articulation.
Plusieurs opérations décrites dans Celse conservent un intérêt historique, bien qu’elles soient abandonnées.
Les Juifs, soumis à Rome à des impositions considérables (fiscus judaicus) et assujettis à des inspections répugnantes, demandaient aux chirurgiens de leur rétablir le prépuce. On attirait pour cela au-devant du gland la peau extensible du fourreau, elle était fixée dans cette position sur une sonde par un lien et l’on faisait à la racine de la verge une incision circulaire, comprenant la peau seulement, Le lien n’était retiré qu’après la cicatrisation de la plaie, quand la peau déplacée avait contracté des adhérences dans sa position nouvelle. Il y avait là une autoplastie par glissement.
Vous remarquerez la petite opération restaurant les perforations auriculaires. Les trous du lobule étaient un signe d’esclavage ou de basse extraction chez les hommes. — L’infibulation des jeunes gens se faisait en passant à travers le prépuce une boucle ou une sorte de cadenas. — On avait essayé pour guérir l’ozène, de fendre le nez, d’ouvrir largement la fosse nasale, de cautériser au fer rouge, puis, de recoudre la narine. — La lippitude, blépharite chronique, avait un traitement barbare, fondé sur l’idée théorique d’une chassie pituiteuse, arrivant aux yeux par les veines des téguments de la tête. Pour couper le passage à la pituite, on pratiquait sur le cuir chevelu neuf incisions, remplies de charpie, et on les forçait à suppurer. Les plus hardis incisaient jusqu’à l’os, puis en cautérisaient la surface avec le fer rouge pour produire une légère esquille. Les modérés brûlaient les veines des tempes et du sommet de la tête.
Certaines méthodes opératoires connues à l’époque de Celse ont été longtemps oubliées. Telle est l’extraction du calcul arrêté dans l’urètre, obtenue par la ligature du prépuce au-devant du gland et l’incision de la peau ainsi que de l’urètre déplacés. Il suffisait de délier le prépuce pour que la peau en se retirant recouvrît la plaie. Il y avait là une application de la méthode sous-cutanée. — L’autoplastie par glissement était pratiquée sur la face, pour le nez, les lèvres et même les oreilles, comme je l’ai dit. « On ne crée point là de la chair, mais on en attire du voisinage. » (Liv. VII, chap. IX, p. 498, édit. Védrènes.) C’est la méthode autoplastique réinventée, il y a un siècle, perfectionnée par les chirurgiens français et qui porte le nom de méthode française. — On connaissait du temps de Celse la ligature en masse pour les tumeurs hémorroïdales, l’exomphale, le staphylome, de même la ligature des vaisseaux, surtout des veines. (Liv, V, chap. XXVI, § 21, p. 336.) Celse dit expressément dans l’opération de la castration : « … Lier du côté de l’aine les veines et les artères et en faire la section au-dessous de la ligature. » (Liv, VII, chap. XXII, fin, p. 529.) Vous voyez que la ligature était connue des anciens, avant les Arabes et avant que notre Ambroise Paré l’eût remise en honneur. — La gouttière, canalis, était employée dans les maladies articulaires et les fractures compliquées ; elle embrassait la plante du pied, elle remontait jusqu’au jarret, jusqu’à la hanche et même au-dessus. (Liv. VIII, chap. x, § 5, p. 598-599.)
Le chapitre sur l’opération de la taille pour la pierre dans la vessie doit être médité. Je mets sous vos yeux une figure de l’instrument de Mégès [2]. La lithotomie avec fragmentation du calcul d’après Ammon, λιθοτομος, est Indiquée nettement. (Liv. VII, chap. XXVI, § 2, p. 534-539 et fig. 1. Voyez aussi, codem loco, p. 540.)
La trépanation était souvent pratiquée au temps de Celse et l’instrument qu’il décrit diffère peu du nôtre, étant muni du perforatif mobile qui trace une voie sûre à la scie arrondie. Il était mis en mouvement par un jeu d’archet avec une courroie enroulée sur sa tige. La tarière était d’un usage beaucoup plus répandu que le trépan. Les anciens connaissaient parfaitement l’usage de la rugine, de la gouge et du maillet pour le traitement des maladies des os.
Vous voyez, messieurs, quel intérêt présentent les deux derniers livres du Traité médical de Celse et vous êtes surpris de la perfection à laquelle la médecine opératoire était alors parvenue. Boerhave avouait que les opérations de chirurgie devaient se faire à l’époque de Celse avec autant d’habileté que de son temps et qu’on donnait pour nouvelles quantité de choses qui sont dans l’ouvrage dont je viens de vous donner un aperçu.
Je vous dirai quelques mots de l’arsenal chirurgical des Romains après vous avoir parlé des éditions diverses du traité De re medica ;