Le 17 avril dernier (1912) est mort à Baguio (îles Philippines), à l’âge de cinquante et un ans, un savant américain, Paul-C. Freer, dont le nom était peu connu dans nos milieux européens, mais dont l’œuvre mérite d’être rappelée en raison du rôle prépnndérant qu’il a joué dans la mise en valeur scientifique de la grande colonie américaine d’Extrême-Orient.
Né à New-York, Freer fit d’abord ses études médicales, qui le conduisirent au grade de docteur à vingt et un ans ; puis il se sentit attiré vers la Chimie, et il vint en Europe, où il séjourna en premier lieu à Munich, au laboratoire de von Baeyer, puis en Angleterre, au laboratoire de Sir W. Perkin et à Owens College. De retour en Amérique, il fut nommé, en 1889, professeur de Chimie inorganique à l’université du Michigan, poste qu’il conserva jusqu’en 1901. C’est de cette première époque de sa vie que datent ses principaux travaux de Chimie, qui portent sur les chaînes de carbone fermées (séries hexaméthylénique et heptaméthylénique), l’action du sodium sur l’acétone et les aldéhydes, les éthers acétiques substitués, etc.
En 1901, Freer fut appelé par le Gouvernement des États-Unis à prendre la super-Intendance des Laboratoires scientifiques qu’il se proposait d’installer aux Philippines. Doué de rares qualités d’organisateur et administrateur, persuadé que la mise en valeur d’un pays neuf doit être précédée d’une étude scientifique soignée, Freer se donna tout entier à sa nouvelle tâche, et, sous sa direction, l’étude du sol, de la flore et de la faune du pays prit une vive impulsion, qui nécessita bientôt la transformation de l’organisation primitive en un « Bureau of Science », bien outillé, véritable institut de recherches scientifiques.
Pour faire connaître les résultats de ces recherches, Freer créa le Philippine Journal of Science, magnifique publication qui, depuis sept ans, a publié des mémoires appréciés tant sur I’inventaire des richesses philippines que sur des questions générales d’Agriculture, de Zootechnie, d’Hygiène et de Pathologie tropicales. Enfin, Freer contribua également à la création, à Manille, d’un Collège de Médecine et de Chirurgie dont il devint le doyen.
Freer avait associé à son œuvre, non seulement des Américains, mais des Philippins, qu’il poussait de tout son entrain vers les études supérieures et la recherche scientifique, afin qu’ils eussent également leur part dans la mise en valeur de leur propre pays. Aussi sa mort prématurée a-t-elle été vivement regrettée à la fois de ses compatriotes et de tous les Philippins cultivés, qui perdent en lui un protecteur et un ami [1].
L.B.