Extraction de l’or. Procédé électrolytique de M. Henry R. Cassel

La Nature N° 644 — 3 octobre 1885
Vendredi 10 octobre 2014 — Dernier ajout dimanche 24 mars 2024

La Nature N° 644 — 3 octobre 1885

Extraction de l’or. Procédé électrolytique de M. Henry R. Cassel

L’or se présente dans la nature soit à l’état de grains plus ou moins gros, soit à l’état d’une poussière assez ténue pour surnager sur l’eau en mouvement, soit de grains enveloppés d’une gangue tellement tenace que l’on ne peut songer à l’amalgamation, soit enfin à l’état de combinaison ou de mélange intime avec le soufre l’antimoine, l’arsenic et le plomb.

Dans le premier cas, il n’est pas difficile de récupérer l’or au moyen de lavages. Dans le second cas, l’or se retire au moyen du mercure ; il faut toujours compter cependant sur une perte dont l’importance dépend de l’installation et du degré de division du métal. Dans le troisième cas, on ne peut procéder à l’amalgamation qu’après un broyage préalable. Mais là aussi il y a à craindre que la matière ne s’échappe en grande partie dans l’eau courante, à cause de son état de division. Le quatrième cas est le plus complexe. Les matières étrangères s’opposent en effet à l’amalgamation de l’or, en s’unissant elles-mêmes au mercure et rendant ce dernier impropre à dissoudre l’or. L’extraction présente, par suite, de grandes difficultés et jusqu’à présent on se contentait de se débarrasser de la plupart des substances nuisibles au moyen d’un grillage préalable, et de traiter ensuite les matières par le mercure ou le chlore.

La difficulté d’obtenir une oxydation complète oppose des obstacles insurmontables au traitement économique de bien des minerais, et c’est à cette circonstance que l’on doit de voir abandonner de nombreux approvisionnements de pyrites aurifères.

C’est la théorie de Bequerel sur la formation de dépôts aurifères sous l’influence de l’eau de mer et des forces électro-chimiques, qui a donné l’idée de recourir à l’électricité pour l’extraction de l’or.

Il parut convenable d’utiliser le chlore à l’état naissant tel qu’il se présente lorsqu’il se dégage de sa combinaison avec le sodium dans le sel marin sous l’influence de l’électrolyse. Le chlore qui se dégage au pôle positif c’est-à-dire à l’anode, constitué par de l’or, le transforme en chlorure d’or qui se dissout aussitôt dans le bain.

Les expériences montrèrent en effet que le chlore dégagé au pôle positif possédait une affinité remarquable pour l’or, qu’il s’y combinait rapidement de préférence aux autres métaux en présence, tels que l’antimoine, l’arsenic, etc. Malheureusement, en poursuivant ces essais on s’aperçut que l’on ne pouvait éviter une seconde réaction donnant naissance à l’acide chlorhydrique et à des oxydes de chlore ; le premier acide s’emparait alors du fer en présence et précipitait l’or au fur et à mesure qu’il était dissous. Telle est la difficulté que ne savaient surmonter les métallurgistes, après qu’ils étaient parvenus à dissoudre tout l’or contenu dans les minerais.

C’est à M. Henry R. Cassel, de New-York, qu’il appartenait de lever ce dernier obstacle, et de trouver un procédé électrolytique qui permît de reprendre ces minerais réputés inexploitables, et d’en tirer parti en transformant ces combinaisons de fer en produits insolubles, sans influence par suite sur l’or dissous. Il obtint ce résultat en ajoutant de la chaux éteinte au mélange de minerais bocardés et de sel marin, laquelle se combinait à l’acide chlorhydrique au fur et à mesure de sa formation. Le chlorure de calcium provenant de cette combinaison régénère de nouveau du chlorure au contact du bain ; les autres produits sont du sel marin en excès, du chlorure de calcium, du chlorure d’or, des gangues insolubles à l’anode, et, quand les pôles sont séparés par un diaphragme, du chlorure de sodium et de la soude à la cathode.

L’appareil dans lequel s’effectue cette opération consiste en un cylindre tournant dans une auge en bois. Ce cylindre est isolé au point de Vllc8 électrique de l’auge, à l’exception de sa surface qui est constituée par une substance poreuse se laissant traverser par le courant électrique, quand l’appareil est rempli jusqu’à une certaine hauteur d’une solution saline saturée mise en communication avec la source d’électricité. La partie inférieure du tambour constitue l’anode ; l’auge doublée de cuivre, l’électrode négative ou cathode. Le fil conducteur traverse l’arbre du tambour et communique avec un grand nombre de baguettes de charbon, ou de faisceaux de baguettes, plantés sur toute la superficie du tambour à un pouce de l’enveloppe poreuse ; il va sans dire que toutes les liaisons métalliques doivent être parfaitement isolées du bain pour éviter les corrosions et les interruptions de courant. Aussitôt que la cuve et le cylindre sont l’emplis de dissolution saline et que le courant y pénètre, il se forme un circuit complet et l’électrolyse s’effectue ; le chlore se développe à l’intérieur et l’hydrogène (provenant de l’eau) se dégage par le cuivre dans l’auge, dans laquelle se rassemble également l’hydrate de soude en dissolution.

Le minerai à traiter est déversé dans le tambour au moyen d’une trémie distributrice ; le tambour tourne, suivant la quantité de minerais et la puissance de la dynamo, à raison de 10 tours à la minute environ. Le minerai se trouve ainsi bien agité, et tombe d’une façon continue sur les pointes de charbon constituant l’anode où le chlore vient sans cesse se concentrer grâce à l’agitation du liquide. Au bout d’une heure environ, on arrête la rotation du tambour et l’on ajoute une quantité convenable de chaux éteinte avant de tourner de nouveau. Le fer qui s’était dissous par la réaction de l’acide chlorhydrique et d’autres acides, est précipité, et le chlore réapparaît de nouveau, tandis que l’on évite la formation de nouveaux acides en liberté, grâce à la présence de la chaux alcaline.

L’or de nouveau dissous persiste dans cet état tant que le bain teste alcalin ; ce à quoi il faut faire bien attention sous peine de voir l’or se déposer. L’extraction de l’or se trouve terminée au bout de quatre heures environ ; il suffit alors de recueillir le liquide par décantation ou par filtration ; on reprend cette liqueur, on y précipite l’or au moyen du fer ou d’autres procédés connus, on réunit ce dernier sur un filtre et on peut le fondre.

Si l’enveloppe du tambour est constituée par de l’amiante ou toute autre substance à travers laquelle la solution peut filtrer sans entraîner de matières étrangères, l’or se dépose dans l’auge au pôle négatif constitué par les doublures de cuivre, à l’état de poudre noire, à l’état métallique, que l’on peut fondre immédiatement. Celle dernière méthode est considérée comme la plus pratique et la plus convenable. On évite ainsi de longues manipulations ultérieures, et par suite de grands frais ; quant à l’or qui reste adhérent aux plaques de cuivre ou au filtre, on peut toujours le reprendre au creuset.

On peut ainsi desservir un certain nombre de tambours pareils de 4 pieds de diamètre et 3 pieds de long, à l’aide d’une seule dynamo dont la puissance doit répondre à la résistance électrique des tambours et à la quantité de la solution.

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