Traité d’analyse chimique par la méthode volumétrique, par le Dr E. Fleischer

A. Henninger, la Revue Scientifique — 22 mai 1880
Samedi 14 septembre 2019
Traité d’analyse chimique par la méthode volumétrique, par le docteur E. Fleischer, traduit de l’allemand sur la deuxième édition, par le Dr L. Gautier. 1 vol. in-8° de 424 pages, avec figures dans le texte. Chez. F. Savy. Paris, 1880.

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Il est deux méthodes d’analyse chimique : l’une ayant pour objet d’isoler le corps cherché sous une forme parfaitement définie et constante, et de le peser directement : c’est la méthode des pesées ; l’autre faisant subir au corps, par certains réactifs en liqueur de titre connu, des réactions chimiques intégrales dont la fin peut se traduire par des signes extérieurs ; il existe dans ce cas une proportionnalité entre le poids du corps cherché et le volume de la liqueur employée : c’est la méthode des volumes.

Chacune de ces méthodes, qui se sont développées parallèlement, présente des avantages et des inconvénients ; cependant on peut dire que l’analyse volumétrique tend à remplacer de plus en plus l’analyse par les pesées. Ses procédés sont incomparablement plus rapides et dans un grand nombre de cas ne le cèdent nullement, en exactitude, aux meilleurs procédés de celle-ci. Souvent, en effet, il suffit d’amener en dissolution le corps à essayer et de procéder au titrage sans avoir au préalable à séparer l’élément à doser des autres corps simples qui raccompagnent ; ou bien, si cette opération est nécessaire, clic est des plus simples. Rappellerai-je à cet égard l’exemple du dosage du fer dans les minerais, la méthode des pesées exigeant au moins dix fois plus de temps que la détermination d’après le procédé admirable de Margueritte ?

Néanmoins l’analyse volumétrique est incomplète et ne constitue point un tout indépendant se suffisant à lui-même ; elle gagnerait à fusionner, pour ainsi dire, avec la méthode des pesées, lui empruntant les procédés de séparation, isolant me me l’élément sous une forme appropriée, mais au lieu de le soumettre au contrôle de la balance, déterminant sa proportion par la burette. C’est ce que M. Fleischer a cherché à faire dans le livre dont M. le docteur L. Gautier nous donne aujourd’hui une excellente traduction. Voici comment l’auteur précise le but qu’il a poursuivi : « Jusqu’à présent, on ne s’est occupé dans l’analyse volumétrique que de la description des méthodes de dosage par les liqueurs titrées et l’on a effectué des séparations, dans les cas où elles étaient nécessaires, d’après le système des méthodes de séparation de l’analyse par pesées. Mais, plus le champ de l’analyse volumétrique s’élargit, plus ou ressent le besoin de posséder des méthodes de séparation spéciales pour l’analyse par les liqueurs titrées, parce que, en général, celles qui sont en usage dans l’analyse par pesées compliquent inutilement le travail.

« Une méthode de séparation dans l’analyse par pesées doit, par de nombreux détours, produire une séparation complète des corps à doser ; pour une méthode de séparation dans l’analyse volumétrique, il suffit le plus souvent, non pas d’isoler le corps de toutes les substances qui l’accompagnent, mais seulement de le faire passer sous une forme convenable pour son titrage, dans lequel cas la présence d’un grand nombre d’autres substances, même analogues, est souvent sans influence. Il résulte de ce qui précède qu’une méthode de séparation pour l’analyse volumétrique doit, en général, être beaucoup plus simple que pour l’analyse par pesées, et que, par suite, le travail lui-même doit être moins long. »

Ainsi il ne s’agit nullement d’appliquer purement et simplement les méthodes de séparation ordinaires. La troisième partie de l’ouvrage montre que, tout en conservant la division classique des métaux en quatre groupes, suivant qu’ils précipitent par l’hydrogène sulfuré en solution acide, ou pur le même gaz en solution alcaline, ou par le carbonate d’ammonium ou, enfin, qu’ils ne sont précipitables par aucun de ces réactifs, l’auteur a apporté de nombreuses modifications aux méthodes de Séparation des éléments d’un même groupe.

Dans la première partie de son livre, M. Fleischer étudie les procédés volumétriques ; ceux qu’il recommande ne sont pas toujours les procédés classiques, et quelques-unes de ces innovations ne sont pas heureuses. L’auteur recommande par exemple de doser le chlorure de chaux d’après la méthode de Graham-Otto, à l’acide d’une solution de chlorure ferreux et du permanganate, et il ne mentionne pas le procédé Gay-Lussac à l’acide arsénieux ou les procédés semblables qui out droit à la même exactitude et présentent l’avantage d’employer des liqueurs titrées inaltérables.

La deuxième partie traite des méthodes de séparation pour les analyses volumétriques. C’est le chapitre nouveau et important du livre ; quelques-unes des méthodes nous paraissent très dignes d’intérêt et trouveront leur application dans l’analyse générale.

La troisième partie, enfin, renferme les applications, c’est-à-dire l’analyse quantitative des substances qui offrent de l’importance au point de vue industriel. L’analyse des potasses et soudes, des savons, du salpêtre, des phosphates, des minerais, des eaux, etc., est traité en détail. Les procédés mis en usage découlent des chapitres précédents.

Le livre de M. Fleischer est bien ordonné, condensé et écrit avec la sobriété marquée du style scientifique. Nous n’osons affirmer sans restriction que l’auteur il atteint entièrement le but qu’il s’est proposé, l’expérience ne s’étant pas encore suffisamment prononcée sur la valeur de telle ou telle méthode de dosage, de tel ou tel procédé de séparation, Néanmoins la tentative de M. Fleischer de rendre l’analyse volumétrique indépendante nous parait heureuse et son livre ne pourra manquer de trouver un accueil favorable.

Arthur Henninger

[1Tous nos articles sont une reproduction complète et la plus fidèle possible des textes parus dans les revues scientifiques françaises.

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