Henri Douvillé (1846-1937)

Nécrologie publiée dans La Nature N°2996 — 1er mars 1937
Dimanche 3 juillet 2011

Né à Toulouse le 16 juin 1846, Douvillé est mort à Paris le 20 janvier dernier. Sorti de l’École polytechnique dans le corps des Mines, il fit presque toute sa carrière dans le service de paléontologie de l’École des Mines où il professa de 1881 à 1911. Les riches collections de cette école lui fournirent les éléments de ses plus importants travaux. Il entra à l’Académie des Sciences en 1907. M. Leclainche, président de l’Académie des Sciences, en donne le résumé suivant :

« Ce sont les Invertébrés fossiles qui sollicitent surtout la curiosité du jeune maître, sans doute en raison de leur intérêt plus immédiat pour l’étude de la Géologie. Reprenant les recherches de Bayle sur les Mollusques du groupe des Rudistes, qui ont pullulé dans les mers chaudes à la fin de la période jurassique et pendant les temps crétacés, il en reconstitue la phylogénie et il met en évidence les variations de leur évolution. Cette étude des Rudistes Et d’autres genres, celui des Hippurites notamment, permet de suivre à travers les temps les variations des types et aussi d’en discerner les causes. L’ensemble de ces recherches n’intéresse donc pas seulement l’étude des terrains et la détermination de leur âge : elle autorise aussi de plus vastes synthèses.

« Le géologue averti qu’était Douvillé ne pouvait manquer de prêter attention à la répartition géographique des espèces étudiées, des Rudistes en particulier. Il observe qu’elles caractérisent, en la délimitant, une vaste zone marine qui traverse les continents d’aujourd’hui, parallèlement à l’équateur. C’est à cette ancienne Méditerranée, la Téthys de Neumayr, qu’il donne le nom de Mésogée. L’étude des Rudistes n’en racontant l’histoire que jusqu’à la fin des temps secondaires, Douvillé demande de nouveaux témoignages à d’autres groupes, postérieurs dans leur évolution : les Orbitolines et les Nummulites notamment. Il suit leur trace en Afrique, en Asie et jusqu’à la Jamaïque et aux Indes néerlandaises.

« Ces recherches permettent de retracer l’histoire de la Mésogée jusqu’au moment où la surrection des isthmes de Panama et de Suez, en la divisant en tronçons, réduit le rôle considérable qu’elle a rempli dans l’évolution du globe terrestre et des formes animales primitives. Douvillé montre que les eaux chaudes de la Mésogée séparaient l’Europe de l’Afrique, les recouvrant en partie l’une et l’autre, tandis qu’elle envoyait des prolongements à l’intérieur des terres. C’est ainsi que le bassin de Paris communiquait avec elle par la Basse-Loire, tandis qu’il était baigné, en direction de la Belgique, par les eaux froides des mers boréales.

« L’étude approfondie des groupes mésogéens est accompagnée de celle de divers Invertébrés : Oursins, Brachiopodes, Lamellibranches, Ammonites. La morphologie des diverses espèces d’animaux fouisseurs permet de discerner des caractères convergents, liés au genre de vie, et elle apporte un confirmation imprévue de la notion évolutionniste que la fonction crée l’organe.

Représentant éminent de la paléontologie et maître incontesté d’une partie de cette science, Douvillé demeure fidèle à la Géologie et il lui consacre nombre de Mémoires ou de Notes. En dehors de sa participation à l’établissement de la Carte géologique de la France, il étudie plusieurs région seul ou avec divers collaborateurs. Dès 1871, il précise, par l’analyse stratigraphique, l’âge des calcaires de Château-Landon et du Berry ; il étudie avec le même bonheur les assises jurassiques du Berry et du Poitou. En 1900, il donne une explication, vérifiée depuis, de la distribution et de l’aspect des terrains tertiaires de la région d’Interlaken. »

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