Ruhmkorff (1803 — 1877)

La Nature N°241 — 12 janvier 1878
Dimanche 23 janvier 2011 — Dernier ajout mercredi 10 janvier 2024
H. D. Ruhmkorff

Le célèbre physicien que la science vient de perdre (19 décembre 1877) est né en Hanovre en 1803. Après avoir terminé son apprentissage de mécanicien, à l’âge de dix-huit ans, il quitta sa ville natale et se mit à parcourir l’Allemagne pour se perfectionner dans son métier. Il se rendit ensuite à Paris, où il résida pendant deux ans ; puis il partit à Londres. Après un séjour de même durée en Angleterre, il revint à Paris et y travailla dans différents ateliers pendant treize années consécutives.

Ruhmkorff se sentait né pour s’élever au-dessus de la profession d’ouvrier ; en 1859, il quitta son dernier patron et s’établit à son compte. Ses débuts furent modestes, comme ceux de tous les hommes qui ont besoin pour vivre de leur salaire quotidien. C’est dans une humble chambre qu’il construisit le premier de ses instruments, qui devait se transformer en l’admirable machine d’induction à laquelle s’est attaché son nom. La bobine de Ruhmkorff a fait faire à la science des progrès immenses, et c’est à juste titre qu’elle valut à son inventeur le grand prix de Volta (prix de 50000 francs), la plus haute récompense nationale qu’on ait pu lui offrir.

Eu 1844, Ruhmkorff exposa à Paris un appareil thermo-électrique complétement transformé par lui, et qui servit aux belles expériences de Melloni ; cet appareil lui valut une médaille d’argent.

En 1849, il exposa un appareil construit pour exécuter les expériences de polarisation par le magnétisme, de Faraday, et les essais diamagnétiques ; il obtint une seconde médaille d’argent.

A l’Exposition universelle de 1855, le succès de Ruhmkorff fut complet avec son appareil d’induction ; le jury lui décerna une médaille de 1re classe ; il fut en outre nommé chevalier de la Légion d’honneur. Quelque temps après, on lui conférait le grade d’officier de l’Instruction publique.

Nous ne pouvons énumérer tous les appareils construits par Ruhmkorff ; nous dirons seulement que son nom est attaché à toutes les applications nouvelles de l’électro-magnétisme. Pendant cinq années consécutives, l’Académie lui décerna le prix Frémont de 5500 francs, institué pour aider dam ses recherches un inventeur sans fortune.

Aujourd’hui le nom de Ruhmkorff est européen ; tous les cabinets de physique, toutes les Universités, tous les collèges, tous les établissements d’enseignement du monde possèdent ses instruments, et les savants de tous les pays ont eu recours à son talent pour l’exécution des appareils les plus exacts et les plus délicats.

Ruhmkorff avait fait de la France sa patrie adoptive ; et lui resta toujours fidèle malgré ses désastres et ses malheurs. Après la guerre de 1870-1871 on fît à l’inventeur les offres les plus séduisantes pour le décider à transporter sa résidence à Berlin, mais il opposa, sans cesse, à toutes les propositions, faites dans ce sens, le refus le plus énergique et le plus résolu. Il a voulu, jusqu’à sa dernière heure, rester à Paris, qu’il aimait, dans son modeste mais bien célèbre atelier, en face de la vieille Sorbonne. Nous avons vu que la France n’a pas oublié le fils adoptif qui a travaillé à sa gloire scientifique.

Ruhmkorff était d’un caractère timide, doux, qui attirait la sympathie. Il était très laborieux et sans cesse à l’affût du progrès. Quand il l’avait saisi, il le réalisait de la manière la plus utile, puisqu’il s’appliquait à le faire connaître de tous en le répandant, sous une forme saisissante, dans l’enseignement du monde entier.

Ruhmkorff a donné pendant toute sa vie le plus bel exemple de la modestie et du désintéressement. Il avait conquis l’estime et l’affection des plus hautes notabilités de la science. Ce fut un ouvrier, dans la belle acception du mot : il s’éleva, par le travail et l’intelligence, au rang des grands inventeurs.

Le portrait de Ruhmkorff, que nous reproduisons ci-dessus, a été fait d’après une photographie que sa famille a bien voulu nous confier. La physionomie de l’inventeur était intelligente et avenante, son œil était vif, et son regard pensif ; cette figure loyale, encadrée de cheveux blancs , était du reste bien connue, car elle a été souvent reproduite dans les journaux illustrés, surtout au moment où Ruhmkorff obtint le grand prix de Volta.

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