L’éclairage au moyen-âge

La Science Illustrée N° 601, 3 Juin 1899
Samedi 28 février 2009 — Dernier ajout dimanche 17 mai 2009

Comment s’éclairaient nos ancêtres ? L’histoire nous répond qu’ils adoptèrent d’abord l’usage des lampes à pied ou suspendues à l’imitation des Romains et dans lesquelles ils brûlaient, dans le nord, de l’huile de navette ; dans le midi, de l’huile de noix. Mais l’usage de la cire et surtout du suif était aussi fort répandu sous forme de chandelles.

Ce dernier terme s’appliqua, jusqu’au XIVe siècle, aussi bien pour désigner la chandelle proprement dite, ou de suif que la bougie ou chandelle de cire. A partir de cette époque cependant trois mots sont employés dans un sens distinct : chandelle, pour le suif, cierge pour la cire d’église, bougie pour la cire employée dans les habitations parce que c’était de la ville de ce nom que l’on tirait la cire d’Afrique qui passait pour la meilleure.

La chandelle de suif constituait, alors comme jusqu’à ces dernières années, l’éclairage des classes peu aisées à cause de son prix relativement faible ; la cire était rare même dans les habitations somptueuses .

Dans les fêtes, on ajoutait à cet éclairage des torches de résine que des serfs portaient à la main. Le tragique épisode du Ballet des Ardents prouve que cette coutume, déjà signalée dans Grégoire de Tours, s’était perpétuée jusqu’au règne de Charles VI.

Dès le XIVe siècle, il existait une corporation des chandeliers-ciriers-huiliers rangée sous la bannière de Saint-Nicolas. L’apprentissage était de six ans. Les principales opérations du métier consistaient à clarifier le suif et la cire, à couper et à ajuster les mèches de deux fils de coton et d’un fil de chanvre, à les attacher par rangées à une baguette, à les plonger et à les replonger, jusqu’à ce qu’elles aient acquis la grosseur et le poids convenable, dans le vase qui contient le suif ou la cire en ébullition. Les meilleures chandelles de cire venaient du Mans.

La falsification n’a pas attendu notre époque pour s’exercer aux dépens de l’acheteur ; certains chandeliers recouvraient de bon suif une chandelle formée de mauvaise matière première ; ces chandelles fourrées donnèrent lieu à bien des discussions et aussi à des règlementations. Au XVe siècle, il était interdit aux membres de la corporation de mêler la vieille cire avec la nouvelle, le suif de mouton avec le suif de vache, et de mettre, aux mèches, plus d’étoupe que de coton. Plus tard, on améliora la fabrication en ajoutant une couche de suif à trois couches de cire. On employa le marc d’huile de noix pour faire des chandelles ; on fit la mèche entièrement en coton ; on vendit des chandelles de toutes les couleurs, de toutes les nuances, en cire blanche, bleue, rouge, verte, jaune, jaspée ; « triolé, riolé, comme la chandelle des rois », disait un vieux proverbe.

La chandelle n’était guère perfectible ; malgré les grands progrès de la chimie on n’a pu arriver à combattre complètement la trop grande fusibilité du suif et la combustion incomplète de la mèche ; seule, la bougie stéarique, due aux travaux de Chevreul, a apporté à ce mode d’éclairage insuffisant un remède efficace.

Ce coup d’œil jeté rapidement sur l’histoire de la chandelle, il nous reste à dire quelques mots des ustensiles, flambeaux, chandeliers, bougeoirs destinés à la maintenir et à la transporter.

Au moyen âge, les chandeliers, quelle que fût leur destination, civile ou religieuse, étaient couverts de représentations animales. Ceux d’église portent tous à leur base des dragons qui sont un symbole de la victoire de la lumière sur l’esprit des ténèbres.

Le cétébie, flambeau dit de Glocester, que nous reproduisons et qui flgure au musée de South-Kensington, de Londres, est un exemple curieux de l’orfèvrerie religieuse au début du XIIe siècle. Il est formé d’un alliage d’argent doré. Sa base triangulaire s’appuie sur trois têtes de dragons. Sa tige, son pommeau et son calice supportent quarante-deux monstres tous différents émergeant d’un fouillis de feuillages contournés, de banderoles et d’inscriptions latines portant des devises, le nom du donateur, etc.

Le métal, la faïence, le bois même sont employés alors dans cette fabrication. L’émaillerie y est fort commune ; Limoges, au XIIIe siècle, produisait des chandeliers champlevés.

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