Buire et burettes

La Science Illustrée N° 602, 10 Juin 1899
Vendredi 27 février 2009

Comme les aiguières, les buires étaient primitivement des vases à mettre de l’eau. Elles étaient de grandes dimensions et on nomme encore buie ou buye un grand récipient en poterie de 7 à 8 litres, présentant à sa base une panse renflée et, sur l’un de ses côtés, une anse arrondie. En province les ménagères utilisent la buie pour transporter l’eau.

Dans le Limousin on employait autrefois, sous le nom de buzo pour conserver l’huile de noix, de grandes buires de terre ayant une contenance de 50 litres.

Pour le service de la table, les buires étaient de dimensions plus modestes ; on y mettait de l’eau, du vin ou d’autres liquides. Leur forme était celle d’une sorte d’amphore à panse ronde munie d’une anse et, pourvue d’un pied. La buire diffère de l’aiguière qui avait les mêmes usages et les conserva plus longtemps - en ce qu’elle est dépourvue de goulot. Sa panse n’est que la continuation renflée de la gorge et se prolonge parfois par le bas en supprimant le pied.

D’abord fabriquées en terre, puis en cuivre ou en étain, les buires devinrent des pièces d’orfèvrerie travaillées amoureusement par l’artiste.

Le musée du Louvre possède une belle buire conique du célèbre émailleur limousin Colin Nouailher, une autre cylindrique, de Jean Pénicaud, troisième du nom, etc. A Cluny, une buire à décor bleu en faïence de Nevers est également fort remarquable. Ces trois belles pièces sont du XVIe siècle.

Dans l’inventaire des pièces d’argenterie qui décoraient le palais de Versailles, il est fait mention de plusieurs grandes buires d’argent aux armes du roi. Ces vases faisaient partie de l’orfèvrerie composant les buffets offerts aux ambassadeurs et aux officiers de la ville.

La taille des buires diminue de plus en plus ; leur caractère d’utilité ménagère disparaît. Ce sont des vases d’orfèvrerie, de céramique ou de cristal destinés à prendre place sur les buffets ou dans les vitrines à cause de la délicatesse de leur travail.

L’époque Louis XV fournit un grand nombre de buires en porcelaine de Chine montées en cuivre ciselé. Celles en faïence de Nevers, de Rouen, étaient aussi fort estimées. Plusieurs, conservées dans nos musées et ayant cette origine, sont en forme de casque et d’un goût charmant ; leurs ornements rappellent le style de Jean Bérain.

Pierre Germain a fait preuve, dans ses buires, de la plus capricieuse fantaisie. La coquille joue un rôle de premier ordre dans son ornementation ; il la recourbe en tous sens, la tuyaute, la festonne, lui donnant une véritable souplesse végétale. Le pied de ses vases est généralement étroit. Sous Louis XVI et pendant le premier empire, on produisit beaucoup de buires en bronze ciselé imitant les vases antiques.

La burette, dérivée de la buire, fut d’abord uniquement destinée au service religieux. Deux de ces petits vases contenant, l’une l’eau, l’autre de vin, figurent dans le sacrifice de la messe. Fort simples et en verre, à l’origine, on les fait bientôt en or et en argent. Pour éviter la confusion entre les liquides on grava A (aqua) ou V (vinum) sur leur panse, suivant qu’elles étaient destinées à contenir l’eau ou le vin. On préfère aujourd’hui les burettes en cristal ornées d’une riche monture métallique, mais laissant apercevoir les liquides.

Dans le service de la table, la burette est encore actuellement un accessoire d’une importance assez grande. On y met différents liquides, notamment l’huile et le vinaigre destinés à l’assaisonnement.

Le musée du Louvre possède une jolie collection de burettes de tous les styles et de toutes les époques. Les plus curieuses datent du XVIe siècle ; les unes sont en cristal de roche monté en argent émaillé ; d’autres sont complètement en métal précieux.

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