Nos savants chez eux : M. Janssen

Louis Figuier, La Science Illustrée n° 288 — 3 juin 1893
Samedi 26 décembre 2015 — Dernier ajout vendredi 10 novembre 2017

La Science Illustrée inaugure aujourd’hui une série d’études biographiques sur les savants illustres, nos contemporains. Elle se propose, en empruntant le secours de la photographie et de la gravure, de représenter dans leur cabinet de travail, dans leur laboratoire de physique ou de chimie, dans leur observatoire astronomique ou météorologique, dans leur amphithéâtre d’expérimentation physiologique ou médicale, les notabilités de la science française le plus en vue de notre temps, de faire connaître les particularités intéressantes de leur vie scientifique ou privée, et les découvertes qui recommandent leur nom à la reconnaissance publique. Nous ouvrons cette série par M. Janssen, comme l’une des illustres personnalités de l’Académie des sciences de Paris. Toutefois, en essayant de peindre M. Janssen chez lui, nous ne nous dissimulons pas que nous nous heurtons tout de suite aune difficulté de fond. La résidence n’est pas, en effet, ce qui caractérise le savant dont nous allons nous occuper. Comme on le disait de beaucoup d’évêques du temps de Louis XIV, la présence au diocèse n’est point son apanage. Ce qui le caractérise, au contraire, c’est son humeur voyageuse ; c’est son désir de se trouver dans tous les lieux du globe qui doivent être le théâtre de phénomènes physiques, astronomiques ou météorologiques nouveaux. M. Janssen n’a pas assisté à moins de six éclipses totales de Soleil, et pour les observer dans les lieux favorables, il a sillonné la terre et les mers. Il a été le grand commis voyageur de la science. Aucune expédition scientifique importante, relative à l’astronomie ou à la physique du globe, ne l’a trouvé indifférent, et il faut remarquer, d’ailleurs, que c’est dans chacun de ses voyages lointains qu’il a réalisé ses principales découvertes, celles qui ont manqué un progrès de l’astronomie, l’invention ou le perfectionnement d’un instrument de physique, ou la révélation de quelques particularités nouvelles sur la constitution du Soleil et des planètes. Heureusement qu’après tant de pérégrinations brillantes à travers les deux mondes M. Janssen a fini par se fixer. L’observatoire qui a été construit à Meudon, il y a quelques années, le retient près de nous ; de sorte que pour parler de M. Janssen chez lui, nous n’avons qu’à aller le trouver à Meudon, dans son observatoire, qui est le véritable chez soi d’un astronome.

M. Jules Pierre César Janssen appartient (nous le croyons, sans en être sûr) à une famille hollandaise d’origine, mais depuis longtemps fixée en France. C’est à Paris qu’il naquit, le 24 février 1824. Il a donc aujourd’hui 69 ans, et à voir son œil vif, son activité physique, son ardeur au travail, qui ne s’est jamais interrompue, on ne lui attribuerait pas cet âge. Sa physionomie austère et méditative donne bien l’idée d’un homme qui a concentré sa pensée sur les questions les plus élevées de la philosophie naturelle. Destiné par ses parents à la carrière des arts, il prit, pendant quelque temps, des leçons de peinture, tout en suivant les cours du lycée, comme externe. Mais un penchant irrésistible l’entraînait vers l’étude des mathématiques, et il abandonna bientôt ses pinceaux, pour suivre les cours de la Faculté des sciences. Reçu licencié es sciences mathématiques, en 1852, il fut nommé, dès l’année suivante, professeur de sciences au lycée Charlemagne. Il prit alors successivement les grades de licencié es sciences physiques (1883) et de docteur es sciences mathématiques (1860). Sa thèse pour le doctorat es sciences mathématiques est restée célèbre. C’est là qu’il démontra la curieuse propriété des milieux de l’œil d’absorber la chaleur rayonnante, obscure qui pourrait blesser la rétine et de ne laisser parvenir jusqu’à cette membrane, que la portion des rayons lumineux nécessaire à la vision. Cette découverte, qui attira sur le jeune physicien l’attention des savants, le conduisit à combiner avec le Dr Folliu, un ophtalmoscope perfectionné. C’est à cette époque, en effet, que l’ophtalmoscope était introduit en France. Le jeune professeur était déjà animé pour l’astronomie d’un zèle qui ne devait que s’accroître avec le temps. Il avait construit, malgré le peu de ressources dont il disposait, une lunette astronomique, avec laquelle il se livrait, soit chez lui, soit au lycée Charlemagne, à l’observation du ciel. Cette sorte de vocation le fit remarquer des physiciens et astronomes de l’Académie des sciences : des Regnault, des Pouillet, des Biot, des Bouvard, des Le Verrier ; et l’Académie ayant décidé, pour fixer un point fondamental de la théorie du magnétisme terrestre, d’envoyer au Pérou un jeune physicien, capable de déterminer, avec toute la rigueur mathématique la ligne de l’équateur magnétique de notre globe, cette mission délicate lui fut confiée. Mais il fut arrêté dans ses travaux sur le terrain par une grave maladie contractée au milieu des forêts vierges de la République de l’Équateur. On sait qu’une découverte fondamentale pour la physique et l’astronomie vit le jour, en 1861, grâce aux admirables travaux de Kirchkoff et Bunsen : nous voulons parler de la spectroscopie, ou examen des raies obscures du spectre, provenant de la décomposition par le prisme de la flamme des corps brillants, qui émettent leur lumière soit sur la terre, soit dans le ciel. Le spectroscope s’annonçait comme devant produire une révolution dans l’astronomie physique et dans la chimie, et l’avenir n’a fait que confirmer cette prévision. C’est, en effet, grâce au spectroscope qu’a été réalisé ce prodige de nous faire connaître la composition chimique du soleil, des étoiles, des planètes, de leurs satellites et même des comètes. Le spectroscope était à peine annoncé que l’Académie des sciences de Paris voulut que les raies telluriques du spectre solaire fussent étudiées sous un ciel favorable, et l’on dépêcha en Italie M. Janssen, qui se chargea de ce genre d’études, alors nouveau, en 1861, en 1862 et 1864. L’admirable découverte de Kirchkoff et Bünsen fut ainsi confirmée, et des faits de la plus haute importance demeurèrent acquis à l’astronomie. Les différentes remarques qu’il avait faites dans le cours de ses études conduisirent M. Janssen à craindre que la vapeur d’eau atmosphérique ne contribuât à la production des raies telluriques du spectre solaire, et l’expérience, restée classique, de l’usine de la Villette, faite en 1866, confirma cette hypothèse. Voici en quoi consiste cette expérience : le spectre obtenu en faisant traverser par un faisceau lumineux un tube de 37 mètres de long, fermé à ses extrémités par de fortes glaces et rempli de vapeur d’eau comprimée à 7 atmosphères, rappelait par son aspect celui du Soleil couchant. C’était donc la confirmation certaine des théories de 1864, et c’était, de plus, un moyen assuré de reconnaître la présence de la vapeur d’eau dans les corps célestes. On pût ainsi constater que l’atmosphère solaire ne contenait pas de vapeur d’eau, tandis qu’on en reconnaissait la présence dans les atmosphères de Mars, de Saturne, ainsi que d’autres planètes et étoiles, aussi bien que dans lès hautes régions de l’atmosphère terrestre. En 1867, M. Janssen fut envoyé par le Bureau des longitudes à Trani (Italie), pour observer une éclipse annulaire de Soleil. Quelques mois plus tard, le ministre de l’Instruction publique le chargeait d’étudier le volcan de Santorin, alors en éruption. Enfin, dans cette même année 1867, l’Académie des sciences le choisit, avec Sainte-Claire Deville, pour aller étudier les caractères magnétiques et topographiques des îles Açores. En 1868, devait avoir lieu la plus belle éclipse de soleil que l’on eut jamais observée. C’était la première fois qu’on allait appliquer à l’étude des éclipses l’analyse spectrale. Le monde savant était en émoi, et toutes les nations se préparaient à procéder à l’examen physique de cette éclipse. À Paris, l’Observatoire confia cette mission à MM. Reyet et Stéphan ; le Bureau des longitudes choisit M. Janssen. Le 18 mai, notre astronome est à Gùntoar, sur les bords du Godavery, au centre de l’Inde, et il découvre, en même temps que la nature des protubérances solaires, une méthode pour les étudier en tous temps, ce qui dispense de la nécessité de les observer au moment des éclipses. Immédiatement appliquée à Rome par le père Secchi, le succès de cette méthode fut tel que les astronomes anglais et allemands ne tardèrent pas à l’adopter et qu’elle demeura définitivement acquise à la science. Pour cette belle découverte l’Académie des sciences décerna à M. Janssen le prix Lalande, qui par exception fut porté au quintuple. Arriva la guerre franco-allemande et le siège de Paris. De la capitale, étroitement bloquée par les Prussiens, personne ne pouvait sortir que par le moyen dangereux et précaire des aérostats libres. Et pourtant une éclipse totale de soleil était annoncée pour le 22 décembre 1870, complètement visible en Algérie. M. Janssen n’hésita pas un instant, il se décida à quitter Paris en ballon. Le 2 décembre, à 6 heures du matin, seul avec un matelot et quatre caisses d’instruments, M. Janssen monte dans le Volta, et quitte Paris. Il passe au-dessus de l’armée prussienne, traverse l’Ile-de-France, le Maine, la Bretagne, et vient atterrir sans accident, mais non sans danger, aux environs de Savenay, près l’embouchure de la Loire, après avoir parcouru près de 100 lieues en cinq heures. Le soir même il est à Tours, et de là se met en route pour Marseille et Oran, où il trouve les astronomes anglais et procède à l’observation de l’éclipse. Ce voyage en ballon ne fut pas perdu pour la science. M. Janssen en profita pour créer un instrument le compas aéronautique, véritable boussole qui permet de fixer à chaque instant sur la carte, la position d’un aérostat. En 1871, M. Janssen fut chargé d’aller observer aux îles Sandwich une éclipse totale de Soleil, qui devait se produire le 12 décembre. Pendant l’observation de cette éclipse il constata l’existence d’une nouvelle enveloppe gazeuse du Soleil qu’il nomma atmosphère coronale. Pendant ce voyage, M. Janssen exécuta divers travaux de physique terrestre et détermina la position actuelle de l’équateur magnétique, continuant ainsi la première mission qu’il avait reçue dans sa jeunesse. Il rapporta d’Asie une précieuse collection d’animaux, pour le Muséum d’histoire naturelle de Paris. En 1874, il fut chargé d’aller observer au Japon le passage de Vénus sur le Soleil, Cette mission, à laquelle le gouvernement brésilien sollicita la faveur d’adjoindre plusieurs de ses savants, s’accomplit avec beaucoup d’éclat et réussit complètement. Au retour, M. Janssen fut invité à se joindre une expédition anglaise qui allait observer l’éclipse totale de soleil du 6 avril 1875, dans le royaume de Siam. En 1882, deuxième observation du passage de Vénus. En 1883, il dirigea une expédition française envoyée à l’île Caroline, pour observer l’éclipse du 6 mai. À sa mission s’étaient adjoints MM.Tacchini, l’habile directeur de l’observatoire de Rome et Palisa, de l’observatoire de Vienne. À son retour, pendant une relâche à Hawaï, M. Janssen put étudier le volcan Kilauea. Une nuit qu’il passa dans ce grand cratère, lé plus remarquable du monde, et sur les bords d’un lac de lave en fusion, lui permit de faire des études d’où il résulte de curieuses analogies entre les phénomènes volcaniques et ceux de la surface solaire. Nommé représentant de la France au congrès Scientifique de Washington, pour le choix d’un premier méridien, M. Janssen y soutint énergiquement le principe d’un méridien neutre, que l’assemblée désignerait et qui répondrait le mieux à l’intérêt général. Il n’obtint pas la majorité, la presque totalité des délégués ayant reçu la mission de voter pour le méridien de Greenwich ; mais il obtint un vœu du congrès pour l’extension du système métrique français à la mesure des angles et à celle du temps. En 1888, pour élucider la question, controversée, de la présence ou de l’absence de l’oxygène dans l’atmosphère du Soleil, il fit une première ascension du mont Blanc jusqu’à la station des Grands-Mulets ; et, en août 1890, il s’élevait jusqu’au sommet du géant des Alpes, Les observations faites par M. Janssen, au mont-Blanc, en 1888, ont mis hors de doute qu’il n’existe point d’oxygène dans les enveloppes gazeuses de la photosphère du Soleil. Mais le fait avait besoin d’être confirmé par des études continues, ou, du moins, souvent répétées. Le sommet du mont Blanc, le point le plus élevé de l’Europe (4 820 mètres), offrait, en raison de cette altitude et de l’extrême pureté de l’air, un milieu des plus favorables aux observations de ce genre. De ]à le projet, conçu par M. Janssen, d’édifier un observatoire au sommet du mont,Blanc, au-dessous du petit observatoire qu’un savant de Genève M. Vallot, avait déjà construit. Chacun a encore présents à l’esprit les incidents du curieux et périlleux voyage entrepris en 1890 par M. Janssen.à travers les glaces, les crevasses et anfractuosités du mont Blanc, avec une interminable escorte de guides et de porteurs d’instruments. La Science illustrée, l’Année scientifique et bien d’autres recueils, ont publié in extenso cette pittoresque excursion, à la suite de laquelle a été décidée l’édification d’un observatoire astronomique au sommet du mont Blanc, auquel on a commencé de travailler en 1892 et cette année, grâce à la libéralité de quelques amateurs des sciences.

Les observations faites dans les dernières années de notre siècle, sur l’aspect des astres, grâce aux nouveaux instruments d’optique et à l’analyse spectrale, avaient révélé des faits imprévus sur la constitution des étoiles et des planètes. Une nouvelle branche de l’astronomie, positivement inconnue jusque-là, était sortie de cet ensemble d’études. Le moment était donc venu, pour les nations éclairées, de créer des établissements spéciaux, indépendants des anciens observatoires, et uniquement consacrés aux études de l’astronomie physique. À la suite d’un rapport des plus remarquables fait à l’Académie des sciences, par le doyen de la section d’astronomie, sur la nécessité d’une telle création, le gouvernement français décida de faire construire près de Paris un observatoire spécialement consacré à l’astronomie physique. M. Janssen fut nommé directeur de cet établissement national. C’est à Montmartre que le nouvel observatoire fut d’abord installé, dans l’emplacement même où l’expédition destinée au Japon avait l’ait ses études préliminaires. Mais l’espace était beaucoup trop restreint et la situation peu favorable. M. Janssen demanda que l’observatoire fût installé dans le parc de l’ancien château de Meudon, qui venait d’être brûle par les Prussiens, et qui était alors occupe par l’armée. L’observatoire fut d’abord installé modestement à Meudon, dans un coin du parc ; mais à mesure que l’armée se retira, la part de l’astronomie s’augmenta. Aujourd’hui l’ancien domaine du château est affecté à trois œuvres scientifiques : l’observatoire d’astronomie physique, créé et dirigé par M. Janssen ; la station de chimie agricole, créée et dirigée par M. Berthelot ; l’établissement aéronautique du ministère de la guerre, dirigé par le capitaine Renard. Les ruines de l’ancien château furent relevées et transformées en observatoire, d’après les indications de M. Janssen. Les allées de Bellevue et les terrasses furent replantées et réparées. La terrasse, d’où l’on jouit d’une vue si belle de Paris et des régions du sud-ouest, fut remise en état et livrée au public. L’installation de différents instruments â l’observatoire de Meudon est aujourd’hui à peu près complète, ce qui nous permet de donner une description exacte, tant pour les constructions qu’il renferme,que pour les instruments qui servent aux observations. Spécialement destiné à l’étude de l’astronomie physique, cet observatoire s’occupe d’étudier la constitution physique et chimique des astres, leur formation, les évolutions qu’ils subissent, la nature des corps qui les composent, les atmosphères qui les entourent, les conditions de la vie à leur surface, etc. On fait, à l’observatoire de Meudon, des observations photographiques, spectroscopiques, optiques, magnétiques, etc., et un service y est spécialement organisé pour prendre chaque jour des photographies du Soleil. D’après une méthode imaginée à Meudon même, on obtient des images de cet astre qui ont jusqu’à 0,70 m de diamètre, et qui ont permis d’étudier des détails de sa surface inconnus jusqu’ici. Des photographies, qui sont prises en 1/3000 de seconde, ont révélé des faits du plus haut intérêt. Citons la découverte du réseau photosphérique, des éléments qui composent la photosphère solaire, des facules, des pénombres, les stries des pénombres, etc. On est parvenu à obtenir une photographie de la comète de 1881, la première de ce genre, ainsi que des photographies delà Lune et delà lumière cendrée. Un travail est poursuivi pour comparer entre eux les pouvoirs lumineux actiniques des étoiles et au soleil. Un laboratoire de 100 mètres de longueur, situé dans les anciennes dépendances du château, permet de procéder à l’étude spectrale des gaz de l’atmosphère terrestre, en connexion avec celle des autres planètes. Ce vaste laboratoire contient des tubes de 50 mètres de long, des appareils pour l’étude optique de la vapeur d’eau, des pompes, des machines à faire le vide, des balances pouvant peser 40 kilogrammes à 1 centigramme près, etc. Ce genre d’études a déjà permis à M. Janssen de découvrir les bandes d’absorption de l’oxygène, bandes qui obéissent à une loi toute nouvelle et permettent les recherches de l’oxygène dans le Soleil et les planètes. On sait que cette recherche a été exécutée en 1880, dans l’ascension faite au sommet du mont Blanc par M. Janssen, dans laquelle a été constatée l’absence d’oxygène de l’atmosphère solaire. Dans le courant de l’année 1891, il a été procédé à l’installation définitive de la grande coupole de 20 mètres de diamètre , dans laquelle sera placé un équatorial, portant un objectif astronomique de 0,82 m de diamètre (le plus grand existant actuellement en Europe). Dans le numéro du 31 décembre 1892 de la Science illustrée, notre savant collaborateur M. Wilfrid de Fonvielle a donné la description de la grande lunette de l’observatoire de Meudon, de son énorme coupole hémisphérique, mue par une machine électrodynamique, et des moyens qui servent à faire tourner sur son axe ladite coupole sur des galets, sans la moindre fatigue pour l’observateur. Nous n’avons pas à revenir sur cette description (L’observatoire de Meudon). Outre cette lunette et son énorme coupole, on trouve au même observatoire : 1° Un grand télescope à miroir argenté, ayant 1 mètre de diamètre ; 2° Une lunette de 0,80 m d’ouverture et de 16 ou 17 mètres de distance focale, pour l’astronomie et la spectroscopie ; 3° Une lunette photographique de même foyer et de 0,62 m d’ouverture ; 4° Une coupole de 7,50 m de diamètre pour la lunette photographique, de 5 pouces de diamètre, avec laquelle on photographie le Soleil chaque jour (images de 0,30 :) ; 5° Une coupole de 7,50 m, contenant un télescope (à réflexion) de 1 mètre de diamètre et 3 mètres de distance focale, pour l’étude des nébuleuses ; 6° Une série de coupoles plus petites, pour instruments divers. Elles sont distribuées dans le parc, autour de la grande coupole et à des distances convenables pour ne pas se gêner entre elles. Les travaux qui se font à Meudon sont : 1° La photographie journalière du Soleil, (images de 0,30 m de diamètre). Il existe déjà une collection de plus de 4 000 clichés, depuis l’année 1876 jusqu’à ce jour ; 2° L’étude spectroscopique des astres ; 3° Les photographies de la Lune, des amas d’étoiles, des nébuleuses, avec le télescope de 1 mètre ; 4° L’étude do l’absorption des gaz et des vapeurs, sous grande épaisseur ; 5° Études magnétiques en rapport avec l’astronomie, etc. L’observatoire de Meudon, qui s’élève au milieu de l’ancien parc, se compose, d’un vaste rez-de-chaussée et d’un premier étage adossé à la coupole. Les appartements du directeur sont situés au rez-de-chaussée. Il aura ainsi sous la main la grande lunette, qu’il pourra toujours braquer sur la partie du ciel qu’il faudra explorer. Les autres instruments ont été distribués sur la terrasse supérieure ou à portée de l’observatoire, dans un rayon qui ne dépasse pas 600 mètres. Les savants étrangers, les amateurs de sciences, et tous ceux qui s’intéressent à l’astronomie sont reçus par M. Janssen avec une affabilité, un empressement et une complaisance, dont nous sommes heureux de le remercier, en ce qui nous concerne. Nous n’avons pas besoin de dire que les honneurs académiques n’ont pas manqué au savant astronome, pour le récompenser de son dévouement constant aux progrès de l’astronomie. Le 10 février 1873, il entrait à l’Académie des sciences, en remplacement de Laugier, et le 16 juin de la même année, au Bureau des Longitudes. Il est docteur honoraire des universités d’Edimbourg et de Dublin. La Société royale de Londres, qui lui avait ouvert ses portes, en 1875, lui a décerné, en 1877, le prix Rumford, dont seuls les Arago, les Biot, les Pasteur, avaient été honorés avant lui. Il a été président de l’Académie des sciences, de 1887 à 1888. Il fut successivement président des Sociétés de géographie, de physique, de photographie, du Club-Alpin de Persépolis et du Congrès aéronautique et colombophile réuni à Paris en 1889. Membre de la commission supérieure de la dernière Exposition universelle, il a reçu le grand diplôme d’honneur pour ses travaux photographiques. Il est officier de la Légion d’honneur depuis 1877. M. Janssen a publié un grand nombre d’études, de mémoires, de rapports, qui ont trait à chacune de ses découvertes ou aux missions dont il a été chargé. Il a écrit un certain nombre de discours lors des décès de membres de l’Académie des sciences, et il suffit de lire ces notices pour se rendre compte que, chez M. Janssen, les qualités du cœur et les sentiments du patriote sont au niveau de l’intelligence. Nous pouvons signaler, en terminant, comme son œuvre la plus récente, le discours qu’il a prononcé, le M juin 1892, à la séance générale de clôture du Congrès des Sociétés savantes, tenu à la Sorbonne, sous la présidence du ministre de l’Instruction publique, et qui traite de la question, toujours si intéressante, de la navigation aérienne.

LOUIS FIGUIER.

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