Soudes

Ferdinand Faideau, La Science Illustrée N°495 - 22 Mai 1897
Mercredi 24 août 2011 — Dernier ajout mardi 30 janvier 2018

Les Soudes, très communes sur les falaises, le long des plages et dans les terrains salés, sont des plantes à fleurs peu apparentes, aussi les nombreux promeneurs qui fréquentent les bords de la mer pendant les mois d’août et de septembre se gardent bien de les cueillir, bien qu’elles soient précisément, à cette époque, en pleine floraison. Ils leur préfèrent, avec raison, les fleurs de Statice qu’ils trouvent à chaque pas et qui sont véritablement charmantes avec leur légère corolle d’un violet pâle qui a le précieux avantage de se conserver pendant des mois.

Les Soudes, ainsi que les autres Salsolacées du littoral, méritent cependant de fixer notre attention par les services qu’elles ont rendus pendant longtemps à l’industrie. La soude du commerce (carbonate de sodium) s’obtenait exclusivement, avant l’invention du procédé Leblanc, par l’incinération de ces plantes. Les principaux centres de production étaient situés sur les bords de la Méditerranée, en Provence, en Espagne, au Maroc et en Sicile, mais la fabrication la plus renommée était celle d’Alicante. Cette industrie des soudes naturelles est misérable aujourd’hui et le procédé Leblanc qui lui porta le coup mortel il y a cent ans, est lui-même en pleine décroissance et tend à être supplanté partout par la méthode dite à l’ammoniaque. Telle est la loi du progrès.

Les Soudes sont des plantes peu faciles à déterminer, surtout quand elles sont en graines.

Annuelles pour la plupart, elles offrent des tiges ou des feuilles plus ou moins charnues qui rendent leur dessiccation sinon difficile au moins très lente. Des Soudes bien préparées sont l’orgueil d’un herbier.

Deux espèces seulement croissent en France, la Salsola Soda ou Herbe-au-verre, qu’on trouve sur tous nos rivages, sauf sur ceux de la Manche, et la Soude Kali (S. Kali), qui prospère sur tout le littoral et même çà et là dans la vallée du Rhône. Elle croît dans le sable des grèves, sur les roches des falaises ; ses fleurs, verdâtres ou rousses, sont très rapprochées les unes des autres ; chacune de ses feuilles terminée par une épine contribue à lui donner une apparence rébarbative.

C’est une plante très répandue à la surface du globe.

On la trouve sur le littoral de toutes les mers, dans certains terrains salés de l’Afrique australe, dans les pampas de l’Amérique du Sud, dans les steppes de la Sibérie.

Une de ses variétés, S. Kali, var. tragus., introduite aux États-Unis, dans des semences de lin importées de Riga, s’est développée, dans le Dakota, d’une façon inquiétante et cause, depuis quelques années, des pertes considérables à l’agriculture. En raison de son origine, les habitants la nomment justement Chardon russe [1].

Les vastes plaines salées de la Sibérie sont un lieu d’élection pour les Soudes ; il en existe un grand nombre d’espèces de formes très diverses. Les plus communes, après la Soude Kali, sont la Soude à feuilles opposées (Salsola oppositifolia), la Soude laineuse (S. lanata), la Soude couchée (S. prostrata), la Soude Joubarbe (S. sedoides), la Salsola monandra, la Salsola arbuscula, petit arbrisseau épineux, curieux d’aspect, et la Soude à feuilles d’hysope (S. hyssopifolia), reproduite par notre gravure.

La Soude à feuilles d’hysope est une plante annuelle qui affectionne, comme toutes ses congénères, les terrains humides et salés. Sa tige raide et un peu laineuse, donne des rameaux alternes, non divisés ; les feuilles, alternes aussi, sont linéaires, assez longues. Les fleurs, petites, verdâtres, groupées en épis simples, sont dressées à l’aisselle des feuilles. Le périanthe, légèrement pubescent, est à cinq dents (a) ; l’androcée à cinq étamines (b), dont les anthères tombent aussitôt après la fécondation ©.

Le pistil, formé de deux carpelles médians soudés, est surmonté d’un style simple, bifurqué au sommet en deux stigmates (d). Après la floraison, le périanthe continue à croître et présente bientôt sur ses bords cinq longs filaments rigides (f).

Tels sont les caractères principaux de cette plante qui est la plus belle — peut-être devrait-on dire la moins laide — de toutes les Soudes.

F. FAIDEAU

[1Voir La Science Illustrée, T. XV, p. 177.

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