Maxime Cornu

L. Mangin, La Revue Générale des sciences pures et appliquées — 30 mai 1901
Samedi 12 mars 2011 — Dernier ajout dimanche 3 juillet 2011

Maxime Cornu, enlevé prématurément à la Science, avait de bonne heure manifesté des aptitudes remarquables pour les sciences naturelles, Né à Orléans, en 1843, il entra à l’École Normale en 1865, après de brillantes études. Reçu docteur en1872, pendant qu’il occupait les fonctions. de répétiteur de Botanique à la Faculté des Sciences (1869-1874), il fut nommé ensuite aide-naturaliste au Muséum, en 1874, et conserva ces fonctions jusqu’en 1884. C’est pendant cette période qu’il suppléa Brongniart, dans la chaire dOrganographie et de Physiologie végétales ; à la mort du titulaire, il fut chargé du cours pendant trois ans. En 1884, il fut nommé à la chaire de Culture du Muséum.

Les nombreux travaux de Maxime Cornu peuvent être divisés en deux séries, correspondant aux deux périodes de sa vie scientifique.

Dans la première série, jusqu’en 1884, date de sa nomination au Muséum, nous trouvons surtout des travaux de Cryptogamie. Cornu acquit rapidement, dans ce domaine encore peu exploré en France, une grande autorité ; sa thèse sur la monographie des Saprolégniées fut un coup de maître, et bien des botanistes d’âge mûr envieraient ce travail d’un débutant, récompensé par un prix à l’Institut. Rarement on a vu une plus riche moisson de faits nouveaux, associée à une aussi grande habileté d’observation. Il est fâcheux que le complément de ces belles recherches n’ait pas été publié, bien que les planches qui devaient illustrer le texte fussent prêtes.

Après la publication d’une série de Notes : sur les Chytridinées, dont il indiqua les affinités avec les Myxomycètes ; sur les Rouilles du Pin, de l’Avoine, des Malvacées, dont il vérifia le cycle évolutif, il fit paraître des études très intéressantes sur- les Péronosporées. Il débuta par l’histoire du Meunier des Laitues ou Bremia Lactusæ, et formula les procédés destinés à enrayer, dans les cultures maraichères, celte redoutable affection, Vint ensuite l’histoire du Peronospora de la Vigne on Mildiou, dont il signala le premier le grand danger pour nos vignobles ; bien qu’il n’ait pas indiqué de remède efficace, beaucoup de mécompte, eussent été évités si l’on avait écouté son cri d’alarme.

Sa nomination à la Commission du Phylloxera, comme délégué de l’Institut, lui fit entreprendre des recherches anatomiques et entomologiques dont les résultats, épars dans un grand nombre de Notes, ont été rassemblés en un Mémoire important.

S’il n’a pas élucidé toutes les phases de l’histoire du Phylloxera, il a laissé des documents précieux sur les lésions des radicelles, sur le rôle des formes ailées dans l’extension de la maladie.

Ces diverses études ne l’avaient pas empêché de se livrer à des travaux de Botanique systématique, et il a pris une part importante au classement de certaines collections du Muséum : Algues, Champignons, etc.

Lorsqu’il fut nommé, en 1884, professeur de Culture au Muséum, Cornu trouva, dans ce nouveau service, l’occasion de manifester toutes les ressources de son activité. Il eut d’abord à remettre en état, avec des crédits notoirement insuffisants, les jardins et les serres qu’un assez long interrègne avait laissés presque à l’abandon. Il fit résolument face aux difficultés de la tâche. La restauration des parterres avec des corbeilles à garnitures variables pour chaque saison ; la constitution des collections de plantes d’ornement : Rosiers, Chrysanthèmes, Dahlias, furent, pour le public, les premiers signes visibles de sa gestion. L’établissement de relations permanentes avec les résidents, les colons et les missionnaires, fit affluer au Muséum des plants ou graines d’espèces nouvelles ; il en surveilla le développement avec un soin jaloux, détermina, par l’étude approfondie de la graine, certaines espèces inconnues ou douteuses, et fit connaître les espèces ou les variétés susceptibles d’être répandues soit à titre ornemental, soit à titre alimentaire ou industriel.

Ces multiples occupations n’empêchaient point Cornu de chercher à étendre le cercle d’action du Muséum. Sans méconnaître le rôle de ce grand établissement comme instrument d’études et de collections, il eut le mérite de faire aux plantes utiles des colonies une place jusqu’alors trop exiguë, et il créa, le premier, un cours de Cultures coloniales. Ses efforts ne furent pas vains : depuis quelques années, un certain nombre de colonies, notamment celles de la Côte d’Afrique, ont reçu, par ses soins, des plantes importantes à divers titres, qui sont maintenant en pleine production,

En outre, il étendit et perfectionna le système d’échanges entre le Muséum et les jardins indigènes ou étrangers. Au catalogue annuel des graines, il ajouta, dès 1886, une liste de plantes vivantes nouvelles ou peu connues ; et, à partir de 1887, un nouveau catalogue fut destiné aux divers établissements d’instruction. Tous ceux qui dirigent un jardin botanique, même modeste, ont pu apprécier l’importance de ces innovations.

On pourra juger, par cette courte et incomplète énumération, de l’œuvre accomplie par Maxime Cornu, et les regrets que sa fin prématurée laisse à ses amis seront partagés par tous ceux qui s’intéressent à la prospérité du Muséum.

L. Mangin, Professeur au Lycée Louis-le-Grand,

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